Interdire le ring aux enfants ? en Thaïlande, la mort d'un jeune boxeur relance le débat

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Par Anusak KONGLANG et Sippachai KUNNUWONG - Bangkok (AFP)
Publié le 15 novembre 2018 - 09:24
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Un homme en prières devant un portrait du jeune boxeur thaïlandais Anucha Tasako mort durant un combat, lors de ses funérailles dans un temple bouddhiste de la province de Samut Prakan le 14 novembre
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© Romeo GACAD / AFP
Un homme en prières devant un portrait du jeune boxeur thaïlandais Anucha Tasako mort durant un combat, lors de ses funérailles dans un temple bouddhiste de la province de Samut Pr
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Interdire le ring aux moins de douze ans? En Thaïlande, des dizaines de milliers d'enfants qui rêvent de gloire et de fortune participent à des combats de boxe thaï mais le récent décès d'un adolescent relance la polémique.

Anucha Tasako, 13 ans, est mort le 10 novembre d'une hémorragie cérébrale après avoir reçu plusieurs coups à la tête lors d'un combat près de Bangkok.

Plus de 10.000 enfants boxeurs de moins de quinze ans sont enregistrés dans le royaume, d'après l'Autorité des sports de Thaïlande. A cela, s'ajoutent de nombreux mineurs qui combattent sans licence.

Le Muay Thaï, art martial séculaire dans le royaume, autorise coups de poings, de pieds, de coudes et de genoux.

La pratique de ce sport violent est jugée dangereuse chez les enfants par les professionnels de santé, qui mettent notamment en avant des risques de lésions cérébrales.

Adisak Plitponkarnpim, directeur du Centre de recherche sur la promotion de la sécurité des enfants et la prévention des blessures (CSIP), a mené une étude pendant cinq ans sur 335 jeunes boxeurs et 252 enfants qui ne pratiquaient pas ce sport.

- "Lésions cérébrales" -

Les IRM ont révélé que les premiers "souffrent davantage de lésions cérébrales causées par la disparition de cellules ou des troubles neurotiques", relève le responsable, interrogé par l'AFP. Il a également constaté "des quotients intellectuels diminués".

Leur jeune âge "accentue encore les risques de lésions car leur crâne et leurs muscles ne sont pas encore entièrement formés", souligne-t-il, mettant en avant des risques plus élevés d'être atteint de la maladie de Parkinson ou d'un Alzheimer à l'âge adulte.

Le problème vient du manque de protection lors des combats, où les enfants ne portent souvent pas de casque, comme dans le cas d'Anucha Tasako.

Les combattants doivent être dotés d'"un équipement de protection approprié fourni par le responsable de la salle", a relevé après l'accident mortel le numéro deux de la junte thaïlandaise, le ministre de la Défense Prawit Wongsuwan, d'après un porte-parole du ministère.

Mais, en cas de manquement, aucune sanction n'est prévue à ce jour.

Les autorités tentent néanmoins de légiférer.

Un projet de loi à l'étude vise à interdire les combats aux enfants de moins de 12 ans.

Des personnalités de la boxe thaï s'opposent à cette interdiction qui pourrait affecter financièrement les familles des jeunes boxeurs, souvent pauvres.

Pour beaucoup, le Muay Thaï est un moyen de sortir de la pauvreté. "Cela donne aux enfants une raison d'être, leur enseigne la discipline" et "les protège dans des endroits où la toxicomanie et la violence des gangs sont monnaie courante", confirme un propriétaire de gymnase, sous couvert d'anonymat.

D'autres insistent sur le fait que pour aspirer à devenir champion, il faut commencer très jeune.

A douze ans, Tawee Umpornmaha, médaille d'argent aux JO de Los Angeles de 1984, effectuait son premier combat.

Au total "99% des boxeurs thaïlandais les plus célèbres, qui ont remporté des médailles aux Jeux olympiques, ont commencé à se battre quand ils étaient jeunes", souligne l'ex-sportif, aujourd'hui âgé de 59 ans.

"Si les lois interdisent totalement la boxe aux enfants, la Thaïlande n'aura plus de maîtres. Ce sera la fin", a insisté l'entraîneur d'Anucha Tasako, Somsak Deerujijaroen, lors des funérailles de l'adolescent. Selon lui, travailler à une meilleure protection des jeunes sur le ring serait beaucoup plus pertinent.

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