"Hijab de running" Decathlon : la droite attaque l'islam, la gauche défend le féminisme

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Pierre Plottu
Publié le 26 février 2019 - 17:00
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le "hijab de running" Decathlon
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Le "hijab de running" de Decathlon.
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La polémique enfle alors que Decathlon va mettre en vente un "hijab de running" adapté aux femmes musulmanes pratiquant la course à pied. La droite et l'extrême droite dénoncent une preuve de "l'islamisation" de la France, tandis que la gauche y voit une "stigmatisation du corps des femmes" et des valeurs du sport.

Les condamnations voire les appels au boycott fleurissent. La marque d'articles de sport Decathlon est au cœur d'une intense polémique depuis qu'a été révélé, en fin de semaine dernière, que l'enseigne allait mettre en vente des "hijabs de running". Un voile adapté à la pratique sportive et qui répond à une demande, se défend Decathlon, mais qui ne passe pas du tout auprès des réseaux féministes mais aussi islamophobes.

C'est notamment un tweet de la porte-parole des Républicains Lydia Guirous qui a mis le feu aux poudres, dimanche 24. Féministe "pragmatique" et pourfendeuse d'une "cinquième colonne" islamiste en France, elle a accusé sur le réseau social Decathlon de "renie(r) les valeurs de notre civilisation sur l'autel du marché et du marketing communautaire" et de se soumettre à "l'islamisme qui ne tolère les femmes que la tête couverte d'un hijab pour affirmer leur (...) leur soumission aux hommes".

Dans la foulée, toujours dimanche, ce sont les réseaux féministes qui ont embrayé. La Ligue du droit international des femmes (LDIF) et le Comité laïcité République (CLR) ont publié un communiqué commun accusant Decathlon de se faire "le promoteur de l'apartheid sexuel" et rappelant que d'autres marques, comme Nike, ont déjà investi un marché comparé à l'"apartheid racial" sud-africain.

Lire: Decathlon "assume" la commercialisation d'un "hijab" de sport

En parallèle, dès dimanche et lundi mais surtout ce mardi, les réseaux de droite et d'extrême droite hostiles à "l'islamisation" de la France se sont à leur tour saisis du sujet. De Nicolas Dupont-Aignan (DLF) à Louis Aliot (RN) ou Lydia Guirous, donc, en passant par Valérie Boyer (LR), Gilbert Collard (RN), Bruno Retailleau (LR)... tous ont saisi l'occasion de dénoncer le "communautarisme islamique", et le reniement des "valeurs de notre civilisation". Le message dominant pourrait se résumer par le message posté sur Twitter par Bruno Retailleau: "l’islam fondamentaliste continue de progresser en France. Le faire reculer, voilà le combat à mener, notamment pour la dignité des femmes".

Contactée par France-Soir, la présidente de la LDIF et socialiste Annie Sugier insiste justement sur la portée féministe du sujet, tout en refusant de le laisser à la droite et à l'extrême droite accusées de "dévoyer" le débat. "Les règles du sport olympique prévoient la non discrimination et la neutralité. Elles disent qu'il faut laisser au vestiaire ses convictions politiques et religieuses. Ce n'est pas contre la religion par exemple, mais bien pour que tous puissent cohabiter dans le sport", insiste Annie Sugier.

Rien de "culturel" non plus dans le voile, développe-t-elle, en rappelant qu'en Iran des femmes se battent pour ne plus le porter, ou que les sportives musulmanes pionnières ne le portaient pas: "elles respectaient la charte".

"L'Afrique du Sud a été exclue pendant 20 ans des JO pour l'Apartheid mais là comme ce sont des femmes ce ne serait pas grave? Le voile ce sont les pires dictatures, c'est une stigmatisation du corps des femmes, un apartheid sexuel", s'insurge Annie Sugier.

Un sujet loin d'être anecdotique alors que se met en branle la grosse machinerie destinée à préparer la France à l'accueil des JO de Paris en 2024, les premiers dans le pays de Pierre de Coubertin depuis plus d'un siècle. Trois ministères sont mobilisés (Education, Agriculture et Sports) et un programme ("le sport au service de la société") ainsi qu'un label ("Génération 2024") ont été spécialement créés. Le délégué ministériel aux jeux Olympiques et paralympiques Thierry Terret y voit ainsi "une opportunité exceptionnelle (...) d'intégration des valeurs de l'olympisme" pour les nouvelles générations.

> Mise à jour:

Dans la foulée de la publication de cet article, les réactions politiques se sont encore multipliées. Comme les autres ténors d'extrême droite, Marine Le Pen a twitté pour dénoncer "Decathlon: À FOND L'ISLAMISME(sic)!".

La majorité LREM a également réagi. La ministre de la Santé Agnès Buzyn a par exemple dénoncé une "promotion du voile" et développé: "c’est une vision de la femme que je ne partage pas. Je trouve que ça ne correspond pas bien aux valeurs de notre pays".

Lire aussi:

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Burkini, niqab, burqa, hijab: ce que dit la loi sur le voile islamique en France

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