La stratégie de Benalla auditionné au Sénat : épargner Macron et gagner du temps

Auteur(s)
Pierre Plottu
Publié le 19 septembre 2018 - 14:57
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Former Elysee senior security officer Alexandre Benalla raises his hand as he takes the oath before a Senate committee in Paris on September 19, 2018.The disgraced former bodyguard at the centre of th
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© Alain JOCARD / AFP
Alexandre Benalla a prêté serment de dire "toute la vérité", ce mercredi en préambule de son audition au Sénat.
© Alain JOCARD / AFP
Auditionné par les sénateurs pendant près de deux heures trente ce mercredi matin, Alexandre Benalla a déployé uns stratégie simple mais efficace: en dire le plus possible pour en révéler le moins possible.

Parler le plus possible, pour en dire le moins possible: la stratégie déployée par Alexandre Benalla lors de son audition devant les sénateurs, ce mercredi 19 au matin, a été transparente. Noyant les élus sous un déluge de "précisions", en réalité force détails insignifiants, le jeune homme aux méthodes musclées semble ainsi avoir surtout cherché à perdre du temps. Et cherché à épargner Emmanuel Macron.

Sous le feu des questions des sénateurs, Alexandre Benalla a commencé quasiment toutes ses réponses par "je vais vous répondre précisément...", ou "là encore pour être très précis...". Un effort louable pour tenter de répondre au mieux? Peut-être. Mais répétée, lancinée, pendant les près de deux heures trente qu'a duré l'audition, la formule fait surtout penser à une stratégie pour gagner du temps.

Lire- En direct: l'audition d'Alexandre Benalla au Sénat

D'autant qu'elle était accolée à des réponses dans la plupart des cas à côté de la plaque, conduisant les sénateurs à le relancer pour obtenir les informations demandées. Sans succès le plus souvent, tandis que, l'heure avançant, le président de la commission Philippe Bas a dû mettre un terme à ce ping-pong pour que toutes les questions prévues puissent être posées...

Car la suite des réponses du jeune homme ont été à l'avenant. Comme lorsqu'il se perd dans les détails pour décrire l'une des "cinq fois, de mémoire" où il s'est rendu au ministère de l'Intérieur. La question, précise, était de savoir s'il avait un accès particulier à la très sensible place Beauvau. Mais Alexandre Benalla a surtout décrit où il s'est garé, comment un policier l'a accompagné du parking au bâtiment, etc.

Prolixe, sûr de lui (malgré quelques lapsus) et parfois même ironique, l'ancien chargé de mission de la présidence de la République en a ainsi finalement dit très peu sur son rôle exact auprès d'Emmanuel Macron.

Voir- Son arme, son rôle ou non de garde du corps: les doutes après l'audition de Benalla

Alexandre Benalla a bien détaillé ses missions "d'organisateur" des déplacements nationaux et privés du président, des événements au palais de l'Elysée, de la coordination des services de sécurité et son étonnante mission de "service des présents diplomatiques" (à savoir "la gestion des cadeaux que le PR peut offrir à ses hôtes étrangers"). Mais c'était pour mieux redire qu'il n'était pas "l'épaule" d'Emmanuel Macron, à savoir chargé de sa protection physique rapprochée.

Le jeune homme a même expliqué que son statut de chargé de mission était le plus bas de l'échelle, comme pour mieux nier toute proximité avec Emmanuel Macron et réaffirmer qu'il ne bénéficiait d'aucun passe-droit. L'homme avait pourtant les clés de la résidence personnelle du couple présidentiel au Touquet, bénéficiait d'un badge d'accès de haut niveau à l'Assemblée nationale, d'une voiture de service haut de gamme équipée police et un permis de port d'arme lié à une "mission de police" auprès de la présidence.

Ces deux derniers points entrent également en contradiction avec les réponses d'Alexandre Benalla, ce mercredi matin. Il a ainsi dit et répété n'avoir aucunement été en charge d'une mission de type policière auprès d'Emmanuel Macron.

Qu'importe que l'arrêté préfectoral lui délivrant le droit de porter une arme mentionne pourtant précisément cette mission. Lui l'a demandé, dit-il, pour "des raisons de sécurité personnelle", se sentant menacé car il était "exposé". Mais Benalla n'explique pas que la préfecture de police ait utilisé un autre motif.

Autorisé à être armé en dehors de ses fonctions auprès d'Emmanuel Macron, Alexandre Benalla a toutefois concédé avoir participé à plusieurs déplacements du président -officiels ou privés- en portant son arme. Ce qui voudrait dire, si le jeune homme a bien dit "toute la vérité" (il a prêté serment), qu'un homme n'était pas sensé être armé en présence du président de la République l'a bien approché au plus près avec un pistolet.

Inquiétant ou farfelu?

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