Marine Le Pen "tente une aventure assez macronienne" et court à l'échec, dénonce Lorrain de Saint Affrique
"Sauver ce qui peut l'être". Alors que Marine Le Pen a fait ce samedi 3 sa rentrée politique à Brachay, en Haute-Marne, comme chaque année depuis trois ans, le camp de son père, toujours en procès avec le parti depuis son exclusion en août dernier, se prépare.
"Il y aura aux législatives de 2017 des candidats dans toutes les circonscriptions estampillés Jean-Marie Le Pen", prévient ainsi un Lorrain de Saint Affrique redevenu bras droit de Jean-Marie Le Pen et désormais secrétaire général des Comités Jeanne, le mouvement des fidèles du patriarche de la famille Le Pen. Et d'avertir: "sur la question présidentielle, Jean-Marie Le Pen fera connaître son choix le moment venu".
Marine Le Pen fait ce samedi sa rentrée politique. Une rentrée dont ont totalement disparu le nom et le logo du Front national...
"Si elle avait voulu imaginer un moyen pour ne pas réussir en 2017, je crois qu'elle aurait rassemblé tous ces éléments. Elle va croiser l'opinion française, s'en éloigner, au moment où celle-ci se rapproche des fondamentaux du FN. A un stade de la campagne, l'opinion et Marine Le Pen, comme le Front national actuel, se croiseront. A trop pencher vers la gauche, avec des arguments de gauche, au lieu de convaincre ceux qui votaient à gauche de passer à droite. Employer des codes de gauche ne fera que contribuer à éparpiller les adhésions et risquer l'échec, dès, peut être, le premier tour de l'élection présidentielle.
"En supprimant la flamme (symbole du parti, NDLR), en gommant son nom même et le nom du Front national, Marine Le Pen tente une aventure assez +macronienne+, lourde d'incertitudes".
Il faut donc un autre candidat nationaliste, face à Marine Le Pen, en 2017?
"Il y aura aux législatives de 2017 des candidats estampillés Jean Marie Le Pen dans une large majorité des circonscriptions. Non pas dans un esprit de dissidence ou de divisions, mais de maintien du cap national abandonné par le FN dans sa forme d'aujourd'hui. "Tant de militants désespérés veulent abandonner le combat que nous devions, sous l'égide de Jean-Marie Le Pen, leur offrir ce moyen de continuer le combat si nécessaire pour le pays.
"Sur la question présidentielle, Jean Marie Le Pen fera connaître son choix le moment venu. Marine or not Marine... C'est une question de programme".
Vous vous préparez donc?
"Autour de Jean Marie Le Pen nous rassemblons la famille nationale au sens large. La base patriote se manifeste de toute la France, les journées que je vis comme secrétaire général des Comités Jeanne sont riches et denses.
"Qui souhaite nous rejoindre? Les meilleurs, les plus expérimentés, les plus engagés. Il y a 577 circonscriptions législatives, je pense qu'on va y être le plus souvent présent.
"Au FN d’aujourd’hui, la mode est aux purges, les militants sont sous pression, surtout quand il s'agit de catholiques assumés. Malgré l’ampleur du mouvement de la Manif pour tous, Marine Le Pen passe en force et assume le choix brutal que tout ce qui est trop catholique doit être écarté".
Un rapprochement semble compromis tant Marine Le Pen semble vouloir tourner la page de son père. Certains dénoncent même une chasse aux sorcières menée au sein du parti.
"Condamner la base militante à un rôle de figuration, chasser tous les vrais fidèles pour leur substituer des jeunes diplômés sous l'égide de Florian Philippot, dans une sorte de grand remplacement, tout cela ne permet pas d'envisager rationnellement un avenir solide. Quand on a 23 ans, qu'on est déjà conseiller régional et qu'on croit devenir député l'année prochaine, on est fidèle à celui qui vous a donné une investiture. Si cela ne prépare pas à une adhésion au système, avec les méthodes du système...
"La position de Jean-Marie Le Pen est de vouloir rassembler le camp national ,dans le sens le plus large possible, seule stratégie permettant d'envisager des victoires.
"La démarche de Jean-Marie Le Pen, qui n'a rien à voir avec le plan personnel ou sa relation avec sa fille, c’est de sauver ce qui peut encore l'être".
Quelles sont ces relations, justement?
"A Montretout (la résidence familiale, NDLR), auprès de Jean Marie Le Pen, nul ne prononce un mot désagréable concernant Marine Le Pen. Nous sommes calmes, nous regardons la politique de la façon la plus objective possible. Depuis un an, Jean-Marie Le Pen n’émet aucune menace, uniquement des conseils. Personne dans l’entourage n’oublie qu'elle est sa fille et que la dignité appelle à la retenue".
Elle, par contre, aurait oublié qu'il est son père?
"Nous étions en Guinée Equatoriale au mois de mai à l’invitation du Président Obyang. La plupart des dirigeants africains qui sont venus voir Jean-Marie Le Pen à cette occasion lui ont dit: +conseillez à votre fille si vous lui parlez encore de ne pas venir dans mon pays. Chez moi le parricide passe très mal+. Ça ne lui fait pas plaisir d'entendre ça, c'est sa fille, mais il comprend le conseil".
Quelles bases programmatiques pourraient encore permettre un rapprochement entre Jean-Marie Le Pen et sa fille?
"Lorsque Florian Philippot se réjouit, montre de l'intérêt au programme de Montebourg, par exemple, nous comprenons que cela lui parle, lui qui se réclame du chevènementisme, du souverainisme de gauche. Nous pensons qu'il y a au cœur de cette idéologie tout ce qui a fait couler la France depuis quarante ans.
"J'insiste sur le fait qu'il n'y a là rien de personnel. Jean-Marie Le Pen a toujours évalué Florian Philippot comme quelqu'un qui n'a jamais dissimulé ses valeurs: le bras droit (de gauche) de Marine Le Pen a notamment toujours proclamé qu'il n'aurait jamais voté FN du temps de Jean-Marie Le Pen. Il a parfaitement le droit d'occuper cet espace, qui n'a toutefois pas grand chose à voir avec les orientations fondamentales du Front national. Et ça doit les combler, puisqu'ils renoncent maintenant à s'appeler Front national".
Est-ce à dire que Florian Philippot aurait en quelque sorte "marabouté" Marine Le Pen?
"Tout procède de la responsabilité de la présidente du FN, Marine Le Pen. Florian Philippot croit pouvoir générer des fidélités, dans une perspective de plus en plus personnelle et de moins en moins lepéniste.
"Ayant tenté de faire exclure Jean Marie Le Pen, ce qui n'est pas fait puisque nous avons rendez-vous devant la justice le 5 octobre, ayant convaincu Marine qu'il fallait s'appeler Marine et non plus Le Pen, que la flamme du FN doit s'éteindre comme marque et comme symbole... Qu'est ce qui lui manque maintenant? Il lui reste deux Le Pen à faire disparaître et un nom à changer.
"Mais l'hémorragie de militants atteint la cote d’alerte. On parle des nouveaux arrivants, mais pas de ceux qui quittent le parti. La moitié du FN officiel ne figure plus objectivement dans les effectifs réels du Front national".
Ces militants rejoignent Jean-Marie Le Pen?
"Ils sont en train de le faire à un rythme qui s’accélère. Depuis qu'il a annoncé sa décision d’accorder l’étiquette +Le Pen+ aux législatives de 2017, nous sommes saisis de nombreuses demandes.
"J'entends les dirigeants du Front national dire qu'ils ne sont pas inquiets car cela n'aura pas de conséquence. Hé bien qu'ils ne soient pas inquiets... Ils ne se sentent pas menacés? Très bien, appelons cela les ambitions apaisées.
"Florian Philippot repasse sans arrêt son grand oral de l'ENA dans les matinales télévisées... Haut fonctionnaire du ministère de l'Intérieur, il ne manque pas de qualités technocratiques. On peut lui faire confiance car il a fait les mêmes études que François Hollande, HEC et l'ENA. O ne sent guère les vibrations affectives.
"Marine Le Pen avait besoin de quelqu'un ayant son profil, pour s'affranchir de la manière dont elle avait négligé l’étude approfondie des dossier de fond et la rendre vite compétente sur de nombreux sujets".
C'est pour ces raisons que Marine Le Pen est beaucoup moins présente dans les médias ces derniers mois?
"Je crois qu'elle fait trop confiance aux enquêtes d'opinion. Florian Philippot et son frère Damien, qui est à la tête de l'Ifop, lui ont vendu une approche scientifique de la société qui lui fait perdre progressivement ce qui était un de ses points forts, l’intuition.
"A t-elle une chance certaine d'être au second tour de la présidentielle aujourd'hui? Ayant fracturé sa famille politique en lâchant la proie pour l'ombre, ne serait-ce pas l'ombre qui sera au rendez-vous?"
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