Christchurch : la France aussi menacée par le terrorisme d'extrême droite

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Pierre Plottu
Publié le 15 mars 2019 - 10:56
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La Grande Mosquée de Paris, le 26 mai 2018 à Paris
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© BENJAMIN CREMEL / AFP/Archives
En France, le renseignement redoute une "confrontation entre l'ultra-droite et le monde musulman".
© BENJAMIN CREMEL / AFP/Archives

Un massacre. Un attentat terroriste contre des musulmans a été perpétré dans la nuit de jeudi à ce vendredi, heure française, en Nouvelle-Zélande. Quatre suspects ont été arrêtés, dont un Australien identifié comme membre de l'extrême droite radicale et connu pour sa haine des migrants. L'homme, Brenton Tarrant, a fait référence à un supposé "grand remplacement" en France dénonçant une "invasion de la France par les non-blancs" avant de passer à l'acte. Il a également parlé du second tour de la dernière présidentielle française comme d'un moment "décisif", selon des éléments repérés par le journaliste Nicolas Hénin.

C'est lors de la prière que l'attaque a été déclenchée. Deux mosquées pleines de fidèles ont été prises d'assaut à l'arme probablement automatique. Une horreur. Des témoins évoquent des cadavres partout, des hommes, des femmes, des enfants massacrés à bout portant, pour certains d'une balle dans la tête, dans un scénario rappelant l'attentat perpétré en France au Bataclan par les islamistes de Daech, le 13 novembre 2015. Il y aurait au moins 49 morts, selon un bilan encore provisoire ce vendredi matin.

Lire notre direct- Attentat terroriste en Nouvelle-Zélande: au moins 49 morts dans deux fusillades de mosquées

Mais un scénario qui rappelle aussi celui du massacre d'Utoya, en Norvège, lorsque l'extrémiste de droite Anders Breivik a tué 77 personnes, et en a blessé 151 autres, rassemblées pour l'université d'été des jeunes travaillistes norvégiens. Un attentat déjà motivé par la haine des migrants musulmans sur fond de théorie farfelue du "grand remplacement", thèse complotiste selon laquelle il existerait un plan de substitution des populations "de souche" européennes et françaises par des immigrés essentiellement de culture musulmane.

Cette théorie est très exactement celle qui motviait, en France, les membres de la cellule terroriste d'AFO, pour "Action des forces opérationnelles". Une dizaine de personnes suspectées d'appartenir à ce groupuscule à visé terroriste ont été arrêtées l'été passé, en juin. Selon les enquêteurs, ils projetaient de tuer le président Macron ou du rappeur Médine, mais leurs plans visaient aussi à attaquer une mosquée, empoisonner de la viande halal ou encore s'en prendre à un kebab.

Des notes de la DGSI versées au dossier décrivent le réveil de l'ultradroite en France avec des "groupuscules concurrents", "soudés" autour de la dénonciation de "l'islamisation de la France", selon l'AFP. Le renseignement souligne toutefois que les "capacités opérationnelles" de ces groupes restent pour l'heure "limitées" du fait de leur relative désorganisation. Un constat qui résonne avec celui de Patrick Calvar, alors patron du renseignement intérieur (DGSI), qui en 2016 disait son inquiétude d'une dérive vers "une confrontation entre l'ultra-droite et le monde musulman". Et le patron du renseignement intérieur d'insister: "pas les islamistes mais bien le monde musulman".

Car passer à l'acte est somme toute assez simple, rappelle le spécialiste de l'extrême droite radicale Nicolas Lebourg. "Le rapport sur la situation et les tendances du terroriste de l'UE, TESAT, dit bien dans sa partie sur l'extrême droite qu'il y a deux cibles en Europe: les musulmans et les militants de gauche accusés d'être complices du grand remplacement". Et le spécialiste de rappeler que Breivik en Norvège en 2011, Bowers à Pittsburgh en 2018, ou donc Tarrant à Christchurch ce vendredi ont en commun la lecture du suprématiste blanc et terroriste David Lane. L'homme a théorisé dans un manifeste une version plus extrême encore de la théorie du grand remplacement, le "génocide blanc", et est l'auteur de la fameuse phrase aux 14 mots qui fait référence dans la mouvance d'extrême droite radicale, notamment en France: "Nous devons assurer l’existence de notre race et un futur pour les enfants blancs". De nombreux symboles d'extrémistes français nationalistes et racistes reprennent ainsi le chiffre 14 en référence à cette phrase.

"C'est le signe fort de la planétarisation de cet extrémisme suprématiste blanc", souligne ainsi Nicolas Lebourg. Car ces théories infusent dans la mouvance, attisée par la menace djihadiste, et se retrouvent chez AFO donc, mais aussi dans la nouvelle "OAS" qui a été démantelée en 2017 par la DGSI avec notamment l'arrestation de Logan Nisin. Passé par le FN (pas encore RN), les Jeunesses nationalistes (émanation de l'Oeuvre française), l'Action française (royalistes) et divers groupuscules néonazis, Nisin voulait "enclencher une re-migration (le départ des ppopulations considérées comme pas "de souche", NDLR) basée sur la terreur".

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