"Dernier amour" : Vincent Lindon, Casanova amoureux transi (vidéo)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 18 mars 2019 - 09:25
Mis à jour le 19 mars 2019 - 17:33
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Vincent Lindon en Casanova dans le film Dernier Amour
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©Diaphana Distribution
Vincent Lindon incarne un Casanova aux yeux tristes, amoureux transi.
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CRITIQUE – Casanova a eu de nombreuses conquêtes féminines, mais une jeune femme lui a résisté et l'a rendu follement amoureux et totalement désespéré: c'est cet épisode de la vie du séducteur vénitien que raconte Benoît Jacquot dans son nouveau film "Dernier amour", dans les salles ce mercredi. Vincent Lindon y tient le rôle principal.

SORTIE CINÉ – Tel est pris qui croyait prendre. Vincent Lindon joue un Casanova transformé en amoureux transi par une jeune femme qui le mène par le bout du nez dans le film de Benoît Jacquot Dernier amour, qui sort sur les écrans ce mercredi 20 mars.

Au soir de sa vie de séducteur compulsif, Giacomo Casanova (1725-1798), vieilli et fatigué, vit ses dernières années comme bibliothécaire dans le Château de Dux, en Bohème, où il subit les railleries des domestiques et s'ennuie. Il écrit ses mémoires et, un jour, raconte à une jeune visiteuse que, parmi ses conquêtes passées, il en est une qui a compté plus que les autres: "Chacune pour moi a été la première et la dernière. J'ai toujours été l'ami de toutes. Sauf une".

Il raconte alors cette passion survenue 30 ans plus tôt, quand il était dans la force de l'âge, à 38 ans. Banni par Venise, des prisons de laquelle il s'est évadé après y avoir été incarcéré pour libertinage, athéisme, occultisme, appartenance maçonnique et malversations financières, il voyage entre Paris, Genève, Vienne et Londres. C'est dans la capitale anglaise qu'il s'installe pour plusieurs mois et y assouvit son goût du plaisir et du jeu. Boulimique et chaud lapin, il avale les huîtres par douzaines et consomme les femmes sans modération.

Mais son attention est attirée par l'une d'elles, plus jeune, plus jolie, plus distante: Marianne de Charpillon (Stacy Martin). Il croise son regard un jour dans un parc puis dans une réception et, le soir, à une table de jeux. Ils se rencontrent chez son ami Castelbajac, dont elle est la maîtresse. C'est une jeune courtisane qui monnaye ses charmes le soir dans l'auberge de sa mère et dans les jardins des châteaux. "Je ne suis pas fréquentable", lui dit-elle avec malice.

Mais elle l'attire au point qu'il en oublie toutes les autres femmes. Il est prêt à tout pour arriver à ses fins, mais la jeune femme se dérobe toujours sous les prétextes les plus divers, et finit par lui lancer un défi: elle veut qu’il l’aime autant qu’il la désire…

C'est loin d'être le premier film sur Casanova, il y en a eu une bonne demi-douzaine dont ceux de Luigi Comencini (1969) et de Federico Fellini (1976). Ici Benoît Jacquot, l'un des représentants du cinéma d'auteur français, n'a pas réalisé un biopic mais a voulu raconter cette histoire précise, tirée des mémoires de Casanova, "parce que ce fut son premier et son dernier amour", dit-il. "Auparavant, il avait eu des amitiés, des complicités, peut-être aussi sans doute des relations amoureuses, mais pas d’amour-passion. La passion au sens étymologique, c’est le pathos, ce dont on souffre".

Le film, au rythme lent mais avec des rebondissements dans l'histoire et un suspense sentimental, est une fine analyse des rapports de passion, de domination amoureuse, de frustration entre un homme et une femme –l'un comme l'autres peu habitués à ce qu'on leur résiste. La réalisation est d'une grande fluidité et les dialogues épurés, simples et efficaces.

Corps de liane, visage diaphane, boucles brunes, voix d'adolescente: Benoît Jacquot a choisi pour le rôle féminin la jeune comédienne franco-britannique Stacy Martin, révélée en 2014 par le film Nymphomaniac de Lars von Trier et vue récemment dans le rôle de la jeune épouse de Godard dans Le Redoutable de Michel Hazanavicius. Elle parvient à rendre crédible ce personnage de fausse ingénue qui mène par le bout du nez le séducteur présumé le plus célèbre de tous les temps.

Quant à Vincent Lindon, on ne l'imaginait pas a priori comme l'interprète idéal de Casanova, avec ses perruques, ses bagues, ses costumes à jabot, ses chemises brodées, ses souliers à talons et ses mains baladeuses sous les jupes des femmes. Pour Benoît Jacquot lui-même, ce n'était pas non plus une évidence: "Au départ, je ne voyais pas Vincent en Casanova: parce qu’il est français, costaud, avec une image virile, populaire, donc a priori à l’opposé de Casanova. J’ai eu du retard à me rendre à l’évidence que ça fonctionnerait". Mais finalement c'est ici un Casanova qui montre sa faiblesse, son insatisfaction, sa tristesse au fond de ses yeux mouillés –et Vincent Lindon est parfait dans cette expression avec ses airs de chien battu.

Lire les critiques:

> L'apparition: Vincent Lindon sur la piste de la Vierge Marie

> Le Redoutable: Godard hargneux, drôle et amoureux

Conclusion de Benoît Jacquot: "Depuis le temps que je fais des films, je me suis rendu compte qu’on ne savait qu’en faisant. Et c’est en travaillant avec Vincent que je me suis rendu compte qu’il avait raison. Quand on lit le portrait de Casanova par son contemporain le Prince de Ligne, on dirait qu’il parle de Vincent Lindon".

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