Meurtre de Mireille Knoll : la cour décortique le parcours des accusés

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Par Marie DHUMIERES - Paris (AFP)
Publié le 26 octobre 2021 - 21:16
Mis à jour le 27 octobre 2021 - 00:50
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Une addiction à l'alcool pour l'un, au crack pour l'autre, des enfances compliquées et un chapelet de condamnations... La cour d'assises de Paris s'est penchée mardi sur le profil des deux accusés du meurtre à caractère antisémite de Mireille Knoll, une vieille dame juive tuée chez elle de 11 coups de couteaux.

A l'ouverture du procès dans la matinée, le président Franck Zientara a rappelé les faits: en mars 2018, les pompiers, appelés pour un incendie, avaient découvert dans le modeste appartement parisien de Mireille Knoll son corps partiellement carbonisé.

La femme de 85 ans, atteinte de la maladie de Parkinson et qui ne pouvait se déplacer seule, avait été frappée de 11 coups de couteaux.

Dans le box des accusés, Yacine Mihoub, 31 ans, et Alex Carrimbacus, 25 ans, écoutent sans ciller. Tous deux se rejettent la responsabilité du crime, qui avait provoqué indignation et émoi en France et à l'étranger.

"Des monstres", a dit d'eux Daniel Knoll, l'un des fils de la vieille dame, avant d'entrer dans la petite salle d'audience. Pendant le rappel des faits, le petit-fils de la victime n'a pas lâché les accusés de son regard furieux.

La cour s'est ensuite intéressée à la personnalité de ceux que l'enquête a décrit comme "menteurs" et "manipulateurs".

- "A fleur de peau" -

"J'affabule parfois, pour me valoriser, mais je ne mens pas", corrige Yacine Mihoub, qui passe en premier.

L'homme de 31 ans, petites lunettes, gilet noir sur chemise blanche, connaissait Mireille Knoll, voisine de sa mère, depuis l'enfance. Il faisait des courses au marché pour elle en échange d'argent de poche. Elle était devenue une sorte de "grand-mère de substitution", avait-il expliqué.

"Une relation de confidents, elle m'a beaucoup aidé sur beaucoup de choses", dit Yacine Mihoub aujourd'hui. Les parties civiles s'exaspèrent. A un moment de tension, le petit fils de Mireille Knoll lui fait signe qu'il le garde à l’œil.

Yacine Mihoub, qui "parle bien", note un avocat, revient aussi sur son enfance, "heureuse" avec sa mère, ses frère et sœurs.

Tout change à 12 ans, quand il est victime d'un viol par ses camarades de chambre à l'internat. "J'en voulais à tout le monde".

Il décrit ensuite sa plongée dans l'alcool, les "crises", les clefs de l'appartement que sa mère refuse de lui donner: "je volais de l'argent pour m'acheter de l'alcool et des drogues".

Pouvait-il avoir l'alcool mauvais ?, demande le président. "En famille", uniquement assure-t-il. "Irritable, à fleur de peau, mais dangereux, non".

"Il nous pourrissait la vie", avait dit sa mère avant lui. Elle est accusée d'avoir nettoyé le couteau du crime et comparaît, libre, aux côtés des deux hommes.

Le président fait ensuite la longue liste de ses condamnations. Des vols, violences, agressions sexuelles, menaces de mort... Yacine Mihoub argumente, explique, reconnaît a minima. Notamment un nombre considérable de fausses alertes à la bombe, dont une dans un centre de réinsertion qui l'avait renvoyé.

"Pourquoi vous avez fait ça ?", demande le président. "Pour les faire chier".

- Chamailleries" -

Quand vient le tour d'Alex Carrimbus l'audience est moins tendue, d'ailleurs les parties civiles n'ont aucune question pour lui.

Le jeune homme qui présente bien en chemise bleue claire et coiffure sage, revient sur son enfance dans un climat "particulièrement instable", sans père, violenté par son beau-père. Il est placé à l'âge de 8 ans, sa mère trouvant que ses crises de violence "incontrôlables" mettent sa demi-soeur en danger.

Il écumera les foyers et les ennuis - des "chamailleries" entre jeunes qu'il minimise. Le président énumère lui les "coups de boule", "Allah Akbar" crié dans un bus, les "menaces au couteau".

"Beaucoup d'armes blanches quand même", note le président. Comme son co-accusé, Alex Carrimbacus justifie et minimise, d'un ton plus scolaire de son côté. "J'étais jeune", répète celui qui vivra un moment à la rue et dépensait "96 euros" en crack par jour.

Pour vivre, il vole et a été de nombreuses fois condamné. "Il est d'une agilité hors pair" à l'escalade, avaient noté des policiers. "C'est ça", "oui" confirme souvent Alex Carrimbacus, moins volubile que son voisin.

Il fera plusieurs séjours en hôpital psychiatrique. La défense de Yacine Mihoub lui demande combien. Alex Carrimbacus hésite. "4 ou 5 je pense". "25", reprend Me Charles Consigny, qui les a comptés.

"J'ai bien rencontré des médecins qui m'ont confirmé que je n'étais pas fou", assurera-t-il à la cour. "J'ai fait beaucoup d'efforts".

Alex Carrimbacus a fait plusieurs tentatives de suicide, dont certaines depuis qu'il est en prison. Il s'y est aussi scarifié, note le président. Il confirme. Sur sa jambe, il a gravé "innocent".

L'audience reprend mercredi à 9H30 avec les auditions d'enquêteurs.

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