Néonicotinoïdes : elle dénonce les méthodes de la majorité pour museler l'opposition, le coup de gueule de Mathilde Panot à l'assemblée - vidéo

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FranceSoir
Publié le 12 octobre 2020 - 13:58
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Mathilde Panot, députée La France Insoumise
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STEPHANE DE SAKUTIN / AFP
Mathilde Panot, députée La France Insoumise, à l'Assemblée nationale
STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Après le vote qui réintroduit les néonicotinoïdes pour sauver la filière sucrière française, la députée La France Insoumise a poussé un coup de gueule à l'Assemblée, intitulé "Petit manuel d'anti-démocratie : trucs et astuces pour museler l'opposition". Lisez et écoutez les propos de cette parlementaire exaspérée par les méthodes de la majorité.

Dans la nuit du lundi 5 au mardi 6 octobre, les députés ont voté « pour » le retour des néonicotinoïdes, pourtant interdits en 2018. Une décision justifiée par « l’absence d’alternatives » pour lutter, notamment, contre la prolifération d’un puceron vert, vecteur d’une maladie qui affaiblit les betteraves issues de semences non enrobées d’insecticide. Ce retour en arrière doit permettre de protéger les rendements sucriers, filière qui emploie plus de 46 000 personnes.

Si le groupe LR et l’UDI ont voté pour la réintroduction de ces pesticides tant décriés, la gauche a fait front uni. Le lendemain, à l’Assemblée, la députée La France Insoumise Mathilde Panot rebondissait sur ce vote en listant ce qu’elle nomme les « trucs et astuces pour museler l’opposition ». Elle y dénonce les méthodes des députés pour faire passer « en catimini », des textes importants pour l’avenir de nos enfants et de la planète. Découvrez le coup de gueule de la députée LFI, qui liste les astuces qu’elle a eu le loisir de lister ces trois dernières années, depuis qu’elle siège à l’Assemblée.

« Astuce numéro 1 : Discuter des pesticides la nuit, toujours en catimini. C’est avec cette méthode que vous aviez discuté l’interdiction du glyphosate par un vote à 4h30 du matin, par un vote un vendredi soir, au moment où l’hémicycle était désert. Après tout pourquoi attendre qu’une grande partie des parlementaires soit dans l’hémicycle pour légiférer sur des sujets délicats ?!

C’est aussi ce qui s’est passé hier soir avec la discussion sur les pesticides tueurs d’abeilles qui s’est prolongée jusqu’à 2h30 du matin.

Astuce n°2 : faire passer directement des éléments de langage ou des amendements du gouvernement aux députés de la majorité. Vous avez raison, on n’est jamais mieux servi que par soi-même. Il suffit pour le gouvernement d’envoyer aux députés LREM des questions qui font, de préférence, les louanges de leur politique ou bien des amendements qui vont dans leur sens. Mais attention, collègues députés ! Pensez bien à changer l’exposé des motifs au risque de paraître un peu ridicules.

Astuce n°3 : demander un second vote quand on n’est pas d’accord avec le premier. C’était votre technique encore la semaine dernière : l’assemblée avait rejeté un recul de la démocratie environnementale le mercredi. L’avantage de cette astuce, c’est que le simple fait de demander un second vote fait comprendre aux députés de la majorité que le premier n’était pas le bon. C’est finalement ce que nous faisons encore aujourd’hui pour le néonicotinoïdes, interdits en 2016 pour leur dangerosité, peut-être réautorisés de nouveau.

Astuce n°4 : mentir, tout simplement. Annoncez la fin du glyphosate mais refuser tous les amendements qui demandent son interdiction.  Dites que vous allez reprendre sans filtre les propositions de la Convention citoyenne pour le climat mais enterrez les propositions qui nuisent le plus au fonctionnement du libéralisme, ou sinon, proclamer haut et fort que vous êtes contre le néonicotinoïdes, mais voter pour les néonicotinoïdes.

Astuce n°5 : faire diversion, dès que possible. Astuce à utiliser dès que possible. Avoir Greta Thunberg comme invitée le jour du vote du traité de libre-échange du CETA, ou pendant que le vivant s’effondre et dès que le dérèglement climatique avance, parler des nombrils des jeunes filles, de séparatisme ou encore, gagnant à tous les coups, des musulmans.

Astuce n°6 : vous faire passer pour des pragmatiques. Celle-là, c’est votre préférée, vous l’avez copieusement utilisée pendant l’examen de cette loi. Il vous suffit de repeindre l’opposition en « rêveurs » ou « irresponsables » qui tiennent des propos « d’estrade » pour faire de vous les « réalistes », les « terre à terre », qui prennent des décisions rationnelles. Ne dites surtout pas « nous avons écouté les loobies ». Préférez : « nous sommes contraints de faire ce que nous faisons, en vertu du principe de réalité ». Employez un sophisme classique. Si l’opposition est contre la réautorisation des néonicotinoïdes, c’est qu’elle est pour la fin de l’industrie sucrière en France et pour la mise à mort des producteurs de betteraves. En somme, au-delà de la réautorisation des ces pesticides, point de salut. Votre pensée complexe va même plus loin : en fait ce qu’il faut c’est être contre les néoconitnoïdes mais pour le texte qui les réautorise, il ne faut pas hésiter à dire : « ce texte marque la fin de l’utilisation des pesticides tueurs d’abeilles » alors qu’il les réintroduit. Vous me suivez ?

Et de poursuivre : « Comme le disait madame Pompili en 2016 (qui avait défendu l’interdiction des néonicotinoïdes mais était absente pour le vote dans la nuit du 5 au 6 octobre, ndlr) , nous ne pourrons pas dire que nous ne savions pas. Oui nous savons, oui vous savez. Vingt ans d’études scientifiques prouvent la dangerosité des néonicotinoïdes sur les abeilles, sur les sols, l’eau, la biodiversité et notre santé et pour des dizaines d’années. Nous savons que 80% des insectes européens ont déjà disparu en 30 ans. Nous savons que sans pollinisateurs, 85% des cultures sont en danger soit toute notre souveraineté alimentaire. Nous savons que ce vote engage la place internationale de la France qui avait eu une politique exemplaire en interdisant ce poison, nous savons que ce texte entraînerait des effets sur les générations futures, surtout sur le développement des cerveaux des enfants. Oui, nous savons et nous pouvons faire autrement. Il faut d’urgence planifier la bifurcation vers une agriculture paysanne et écologique, nous voterons contre ce texte car cette loi est un empoissonnement volontaire, et si elle devait passer, nous ferons un signalement devant la Cour de justice de la République pour mise en danger de la vie d’autrui en connaissance de cause. Collègues votez en conscience, soyons à la hauteur des enjeux de notre siècle. Notre refus peut changer l’histoire », conclut Mathilde Panot, dont vous pouvez retrouver l’intégralité de l’intervention en vidéo ci-dessous.



 

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