Au Salvador, des détenus choisissent d'oublier les gangs

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Par AFP
Publié le 18 février 2017 - 14:29
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D'anciens membres du gang Barrio 18 vont participer à un cours de catéchisme, à la prison de San Fra
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D'anciens membres du gang Barrio 18 vont participer à un cours de catéchisme, à la prison de San Francisco Gotera, le 16 février 2017 au Salvador
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"Je veux une nouvelle vie, la rue c'était le danger et la mort", confie Francisco Lopez, l'un des 460 anciens membres de gangs au Salvador qui, derrière les murs de la prison, apprennent à tourner la page de la violence.

Le petit pays sud-américain constitue, avec le Guatemala et le Honduras, le "Triangle du nord", tristement célèbre pour ses records de criminalité.

Les "maras" -comme on appelle ici les gangs- font régner la terreur dans cette région sans guerre qui affiche le taux d'homicide le plus élevé du monde. Ils comptent 70.000 membres actifs au Salvador.

Dans le cas de Francisco, c'est le gang Barrio 18 qui a été sa vie pendant 21 années qu'il qualifie aujourd'hui de "gâchées", "une époque de folie que j'ai mal vécue".

"Mais il n'est jamais trop tard pour changer", assure cet homme de 38 ans à la peau mate, dans l'un des patios de la prison de San Francisco Gotera (nord-est).

Désormais repenti, Francisco enseigne à d'autres ex-membres de gangs à confectionner des figurines de papier dans le cadre de leur projet de réinsertion après leur sortie.

L'impulsion d'un détenu, qui a lui-même quitté les rangs de Barrio 18 pour devenir pasteur évangélique, a été décisive: 460 autres l'ont suivi pour se convertir au christianisme et renoncer au gang.

En récompense, ils ont quitté l'isolement total dans lequel ils étaient confinés, dans des cellules surpeuplées et sans possibilité de visite familiale, une mesure mise en place en mars 2016 par les autorités pour combattre la violence en prison.

Ils ont maintenant le droit de sortir tous les jours de leur cellule pour participer à l'un des 21 ateliers de formation proposés et aux cours de catéchisme.

Ils se préparent ainsi à une autre vie: Oscar Alirio Montano, 29 ans, chapeaute par exemple une équipe de 60 détenus dans l'atelier d'art et de dessin sur miroir.

- 'Un avenir meilleur' -

Après avoir purgé 10 des 15 ans et demi de sa condamnation pour extorsion, Oscar veut désormais passer par la "douloureuse" opération pour enlever chacun des tatouages couvrant son corps des pieds à la tête, un signe d'appartenance aux gangs.

D'une capacité de 400 détenus, le centre pénitentiaire de San Francisco Gotera en compte près de trois fois plus - 1.122 - avec des peines dépassant parfois les 100 ans, pour homicide, extorsion et appartenance à des organisations criminelles.

Les prisonniers sont tellement nombreux qu'ils doivent dormir dans des hamacs suspendus au plafond, les uns sur les autres, pour parvenir à tenir dans les cellules.

Dans le but de prouver qu'ils ont vraiment dit adieu au gang, les repentis ont effacés les graffitis consacrés à Barrio 18 des trois pavillons où ils sont détenus, repeignant ensuite les murs de vert et de couleur café.

"Nous sommes en train d'effacer un passé qui inspirait le respect et la peur du gang", souligne le pasteur évangélique Edwin Chicas, à l'origine de ce mouvement de rédemption.

L'un des ateliers proposés aux repentis est d'apprendre l'anglais avec le "professeur" Edwin Garcia, 36 ans: enfant parti vivre aux Etats-Unis, où il a passé 23 ans avant d'être expulsé puis d'être condamné à six ans de prison pour trafic de drogue et port d'armes. Il en a déjà purgé trois.

"J'ai été déporté des Etats-Unis pour les mauvaises choses que je faisais, ils m'ont enlevé la résidence en 2010", raconte-t-il, sans plus de détails.

Dans l'atelier d'alphabétisation, très populaire avec 60 élèves, les détenus "apprennent l'abécédaire et les numéros, c'est le niveau débutant", explique Marvin Arias, 24 ans, l'un des quatre professeurs.

Alexander Lara, 22 ans, et Neftali Escobar, 35 ans, donnent eux des cours de guitare, aux sons de mélodies comme "Je change pour le Salvador" ou encore "Je veux un avenir meilleur".

Si tous ces détenus apprennent ainsi à tourner la page, en revanche, pour ceux qui refusent de renoncer aux gangs, "le traitement sera drastique", prévient déjà le directeur de la prison, Oscar Benavides, afin de "leur faire savoir que désormais la société en a marre" de ces bandes criminelles.

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