Fukushima : ouverture du premier procès d'ex-dirigeants de Tepco

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Par AFP
Publié le 30 juin 2017 - 09:17
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Manifestation devant le tribunal au premier jour du procès de trois ex-dirigeants de Tepco, compagni
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© Toru YAMANAKA / AFP
Manifestation devant le tribunal au premier jour du procès de trois ex-dirigeants de Tepco, compagnie exploitante de la centrale de Fukushima, le 30 juin 2017 à Tokyo
© Toru YAMANAKA / AFP

Trois ex-dirigeants de la compagnie exploitante de la centrale de Fukushima saccagée en 2011 par un gigantesque tsunami ont plaidé non coupables vendredi à l'ouverture du premier procès pénal lié à cette catastrophe.

Celui qui présidait le conseil d'administration du groupe Tokyo Electric Power (Tepco) au moment du drame, Tsunehisa Katsumata (77 ans), ainsi que deux ex-vice-PDG, Sakae Muto (66 ans) et Ichiro Takekuro (71 ans), sont jugés pour "négligence ayant entraîné la mort".

Plus de six ans se sont écoulés depuis le pire accident nucléaire après celui de la centrale soviétique Tchernobyl (Ukraine) en 1986, un drame qualifié par une commission d'enquête de "désastre créé par l'homme".

Il est reproché aux trois hommes l'absence de dispositions supplémentaires face au risque d'un raz-de-marée dépassant les standards de construction initiaux de la centrale.

"Je présente mes excuses pour les énormes soucis causés aux résidents de la région et à travers le pays", a déclaré M. Katsumata devant les magistrats, tout en réfutant toute responsabilité pénale. "Il était impossible de prévoir l'accident", a-t-il plaidé.

M. Takekuro, qui supervisait les opérations nucléaires, a tenu des propos similaires, et Sakae Muto a renchéri "quand je me souviens de ce moment-là, je pense toujours qu'un accident comme celui-ci n'était pas prévisible".

Dans une déclaration préliminaire, le procureur a indiqué qu'il entendait démontrer que le risque de tsunami était pourtant connu mais que les dispositions nécessaires n'ont pas été prises. Et de présenter devant la cour 230 documents selon lui probants, dont des courriels échangés entre deux des accusés et des spécialistes suggérant des craintes grandissantes et la nécessité de prendre des mesures anti-tsunami.

- 'Perdu une vie normale' -

Les trois accusés étaient en outre, selon le procureur, "présents lors de réunions de sécurité" où les experts ont présenté des simulations faisant état de la possibilité d'un tsunami atteignant 15,7 mètres près de la centrale, zone où celui du 11 mars 2011 a été de 14 mètres.

Une étude interne à Tepco datant de 2008, révélée ultérieurement, évoquait cette hypothèse d'un raz-de-marée dépassant de loin la hauteur prise en compte pour construire la centrale, "mais la diffusion de ce rapport s'est arrêtée à la direction de la division nucléaire et il n'est pas remonté jusqu'à moi", a assuré par le passé M. Katsumata

"Si ces trois dirigeants avaient assumé pleinement leur devoir en matière de sécurité, l'accident ne se serait jamais produit", a asséné le procureur.

Ces mots sont proches de ceux de la meneuse des plaignants, Ruiko Muto, résidente de la préfecture de Fukushima, présidente de l'association à l'origine des poursuites. Avec elle, une centaine de personnes étaient présentes tôt vendredi matin devant le tribunal.

"Qui est fautif, quel enchaînement de faits ont conduit à cet accident, on ne sait toujours pas", a-t-elle a déclaré à l'AFP.

Les opérations d'évacuation conduites dans l'urgence, sans préparation, ont causé le décès de 44 personnes de l'hôpital de Futaba, à quelques kilomètres du site. Treize autres personnes (des militaires et personnels de Tepco) ont été blessées. C'est sur ces éléments que s'appuie essentiellement la plainte.

Mais "au-delà, la vie de nombreuses personnes a été bouleversée, et je veux que les prévenus prennent conscience de leur colère et chagrin", a insisté Mme Muto, qui porte le même nom qu'un des prévenus sans qu'il y ait de lien de parenté.

"Ce que j'ai perdu le 11 mars 2011, c'est une vie normale. Moi, qui ignorais tout du danger des réacteurs nucléaires, en suis à ma septième année d'évacuation", a témoigné pour l'AFP une autre victime patientant devant le tribunal, Yoshiko Furukawa, qui habitait près de la centrale.

"Assurément, les trois personnes visées ne sont pas les seules responsables, mais il est extrêmement important qu'elles aient à répondre sur le rôle qu'elles ont joué", a réagi Hisayo Takada, de Greenpeace Japon, cité dans un communiqué.

Les autorités, elles, insistent sur le fait qu'aucun mort n'est directement dû aux radiations dégagées par les trois réacteurs entrés en fusion à la centrale Fukushima Daiichi. Mais elles reconnaissent officiellement des "décès liés" aux évacuations qui s'en sont suivies

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