Libération s'enferme dans la doxa du Covid


TRIBUNE - Le 6 avril dernier, Libération a publié deux longs articles (article 1, article 2) du journaliste Luc Peillon prétendant nier toutes les explications de mon livre “Covid-19 : ce que révèlent les chiffres officiels”. Selon Libé, mon livre serait un “grand théâtre covido-sceptique”. Ce n’est pas la première fois que Luc Peillon écrit des articles diffamants à mon égard. À chaque fois, il propose un travail bâclé qui s’épuise à réfuter en bloc tout ce que je dis jusqu’à l’absurde. Sur deux articles, un seul élément pertinent a été apporté et il n’est pas de Luc Peillon.
Dénigrement ridicule
Les chapeaux des deux textes de Luc Peillon sont assez savoureux. Mon préféré est le deuxième : “Avec des vidéos remettant en cause la réalité de la pandémie, l’autoproclamé statisticien malmène les chiffres et les concepts scientifiques. 'CheckNews' continue l’analyse de son ouvrage truffé de théories toujours aussi douteuses, 'Covid-19 : ce que révèlent les chiffres officiels'”.
Le ton est donné. Je suis donc un autoproclamé statisticien. Vous noterez que je manque sérieusement d’ambition. Quitte à s’autoproclamer quelque chose, pourquoi choisir statisticien ? Ce n’est pas un titre ou un diplôme. Il n’y a pas la moindre raison de s’autoproclamer statisticien. En plus il suffit de quelques secondes pour consulter mon CV qui est disponible sur Linkedin et vérifier que ma signature apparaît bien sur toutes les publications de l’Insee auxquelles j’ai participé.
Cela n’a donc pas le moindre intérêt de nier que je suis statisticien, ça n’apporte rien au débat et en plus tout le monde peut vérifier que Luc Peillon fait juste de la diffamation gratuite. À ce point-là, c’est pathologique. Ce n’est que le début.
Luc Peillon on fire
Luc Peillon a contacté mon éditeur pour obtenir un livre le 20 mars dernier. Son article a été publié le 6 avril. Ainsi, Luc Peillon s’est dit qu’en simplement deux semaines, il allait recevoir le livre, le lire, vérifier les références, notamment les dizaines de rapports officiels, comprendre les statistiques utilisées tout du long, les critiques des modèles mathématiques, analyser tout ça, chercher les contre-arguments, les vérifier, écrire son article et le faire valider.
Nous parlons d’un livre de 480 pages avec une petite dizaine de contributeurs, dont des chercheurs, et dont l’auteur est statisticien de métier depuis 15 ans. Je précise d’entrée de jeu dans le livre que j’ai mis 2 ans à l’écrire. Le livre est une compilation organisée d’une centaine d’articles.
Comment Luc Peillon, journaliste, qui comme beaucoup de gens très biens, ne comprend absolument rien aux mathématiques au vu de ce qu’il a écrit, peut penser qu’il va pouvoir nier tout ce qu'il y a d’écrit dans le livre en quelques jours ? Qui peut avoir une telle suffisance ? N’a-t-il rencontré personne pour lui dire qu’il faut parfois être raisonnable dans ses ambitions ?
Les deux articles publiés par Le Parisien (article 1, article 2) cherchent aussi à discréditer mon livre. Mais les auteurs le font un peu plus intelligemment : ils ont sélectionné 3 points et ont demandé à d’autres personnes qu’ils considèrent “experts” d’apporter la contradiction. Cela ressemble un peu plus à une démarche journalistique.
Ma vidéo de réponse montre que les experts choisis par Le Parisien ont des conflits d’intérêts évidents. Ils ne sont donc pas neutres pour donner leur avis. Les articles du Parisien n’éclairent donc pas le débat. Ils sont une charge. Mais une charge dont on peut comprendre le sens. Les deux articles de Libé au contraire sont des élucubrations d’un type tout seul qui prétend détenir la science infuse. D’ailleurs Libé croit certainement en la science. Celle qu’il fabrique.
Surmortalité ou pas ?
Luc Peillon lit les livres dans l’ordre. Donc il commence par nier les résultats du premier chapitre qui montre qu’il n’y a eu aucune hécatombe nulle part en 2020. Pour le nier, il montre mon graphique qui calcule le taux de mortalité standardisé par âge en France Métropolitaine de ces dernières années. Ce calcul montre bien que 2020 est une des années les moins mortelles de toute l’histoire.
Pour me contredire, il parvient à mentir deux fois dans la même phrase. Il prétend que j’oublie “qu’en raison du progrès social et scientifique, le risque de décès à chaque âge ne cesse - historiquement - de diminuer.” Or, chacun peut constater sur ce graphique, que tous les deux à trois ans la mortalité augmente. Ce phénomène bien connu est appelé “année moisson”.
Ainsi on ne peut pas dire que le risque de décès ne cesse de diminuer. On peut parler de tendance à la diminution. Mais de plus, je ne l’oublie pas et je discute clairement dans mon livre de ce qu’il convient de faire et de ne pas faire concernant cette tendance. Un mensonge c’est déjà beaucoup, mais deux dans la même phrase c’est vraiment fort.
Comme le relève Luc Peillon, j’adresse dans mon livre une critique à une méthodologie employée dans un article de l’Insee qui fait une estimation de la surmortalité de 2020. En effet, dans son article l’Insee prolonge la baisse observée ces dernières années sur 2020. Ce que j’ai appelé “ne pas lever le nez de sa copie”.
Or, en prolongeant les dernières années, le modèle de prévision de l’Insee ne prend pas en compte l’existence des années moissons et donc de fluctuations habituelles de la mortalité. Luc Peillon se garde bien d’expliquer mes remarques ou de montrer mon graphique qui pointe ce qui ne va pas. D’ailleurs parmi les différents scénarios, l’Insee choisit celui qui va minimiser la mortalité attendue et donc maximiser la surmortalité.
Mais ce n’est même pas le plus gros problème. En effet, ce que je critique, c’est qu’en prolongeant une tendance de baisse de la mortalité, les calculs de l’Insee prévoient une mortalité de 2020 plus faible que ce qui n’a jamais existé dans l’histoire. Ce n’est pas raisonnable, ni scientifique. Faire un modèle qui prévoit en 2020, moins de mort que ce qui n’a jamais été observé, pour ensuite pousser des cris d'orfraie lorsqu’on constate que ce n’est pas arrivé, n’est pas raisonnable. Dans le livre, je prolonge le raisonnement jusqu’à l’absurde en disant que si on continue, on va même trouver des taux de mortalité qui tombent à 0 et en déduire que les humains vont devenir immortels, voire ressusciter à partir de 2068 !
C’est là que nous arrivons au seul contre argument des deux articles qui tient la route. Il faut dire qu’il ne vient pas de lui. On peut lire : "Nous appliquons une tendance linéaire sur le logarithme des quotients de mortalité, et non pas sur les quotients, explique à 'CheckNews' Sylvie Le Minez, cheffe de l’unité 'Études démographiques et sociales' de l’institut. Si les quotients de mortalité ont baissé en moyenne, par exemple, de 1% par an à un âge donné entre 2010 et 2019, il est supposé qu’ils vont à nouveau baisser de 1% par an à cet âge de 2020 à 2022. Les quotients ainsi projetés ne peuvent pas être nuls en 2068, ni négatifs après 2068."
On doit commencer par s’étonner que cette méthode ne soit absolument pas écrite dans la partie méthodologie de l'étude en question, ni même dans la note de blog sur le site de l’Insee qui la détaille. Il est bien écrit “tendance de la décennie” et non pas “tendance de la baisse observée” ou même “tendance du logarithme des quotients”. C’est donc étrange de ne pas expliquer la méthode dans la partie “méthode” et de laisser penser à une tendance linéaire. Cela laisse l’impression que le contre argument proposé a été trouvé pour l’occasion.