"L'homme aux mille visages" : arnaque à l'espagnole (VIDÉO)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 16 mars 2017 - 19:38
Mis à jour le 12 avril 2017 - 15:37
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Eduard Fernandez Film L'homme Aux Mille Visages
Crédits
©Julio Vergne/Ad Vitam Distribution
Eduard Fernandez est l'acteur principal du film, dans le rôle du manipulateur Francisco Paesa.
©Julio Vergne/Ad Vitam Distribution
Un thriller politico-financier basé sur une histoire vraie: le film "L'homme aux mille visages", qui sort ce mercredi, raconte comment un ancien agent secret espagnol est à l'origine d'un scandale qui provoqua la chute du gouvernement de Felipe Gonzales dans les années 90.

Combines politiques, accords secrets, négociations et menaces, versement de grosses sommes et détournement de fonds publics, arnaques, fuites à l'étranger, exil clandestin, double jeu, scandale national: parfois il suffit de puiser dans la réalité pour réaliser un thriller politique passionnant. C'est le cas du film L'homme aux mille visages (ce mercredi 12 avril sur les écrans français), qui raconte l'un des plus gros scandales politico-financiers de l'Espagne dans les années 90.

Au centre de cette histoire riche en rebondissements: Francisco Paesa, dit Paco, ex-agent des services secrets espagnols. Dans les années 80, il fait le "sale boulot" pour le gouvernement espagnol: il vend des armes à l'ETA qui permettent, grâce à des capteurs, de localiser et d'arrêter des membres du groupe terroriste et de lui porter un coup fatal. Mais il n'est pas payé pour cela, et décide de se venger.

C'est une affaire de détournement d’argent, quelques années plus tard, qui va lui en donner l'occasion. Luis Roldan, membre du Parti socialiste espagnol au pouvoir et directeur de la Garde civile depuis 1986, a détourné des millions pour son compte personnel. Francisco Paesa va l'aider à s'enfuir et à s'installer clandestinement en exil en France, avant de joueur les intermédiaires occultes avec les autorités espagnoles. Un double jeu qui est, pour ce manipulateur hors pair, l'occasion de s'enrichir mais aussi de régler ses comptes…

"C'est une histoire vraie. Comme toute histoire vraie, elle comporte des mensonges", dit une voix off au début du film. Une partie du film est romancée, dont ce personnage, fictif, d'ami de Francisco Paesa qui raconte l'histoire en voix off. Mais la plupart des faits sont bien réels, ils sont à la base du scandale qui conduisit à l'arrestation et au procès de Luis Roldan puis à la défaite du Premier ministre socialiste Felipe Gonzalez –qui n'est pas ouvertement mentionné dans le film– aux législatives de 1996 après 14 ans de pouvoir.

"L’Homme aux mille visages est le seul de mes films tiré d’un fait réel. Et en même temps, c’est celui qui est le plus loin de la réalité", affirme le réalisateur, Alberto Rodriguez. "Pendant la phase de documentation du projet, nous nous sommes rendu compte qu’il était impossible d’atteindre une certaine vérité. Nous nous sommes sentis obligés de nous servir de la fiction. Pour moi, ce film est seulement une thèse sur ce qui s’est vraiment passé. C’est le plus artificiel de mes films, mais c’est voulu. Je voulais rappeler constamment au spectateur que ce qu’il est en train de voir, finalement, ce n’est qu’un film".

Alberto Rodriguez avait raflé 10 Goya (les César espagnols), dont celui de meilleur film, il y a deux ans avec son précédent film La isla minima, un passionnant thriller en Andalousie sur fond de climat politique post-franquiste. Cette année, L'homme aux mille visages a été nommé 11 fois aux Goya et a remporté deux récompenses: meilleure adaptation (le film est tiré du livre d'un journaliste) et meilleur espoir masculin pour Carlos Santos, qui interprète Luis Roldan.

Mais c'est l'acteur Eduard Fernández, dans le rôle du personnage principal Francisco Paesa, qui crève l'écran, fumant cigarette sur cigarette, cravates impeccables, calme et sûr de lui, le visage ne laissant jamais deviner la moindre émotion.

Le film est un peu compliqué à comprendre au début, on se perd dans les personnages et les différentes explications installant le scénario. Mais ensuite cela devient passionnant, même pour les spectateurs qui n'ont jamais entendu parler de ce scandale à l'espagnole des années 90.

De Madrid à Paris en passant par Genève, Singapour ou Bangkok, avec une précision chirurgicale dans le suspense, mélangeant fiction et extraits de journaux télévisés de l'époque, ce thriller politique est donc tout sauf un documentaire. "Mon objectif principal était de faire un film divertissant, ouvert à tous les publics. Mon deuxième but était qu’il ne ressemble pas du tout à un documentaire. Cela dit, c’est une fiction qui contient plus de vérité que l’on croit. Les choses les plus extraordinaires ont malheureusement eu lieu", explique le réalisateur, l'une des figures de proue du cinéma espagnol actuel.

(Voir ci-dessous la bande-annonce du film):

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