De global à local, le tour du globe en 80 trimestres - une génération

Auteur(s)
Xavier Azalbert- Directeur de la Publication
Publié le 18 avril 2020 - 03:09
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#MaPlanète
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©Fadel Senna/AFP
De global à local
©Fadel Senna/AFP

ANALYSE - De local à global  

Il aura fallu moins d’une génération pour que l’évolution de notre société aille de local à global afin de satisfaire le besoin croissant de nos envies de consommer. Depuis les années 60, notre place du marché est passée de locale à globale, nous permettant d’avoir multitude de  produits en perdant la référence à la saisonnalité et à la temporalité.  On voulait du soleil en hiver, on prenait l’avion pour se retrouver dans l’hémisphère sud. Demandez  aussi à vos enfants la saison des fraises, des cerises, des aubergines, des mûres.... Nous avons perdu une partie de notre capacité industrielle à la quête de la productivité et ainsi perdant une grande partie de notre indépendance et des valeurs civiques et communautaires. 

De global à glocal (contraction de global et local) – en quelques années

Cependant les experts en marketing se sont bien vite aperçus que le même produit ne satisfaisait pas les besoins de tous les consommateurs. Il existait un besoin de localiser certaines productions afin de répondre à des critères fixés par les autorités ou simplement attendus. En d’autres termes pour avoir le label made in France il fallait le gagner.  Qui eut cru que l’on aurait un jour une Toyota fabriquée en France ou une Renault au Brésil. Les politiques étatiques de protectionnisme local ont poussé les entreprises à s’adapter et à produire localement afin d’acquérir une couleur locale à grands frais et aux prix d’accords internationaux parfois difficiles à comprendre, mais relevant de partages de rôles nationaux pour bénéficier aux entreprises si l’on écoute les débats politiques sans fins. Aujourd’hui, le voyage aérien est quasiment arrêté. «Il s'agit de la crise la plus profonde jamais traversée par notre industrie», a commenté le directeur général de l'Association internationale du transport aérien (Iata) Alexandre de Juniac au cours d'une conférence téléphonique, appelant les gouvernements à l'aide face à l'arrivée d'une «crise de liquidités». La baisse du chiffre d’affaires initialement estimé la semaine dernière à 113 milliards de dollars (source : IATA) vient d’être relevé à 252 milliards de dollars, une baisse de 44% du chiffre d’affaires par rapport à 2019 sur la base d’une crise durant 3 mois. 

 

De global à local en une semaine  

Les compagnies aériennes, les fabricants d’avions, les agences de voyage, tout ce secteur est en berne, car on est passé de global à local en quelques jours. Local pour ne pas dire confinés, car aujourd’hui les mouvements des Français sont réduits à quasiment zéro (1h par jour à 1km de chez soi hormis pour les personnes travaillant dans des entreprises de première nécessité). Heureusement le trafic reprend en Chine pendant que le reste du monde se débat avec le confinement de la population – temporaire dit-on sans savoir exactement combien de temps cette situation de crise sanitaire va durer. Au moins jusqu'au 15 avril 2020 a précisé le premier ministre Edouard Philippe.

 

La planète et l'environnement en tirent des bénéfices immédiats

Cet arrêt signe-t-il la fin de partie pour la course effrénée dans la consommation à crédit, à crédit envers la planète, à crédit de nos enfants? Les villes sont devenues respirables, la pollution se dissipe. Mais, que restera-t-il de tout cela après cette « crise sans précèdent » nous dit-on que l’on ne chiffre aujourd’hui qu’en dizaine voire centaines de milliards d’euros. La France, et bien sûr, les autres nations, ont toutes vécu des crises majeures avec des guerres aux conséquences autrement dramatiques en termes de vies humaines, que la crise sanitaire actuelle. Cependant cette histoire que l’on apprend dans les classes primaires et jusqu’au baccalauréat est assez lointaine, elle ne nous touchait pas directement. Aujourd‘hui, l’état relatif de paix dans le monde a fait parfois perdre la notion du sacrifice humain que les générations précédentes ont vécu.

Covid-19, Coronavirus, Sras, nous rappellent à l’ordre. Le confinement sans fin, pousse à la réflexion et nous fait prendre conscience qu’un ordre nouveau est sûrement nécessaire, une discipline nécessaire, des prises de décisions plus rapides sont possibles. Quand la liberté s’effrite, l’essentiel redevient important. On prend conscience de la fragilité de la vie et en même temps de sa valeur inestimable. 

De manière plus pragmatique, suspendre les réformes nécessaires, mais sûrement pas suffisantes

Il y a 15 jours, la réforme des retraites alimentait les débats de nos parlementaires, agitait les syndicats les plus virulents. Dans son discours du 17 mars, le président Macron l’a suspendue au même titre que d’autres réformes.  

Le président français et son gouvernement ont eu raison de suspendre les réformes en cours, car il y a des priorités bien plus importantes à adresser dans l’intérêt des Français.  Cependant le Covid-19, c’est un peu comme l’arbre qui cache la forêt car derrière cette crise sanitaire, ce qui inquiète le plus, sont les conséquences économiques, les milliards mis à disposition de l’économie qui sans nul doute sont nécessaires dans le court terme, mais ne serons pas suffisants dans le moyen terme. Les économistes sont à la manœuvre pour essayer d’estimer l’ampleur de la crise économique et de la récession qui nous guette. Chaque mois, le confinement devrait réduire la croissance de 2.1% estime Christine Lagarde, Présidente de la BCE. Peut-être 5% de croissance au niveau européen en fonction de la durée du confinement. Difficile de croire qu’après 2008 et la crise des sub-prime, les pays étaient préparés à cette nouvelle débâcle économique.  Nous nous en sortirons, mais à quel prix et avec quelles conséquences.

 

Réformer ou re-former

Sans aucun doute, réformer est une nécessité pour la France afin de préserver notre système et d’en assurer sa sérénité. Il y a encore quelques semaines nos parlementaires, syndicats, membre du gouvernement s’écharpaient sur l’Age pivot à 64 ans. Tout cela peut aujourd’hui paraitre futile à l’aube de la prochaine crise économique, mais cela sera surement salvateur. Réformer n’était pas suffisant. La cours des comptes le disait. Les réformes n’allaient pas assez vite, pas assez loin. Tout cela était nécessaire, mais en aucun cas suffisant. 

Ce n’est pas réformer qu’il faut, mais RE-FORMER notre système,repenser nos modes de fonctionnement de manière profonde afin de sortir de cette «guerre» en minimisant les dégâts.

Dans le monde de l’entreprise quand les processus deviennent obsolètes on lance un projet de "Core Process Redesign" profond ou tout est permis. Nous ne parlons pas de régression sociale, mais de progression sociétale vers un monde ou les droits de chacun respectent notre devise nationale de liberté égalité et fraternité. Nous avons commencé à perdre certains degrés de liberté (confinement…) ce qui permet de se poser de bonnes questions sur les inégalités qui existent dans notre pays dans les systèmes. Donc oui, la suspension de la réforme des retraites était nécessaire, car l’ordre nouveau n’est pas encore atteint.

 

"Communautarism" en anglais dans le texte

Il est encore trop tôt pour tirer des leçons, mais à chaque jour sa peine et son lot de considérations sociales ou sociétales. Les locaux se rebellent contre les migrants. En Bretagne, sur le bassin d’Arcachon, les locaux se plaignent de l’apparition de leurs habitants temporaires qui amènent des surcharges temporaires. Ces surcharges sont acceptées en été ou pendant la saison, mais là avec la contagion du virus, le virus s’est déplacé plus rapidement que prévu. Le TGV s’est mué en TGVV très grande vitesse virus. Le OUIGO en No way. Les communautés se referment, les habitants des petits villages qui accueillent les touristes à bras ouverts en saison aujourd’hui leur demande de rester chez eux faisant ainsi renaître le sentiment de communauté. (Le comté de Cornouailles publie sur internet des messages expliquant que le comté était là il y a 100 ans et qu’il sera là encore longtemps donc ce n’est pas la peine de s’y rendre maintenant car sa population plus âgée est plus à risque).  Ce sentiment primaire de communautarisme si bien compris dans le sens Anglo-saxon et détourné à des fins politiques dans la langue française renaît et c’est probablement une bonne chose. Le télétravail et la digitalisation de notre monde qui faisaient peur aux chercheurs tout d’un coup devient salvateurs. En une semaine, le monde est revenu à des considérations locales, plus simple, plus basique. Un réel besoin d’efficacité dans nos faits et gestes apparait (par exemple si les élections avaient été tenues de manière digitale dimanche dernier les élections municipales auraient surement connues une plus grande participation).

250 milliards de dollards de baisse de chiffre d’affaires pour les compagnies aériennes et combien pour le reste. Ramené à la population totale des voyages en 2017 (4 000 000 000 de voyages source IATA) soit 127 voyageurs par seconde!  250Md disparus en 3 mois cela fait 250 euros par voyage. 

Jules Vernes a  écrit le Tour du Monde en 80 jours, une révolution complète du cycle économique (de local à global à local) aura pris 80 trimestres.

Les voyages reprendront, le monde retrouvera un ordre, mais sûrement beaucoup plus LOCAL. Un cycle de 80 trimestres.

 

 

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