Mort de Rémi Fraisse : l'Etat condamné à indemniser la famille

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Par AFP - Toulouse
Publié le 25 novembre 2021 - 14:48
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Rassemblement à la mémoire du militant écologiste Rémi Fraisse, le 1er novembre 2014 à Toulouse
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© REMY GABALDA / AFP/Archives
Rassemblement à la mémoire du militant écologiste Rémi Fraisse, le 1er novembre 2014 à Toulouse
© REMY GABALDA / AFP/Archives

Après des années de procédure, la famille de Rémi Fraisse, manifestant écologiste de 21 ans tué lors d'une intervention des gendarmes mobiles dans le Tarn en 2014, a obtenu qu'une responsabilité de l'Etat soit admise par la justice administrative.

"C'est la reconnaissance d'une responsabilité a minima", a réagi Claire Dujardin, avocate de la famille Fraisse, qui avait été déboutée au pénal, la dernière fois par la Cour de cassation en mars dernier.

Le tribunal administratif de Toulouse a reconnu "la responsabilité sans faute de l'Etat pour le décès de Rémi Fraisse dans les suites de l'intervention des forces de l'ordre, à l'occasion des manifestations sur le site du projet de barrage de Sivens, et indemnise les ayants droit de la victime de leur préjudice moral à hauteur d'un montant total de 46.400 euros", selon un communiqué publié jeudi.

"C'est une victoire importante, une étape nécessaire dans le combat de la famille de Rémi qui n'a eu de cesse de demander vérité et justice. Pour la première fois, l'Etat est condamné dans le cadre d’une opération de maintien de l'ordre menée par les gendarmes ayant entrainé la mort d'une personne", a ajouté Me Dujardin.

- Etat "civilement responsable" -

Les parents de Rémi Fraisse ont aussi porté l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'homme et espèrent que la France sera condamnée.

Le 26 octobre 2014, le botaniste avait été tué par l'explosion d'une grenade offensive de type OF-F1, lancée par un gendarme mobile, lors de violents affrontements sur le chantier de la retenue d'eau controversée de Sivens.

Quelques jours après sa mort, le gouvernement avait suspendu l'utilisation de ces grenades par les forces de l'ordre, avant de les interdire définitivement plusieurs mois plus tard.

Le tribunal administratif "a admis la responsabilité sans faute de l'Etat" en s'appuyant sur l'article L. 211-10 du code de la sécurité intérieure, selon son communiqué.

Cet article prévoit que l'État "est civilement responsable des dégâts et dommages résultant des crimes et délits commis, à force ouverte ou par violence, par des attroupements ou rassemblements armés ou non armés, soit contre les personnes, soit contre les biens".

Le tribunal a aussi "retenu une imprudence fautive commise par la victime de nature à exonérer partiellement l'État de sa responsabilité".

- Justice européenne -

"Derrière cette condamnation se cache cependant une dénégation criante de la réalité", dénonce l’avocate de la famille, estimant "indécent" que la juridiction administrative ait ainsi retenu "la faute commise par la victime pour exonérer l'Etat de sa responsabilité à hauteur de 20%".

L'avocate regrette également que le tribunal ait refusé de condamner l'Etat pour l'utilisation d'une grenade offensive: "Cette arme était extrêmement dangereuse et il est inexcusable qu'elle ait pu être utilisée contre des civils alors même que la grenade a été retirée après cette affaire".

Le tribunal a aussi rejeté une éventuelle faute de l'Etat concernant le tir, "hors de tout cadre règlementaire, selon l'avocate, la grenade avait été tirée dans le noir et dans une zone où il y avait des mouvements de personnes".

Pour Arié Alimi, avocat du père du jeune militant écologiste, "les justices pénale et administrative ne veulent pas reconnaître la faute de l'Etat et du gendarme. Dès lors, la Cour européenne des droits de l'homme, qui est déjà saisie, tranchera cette affaire".

Le gendarme auteur du tir de grenade n'a pas été mis en examen. En 2018, il a bénéficié d'un non lieu, confirmé par la cour d'appel de Toulouse en 2020, puis par la cour de cassation en mars 2021.

"La famille continuera donc à se battre pour l’honneur de Rémi et pour toutes les victimes de la violence d’État" a conclu Me Dujardin.

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