Chronique N°77 – « Le virus respiratoire syncytial s’est invité en pleine pandémie covid-19 : faut-il lutter avec les mêmes armes ? »

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François Pesty, pour FranceSoir
Publié le 11 novembre 2021 - 14:34
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Peut-on combattre tous les virus de la même manière ?
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CHRONIQUE — Le 28 octobre 2021, France Info parlait du virus respiratoire syncytial (VRS), responsable de la bronchiolite chez les jeunes enfants. Cela changeait un peu du covid-19.

Après un court jingle, puis une voix féminine « France Info », Edouard Marguier : « Nous sommes désormais concernés par l’épidémie de bronchiolite et il y en a encore pour trois semaines. Reportage dans un hôpital près de Lyon. Il est 17 h 20. Edouard Marguier : « Prenez des précautions si vous avez un bébé dans votre entourage. L’épidémie de bronchiolite touche l’ensemble de la France. Onze régions sur treize sont en vigilance rouge. À Lyon, les Hospices Civils alertent sur le nombre de cas. Plus 56 % par rapport à l’an dernier. Reportage dans un hôpital de la périphérie lyonnaise. Cyrille Ardaud, après les pleurs d’un nourrisson : « Sur les 31 lits de réanimation que compte l’hôpital femmes-mères-enfants de Bron, un tiers est occupé par des cas de bronchiolite. Alors, à chaque consultation ou presque, avec des nourrissons, les médecins font un peu de prévention ». Un père : « Le médecin nous en a parlé comme quoi, en ce moment, tous les petits avaient un petit souci là-dessus ». Cyrille Ardaud : « Lorenzo, papa de Zélio, 5 mois et demi, est désormais capable de reconnaître d’éventuels symptômes d’une bronchiolite. Lorenzo : « Tout ce qui est la respiration, il y a des signes qui peuvent faire que je l’emmènerai plus rapidement au médecin ou à l’hôpital. La toux. Même du mal à respirer, une gêne, je pense. On le reconnait quand notre fils, ça va pas quoi ». Cyrille Ardaud : « Autre signe, qui doit alerter les parents, si le nourrisson mange moins ou s’essouffle lorsqu’il prend le biberon. Mais, la première chose à faire, reste de protéger son enfant pour éviter qu’il tombe malade et appliquer les gestes barrières. Le Professeur Etienne Javouhey est le chef adjoint du service d’urgences pédiatriques aux hôpitaux de Lyon : « On a appris avec le covid à se protéger avec des mesures de distanciations. Il est très important d’utiliser les mêmes techniques, et notamment, les parents s’ils sont enrhumés, porter un masque [1], se laver les mains avant et après s’être occupé de l’enfant ». Cyrille Ardaud : « Les bronchiolites touchent généralement les enfants de moins de six mois. Et, le risque d’être admis en réanimation, est le plus élevé avant six semaines. Si cette épidémie revient tous les ans. Cette année, elle a un mois d’avance, et c’est bien ce qui inquiète les médecins. Pr Etienne Javouhey : « Nos plans de préparation pour les épidémies comme ça, sont prévus pour fin novembre, décembre, janvier. Et, cette année, eh bien en fait, on en n’aurait besoin maintenant. D’augmenter le nombre de lits, donc de recruter des infirmières et actuellement, nous avons de grandes difficultés pour faire cela, et pour absorber l’ensemble des cas qui se présentent aux urgences ». Cyrille Ardaud : « Si cette épidémie arrive si tôt cette année, c’est parce que nos systèmes immunitaires ont moins été exposés l’an passé au virus responsable de la bronchiolite, à cause du covid-19. On est donc moins résistant selon le Professeur Etienne Javouhey, qui, en cas de symptômes, appelle les parents à d’abord consulter le pédiatre avant d’emmener l’enfant aux urgences ».

Juste par curiosité, penchons-nous sur les éventuels conflits d'intérêts du Pr Etienne Javouhey avec les firmes de la santé. Ce n'est pas anodin :

Edouard Marguier : « Reportage à Bron, près de Lyon, signé Cyrille Ardaud ».

[1] Ok pour le lavage des mains. Mais, désolé, il n’a pas été démontré, bien au contraire, que le masque permette de réduire les contaminations par les virus respiratoires, que ce soit le covid, la grippe ou les VRS… Comment peut-on être aussi ignorant ? Même pas capable d’avoir consulté la 4ᵉ actualisation de la revue méthodique avec méta-analyses de la collaboration Cochrane, revue par les pairs et publiée en novembre 2020 (ici).

Ma requête (ici) dans PubMed « (("respiratory syncytial virus"[Title/Abstract]) AND (masks versus no masks[Title/Abstract])) AND (randomized clinical trial[Title/Abstract]) », n’a donné aucun résultat !

Il n’y aurait donc aucune étude clinique randomisée portant sur l’efficacité des masques contre le VRS dans la base de données PubMed.

Avec Google, et à peu de chose près les mêmes mots clés, je tombe néanmoins sur un court et récent éditorial publié en juillet 2020 dans la revue de la société américaine des maladies infectieuses pédiatriques (ici). Sa lecture est très instructive.

 

James D. Cherry rappelle que les études conduites il y a des décennies sur des professionnels de santé avec le virus respiratoire syncytial (VRS) suggéraient que les masques ne permettaient pas d’éviter des infections par le VRS chez ces professionnels. L’auteur cite une première étude réalisée chez 58 professionnels de santé dans un hôpital pédiatrique de Denver, Colorado, et publiée dans la prestigieuse revue « Journal of Pediatrics » en novembre 1981 (ici). Le tableau suivant montre que le port de gants et de masques par les soignants en plus du lavage des mains, ne fait pas mieux que le seul lavage des mains !

Faut-il rappeler ici que pour que les différences observées soient statistiquement significatives, il est nécessaire que la valeur du « p » soit inférieure à 0,05.

L’auteur poursuit dans son éditorial sur le fait qu’à l’époque, ses collègues de l’université de Los Angeles, Californie, et lui-même, ainsi que d’autres pédiatres, chercheurs de l’université de Rochester, avaient conscience que la surface des conjonctives [2] pouvait constituer un site important de contamination par le VRS.

[2] membranes muqueuses qui tapissent l’intérieur des paupières.

Il commence par citer un travail mené à Rochester par l’équipe de Caroline B. Hall publiée en septembre 1981 dans la revue « Infection and Immunity » (ici). Ces chercheurs ont inoculé le VRS à 32 adultes volontaires. Chez les volontaires ayant reçu l’inoculum le plus concentré par voie nasale ou oculaire, trois sur quatre (75 %) ont été infectés, alors que seul un sur huit l’a été après inoculation buccale et probablement à la suite d’une contamination ultérieure…

Puis, l’auteur s’appuie sur une étude réalisée quelques années plus tard par la même équipe et dont les résultats ont été publiés dans le JAMA en 1986. Abstract (résumé) accessible (ici). À ma demande, l’auteur m’a adressé l’article complet.

Traduction du résumé avec l’aide de DeepL : « Nous avons évalué une lunette de protection (nez et yeux) pour déterminer son utilité dans la réduction de l'infection nosocomiale par le VRS chez les patients et les membres du personnel de notre service clinique pour enfants. Lors d'une épidémie communautaire de VRS en 1984, l'infection a été évaluée par des cultures virales de routine bihebdomadaires sur tout le personnel du service et les patients, ainsi que par séroconversion chez le personnel. Pendant trois semaines, les membres du personnel ont porté les lunettes. Deux adultes (5 %) et un enfant (6 %) ont contracté une infection nosocomiale. Au cours de la période d'étude suivante de trois semaines, les lunettes de protection n'ont pas été utilisées et 34 % du personnel et 43 % des enfants sensibles ont été infectés. L'utilisation des lunettes de protection jetables a été associée à une diminution significative des infections nosocomiales par le VRS (P<0,003 pour le personnel et P<0,05 pour les nourrissons en contact) ».

Il y a juste un problème méthodologique important pouvant représenter un biais majeur de sélection pour cette étude. Elle n’a pas été randomisée. Elle a été réalisée sur deux périodes successives, chacune de trois semaines. Mais, rien ne permet d’écarter l’hypothèse selon laquelle, par exemple, le virus (VRS) aurait circulé beaucoup plus lors de la seconde semaine pendant laquelle les soignants et les enfants ne portaient pas les lunettes de protection. Par ailleurs, les effectifs sont tout de même très réduits. Un seul service clinique. Le résumé mentionne les nombres de personnes infectés et le pourcentage lors de la première période de trois semaines, mais pas pour la seconde. Pour avoir 5 % des adultes infectés avec deux cas, cela signifie que 40 soignants adultes ont été inclus dans l’étude. Et, pour avoir 6 % d’infectés avec un seul enfant, il a fallu en inclure 17…

Il y a un second problème de taille. Les lunettes de protection nez et yeux utilisées dans cette étude sont de conception radicalement différente des masques portés en France et partout dans le monde. Cette photo d’un soignant qui les porte, extraite de la publication du JAMA en est la démonstration :

« Membre du personnel portant des lunettes de protection en plastique jetables. Les lunettes sont ventilées, maintenues en place par un élastique, et peuvent être utilisées par-dessus des lunettes de vue ».

Bref, il aurait été plus utile de mener cette étude de manière multicentrique, disons par exemple sur cinq services pédiatriques dans le même État américain (étude « en grappe »), en randomisant chaque soignant et chaque enfant, avec un suivi identique sur six semaines. Ce n’est pas ce qui a été fait. Dommage…

À propos de la taille des virus respiratoires :

Rhinovirus : 30 nm (ici)

Adénovirus humain : 60-90 nm (ici)

Covid-19 : 60-140 nm / Diamètre moyen 67 nm (ici)

Grippe A : 80-120 nm (ici)

Rougeole : 120-250 nm (ici)

Virus Para-influenza humain (HPIV) : 150-300 nm (ici)

Virus Respiratoire Syncytial VRS : 150-400 nm / Diamètre moyen 120-300 nm (ici)

Métapneumovirus humain (MPVh) 150-600 nm (ici)

Il faut se souvenir que les masques chirurgicaux, ou en tissus lavables, de catégorie 1, ne sont pas testés selon les normes AFNOR qui les régissent, sur des virus respiratoires, mais pour les premiers sur des aérosols de staphylocoques dorés de diamètre compris entre 800 nm à 1 200 nm (1,2 μm), ou sur des aérosols de chlorure de sodium (sel) de 3 μm (3 000 nm), et que la norme française tolère une fuite au travers du matériau constituant le masque jusqu’à 5 %.

Ainsi, le SARS-CoV-2 est 17 à 27 fois plus petit que le staphylocoque doré, et 50 fois plus petit que les particules chlorure de sodium. Si la norme AFNOR peut laisser passer au travers des matériaux dans lesquels les masques sont fabriqués 5 % de staphylocoques dorés ou de particules de chlorure de sodium, comment voulez-vous qu’ils ne laissent pas passer davantage de particules 17, 27 ou 50 fois plus petites ?

S’agissant du virus respiratoire syncytial, bien que légèrement plus volumineux que celui de la grippe ou que le SARS-CoV-2, son diamètre moyen est quand même 3 à 10 fois plus petit que le staphylocoque doré, et 10 à 25 fois plus petit que les particules de chlorure de sodium…

Surtout, je n’ai retrouvé aucune étude randomisée comparant le port du masque à l'absence de port du masque en période d’épidémie à virus respiratoire syncytial, alors que, et je le rappelais plus haut, nous disposons de dix études cliniques randomisées bien conduites, dont une danoise, menée en période pandémique covid-19 (ici), et négative, dont j’ai parlé dans ma chronique N°49 (ici), et neuf autres études menées lors d’épidémie de grippe H1N1 ou de syndromes grippaux, ayant fait l’objet de cette revue méthodique avec méta-analyses de la Collaboration Cochrane, constituée d’experts médicaux internationaux et indépendants des firmes de la santé.

Il est également intéressant, à partir des données du réseau Sentinelles de médecins généralistes et de pédiatres, d’analyser la répartition des virus respiratoires ayant circulé en ville ces sept dernières semaines, identifiés chez des patients vus en consultation pour une infection respiratoire aiguë chez lesquels des prélèvements ont été effectués. (Source : bulletins hebdomadaires téléchargeables : ici)

Nous savons bien que nous sommes dans un pays totalement « hospitalo-centré », et l’hôpital a beau être un haut-lieu des infections nosocomiales au nouveau coronavirus, les données de la ville montrent bien que ce n’est pas le SARS-CoV-2 qui y circule le plus, mais les rhinovirus, le virus respiratoire syncytial et le métapneumovirus humain :

Pour conclure, cette croyance irréductible en l’efficacité des masques, qui ne repose sur aucune donnée scientifique robuste, a malheureusement la vie dure. Qu’il s’agisse du covid-19, du virus de la grippe, ou du virus respiratoire syncytial, l’absence généralisée d’esprit critique et scientifique n’aide pas. D’ailleurs, la médecine a été vidée de son âme scientifique, comme de la place de choix qu’elle avait faite au patient, par Emmanuel Macron, fossoyeur de la médecine moderne, remplacée par ce stupide principe de précaution…

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