Canada : un "ange gardien de Snowden" appelle Ottawa à accueillir ses proches

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Par Eric THOMAS - Montréal (AFP)
Publié le 26 mars 2019 - 21:24
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La Philippine Vanessa Rodel, le 25 mars 2019 à Toronto
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© Cole BURSTON / AFP
La Philippine Vanessa Rodel, le 25 mars 2019 à Toronto
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Une Philippine dont le destin a basculé après avoir caché l'Américain Edward Snowden lors de sa cavale a appelé mardi Ottawa à accueillir d'autres "anges gardiens de Snowden" restés à Hong Kong, dont le père de sa fille.

"Je suis tellement heureuse d'être au Canada", a dit Vanessa Rodel, 42 ans, lors de sa première conférence de presse mardi matin à Toronto, où elle avait atterri lundi soir avec sa fille Keana, 7 ans.

Elles sont arrivées mardi en milieu d'après-midi à l'aéroport de Montréal, selon un photographe de l'AFP. C'est dans la métropole québécoise qu'elles comptent refaire leur vie, avec l'aide d'une ONG montréalaise, "For the Refugees" (Pour les Réfugiés). Cette association a parrainé sa demande d'asile et la soutiendra financièrement pendant la première année.

Mme Rodel a souhaité mardi que les autres "anges gardiens de Snowden" --comme la presse a baptisé les hommes et femmes ayant brièvement caché le fugitif en 2013 pendant sa cavale à Hong Kong-- puissent également être accueillis rapidement au Canada. Parmi ces cinq personnes, menacées de renvoi vers le Sri Lanka, figurent notamment le père, le demi-frère et la demi-soeur de la petite Keana.

"J'espère qu'ils vont pouvoir grandir ensemble ici au Canada", a-t-elle déclaré, en anglais, devant les journalistes. "C'est vraiment désagréable que la famille soit séparée".

"Deux personnes sont en sécurité au Canada, cinq ne le sont pas", a pour sa part souligné Marc-André Séguin, avocat de l'ONG. Cette association prête assistance aux migrants pauvres de Hong Kong qui ont aidé l'ancien consultant de l'agence de surveillance américaine NSA à échapper aux autorités en le cachant dans leurs petits appartements.

Parmi eux, Mme Rodel, qui s'était réfugiée à Hong Kong en 2002 après avoir fui les Philippines. Elle dit y avoir été séquestrée et violée par un militaire gradé.

- "Je ne le connaissais pas" -

Un jour de 2013, un inconnu frappe à sa porte pour lui demander de l'héberger: c'est Edward Snowden. L'ancien sous-traitant de la NSA est en fuite après avoir dénoncé l'existence d'un système de surveillance mondiale des communications et d'internet. Il est accusé de haute trahison par les Etats-Unis.

Son avocat canadien installé à Hong Kong, Robert Tibbo, avait pensé que personne n'aurait l'idée d'aller chercher le fugitif dans l'appartement d'une réfugiée philippine --qu'il défendait également--, selon la presse.

"Je ne le connaissais pas", s'est souvenue mardi Mme Rodel. "Le lendemain, il m'a demandé d'acheter un journal. J'ai vu une photo de lui en première page, j'ai compris qu'il était l'homme le plus recherché du monde".

Après la sortie en 2016 du film d'Oliver Stone sur Snowden, qui a révélé au grand jour le rôle de ces réfugiés, Vanessa Rodel a été arrêtée et interrogée par les autorités de Hong Kong. Ses aides sociales ont été supprimées. L'association d'assistance aux réfugiés l'a aidée financièrement et a soutenu sa demande d'asile au Canada, finalement acceptée au titre de parrainage privé.

Les demandes déposées auprès des autorités canadiennes pour les cinq autres réfugiés n'ont pas encore abouti. Les avocats de l'ONG plaident pour une intervention du gouvernement de Justin Trudeau afin d'accélérer le processus.

Mais le Premier ministre canadien a expliqué qu'il ne pouvait pas intervenir, invoquant l'indépendance de la justice.

"On demande à M. Trudeau (...) de se rappeler qu'en fait, la loi au Canada permet des mesures discrétionnaires dans des circonstances exceptionnelles et qu'il a un pouvoir d'intervention pour offrir une protection aux gens les plus vulnérables", a relevé M. Séguin.

Dans un entretien diffusé lundi par Radio-Canada, Edward Snowden a exprimé sa gratitude envers le Canada, plaidant lui aussi pour que ce pays puisse accueillir les cinq autres personnes l'ayant aidé dans sa cavale, en plus de Mme Rodel et de sa fille.

"Je ne peux pas décrire les émotions que je ressens, de voir qu'elles auront un avenir, qu'elles pourront vivre en sécurité au Canada. Je suis si reconnaissant", a commenté celui qui vit en exil en Russie.

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