"Sur quel pied danser" : le monde en chanté de la lutte des classes (VIDEO)

Auteur(s)
Jean-Michel Comte
Publié le 01 juillet 2016 - 13:54
Mis à jour le 06 juillet 2016 - 16:10
Image
Pauline Etienne Film Sur Quel Pied Danser
Crédits
©Emmanuel Rioufol/Loin derrière l’Oural/Rezo Films
Julie (Pauline Etienne) a trouvé un CDI dans la chaussure.
©Emmanuel Rioufol/Loin derrière l’Oural/Rezo Films
Une "comédie musicale et sociale" made in France: c'est ainsi que se définit le film "Sur quel pied danser", qui sort ce mercredi et raconte, agrémentée de chansons, l'histoire d'un groupe d'ouvrières qui veulent sauver leur usine familiale de fabrication de chaussures.

Depuis Jacques Demy, le cinéma français tente parfois le pari de la comédie musicale, sans trop de succès. Deux jeunes réalisateurs s'y essayent une nouvelle fois, avec audace, dans leur premier long métrage, Sur quel pied danser, qui sort ce mercredi 6 sur les écrans.

Le film se présente comme une "comédie musicale et sociale". Julie (Pauline Etienne), qui va de CDD en petits boulots et de stages en inscriptions à Pôle emploi, pense décrocher enfin un CDI. Elle est à l'essai comme magasinière dans une fabrique d’escarpins de luxe, à Romans-sur-Isère, et a bon espoir d'être embauchée pour de bon.

Mais c'est au moment où elle débarque dans cette entreprise familiale dirigée par le fils du fondateur (François Morel) que la direction parisienne envisage une "modernisation" de l'usine. En clair, un plan social et une délocalisation à l'étranger.

La dizaine d'ouvrières de l'usine décident donc de se mettre en grève, d'occuper l'usine, d'alerter la presse. Julie se retrouve coincée entre le désir de se joindre à elles et la nécessité de faire profil bas car elle est encore en période d'essai. Elle ne sait plus sur quel pied danser -et quand Samy, un jeune camionneur aussi roublard que charmeur, vient prêter main-forte aux ouvrières, ce n’est déjà plus la même chanson…

Une demi-douzaine de chansons ont été écrites pour le film (notamment par Jeanne Cherhal, Olivia Ruiz, Albin de la Simone, Agnès Bihl, Clarika) et, entre deux chansons qu'interprètent les acteurs et actrices sur des chorégraphies, le film est joué de manière traditionnelle. Si on se laisse gagner par le genre et qu'on entre dans le film, c'est plutôt agréable et réussi, avec pas mal de poésie entre deux scènes ou chansons de lutte des classes.

Les ouvrières ont été choisies parmi des danseuses professionnelles (car il est plus difficile de bien danser que de bien chanter en playback, apparemment), et l'actrice principale, pratiquement de toutes les scènes, s'en tire fort bien. C'est la jeune actrice belge Pauline Etienne, remarquée en 2013 dans La religieuse, de Guillaume Nicloux, et récemment dans la saison-2 de la série télé Le bureau des légendes sur Canal+.

Pas sûr cependant que les spectateurs, en ces temps de chômage, mondialisation, délocalisation et manifestations sur la loi Travail aient envie d'aller se changer les idées en allant voir une comédie musicale en plein dans cette réalité sociale… Courageusement, les deux réalisateurs, Paul Calori et Kostia Testut, ont pris le risque, avec le parti pris d'adopter un ton léger, gai, optimiste, pas trop syndicaliste. "Les délocalisations sont souvent des drames pour tous les acteurs concernés, et il ne faut pas interpréter le ton fantaisiste du film comme une désinvolture de notre part. Nous ne sommes pas là pour donner des solutions, mais pour raconter une histoire particulière avec des personnages particuliers", disent-ils.

"Pour l’anecdote, nous-mêmes, dans le parcours du film, avons été confrontés à la tentation grandissante de délocalisation, notamment avec les crédits d’impôts dans des pays frontaliers qui incitent à délocaliser les tournages, l’enregistrement des musiques avec des orchestres moins chers en Europe de l’Est, la fourniture du matériel de déco dans des pays à bas coût... Le film est made in France, développé, tourné et post-produit en France. Même les boîtes à chaussures ont été fabriquées directement sur place à Romans, pour des raisons de qualité qui primaient sur la recherche du prix le plus bas", ajoutent-ils.

C'est pourquoi leur film, même imparfait et dont le scénario tiendrait sur une étiquette de chaussures, est digne d'intérêt voire de bienveillance. Et finalement pas plus mal que les quelques tentatives de comédies musicales made in France de ces dernières années, comme On connaît la chanson (1997) et Pas sur la bouche (2003) d'Alain Resnais, Jeanne et le garçon formidable (1998) d'Olivier Ducastel et Jacques Martineau, 8 Femmes (2002) de François Ozon, Les chansons d'amour (2007) et Les bien-aimés (2011) de Christophe Honoré, ou Toi, moi, les autres (2011) d'Audrey Estrougo.

(Voir ci-dessous la bande-annonce du film):

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