Pas de motion de censure à gauche, la loi Travail adoptée via le 49-3

Auteur(s)
La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 06 juillet 2016 - 20:29
Image
L'Assemblée nationale remplie.
Crédits
©Gonzalo Fuentes/Reuters
Il fallait 58 signatures de députés pour déposer une motion de censure. Celle de la gauche n'en a recueilli que 56.
©Gonzalo Fuentes/Reuters
La loi Travail a été adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale mercredi, après un nouveau recours de Manuel Valls à l'article 49-3. Les députés frondeurs, écologistes contestataires et Front de gauche n'ont une nouvelle fois pas réussi à réunir le nombre de signatures nécessaires au dépôt d'une motion de censure.

Une seconde fois, encore à deux signatures près, des députés de gauche ont échoué ce mercredi 6 à déposer une motion de censure contre le gouvernement Valls, entraînant l'adoption en nouvelle lecture du projet de loi Travail, via le 49-3.

Après quatre mois de contestation sociale, le projet de loi porté par Myriam El Khomri repart désormais au Sénat, à majorité de droite, en vue d'une adoption définitive par l'Assemblée le 20 juillet.

"Nous nous sommes battus jusqu'au bout contre le cynisme, les pressions... et la loi travail. Cinquante-six députés de toute la gauche ont accompagné cette démarche", a annoncé le chef de file des frondeurs PS Christian Paul, à l'expiration du délai pour le dépôt d'une motion, fixé à 15h15. Il fallait 58 signatures minimum pour tout dépôt d'une motion de censure. Une seule a été adoptée sous la Ve République, en 1962, visant le gouvernement Pompidou.

Au lendemain d'un nouveau déclenchement express de l'arme constitutionnelle du 49-3 par le Premier ministre pour forcer l'adoption du texte, Front de Gauche et écologistes contestataires se montraient déterminés à transformer l'essai d'une censure. Tout reposait entre les mains des socialistes critiques d'une ligne gouvernementale jugée trop libérale.

Au bout du compte, 27 socialistes ou apparentés, dont les anciens ministres Benoît Hamon et Aurélie Filippetti, ont paraphé un texte de censure, un de moins qu'en mai, et quatre noms ont changé. Dix ex-écologistes, 13 élus Front de Gauche et ultra-marins, un radical de gauche, cinq non-inscrits, notamment ex-PS, ont signé. Le 49-3 confisque "le débat démocratique", et "comme une majorité des Français, nous nous sommes opposés aux risques graves d’atteinte à notre modèle social", ont redit les signataires.

Après cette nouvelle tentative avortée, une frondeuse PS lâchait: "Enrageant et écœurant... Plus dure sera la chute!". Mais "sans doute pas de +troisième saison+ fin juillet", "on va lasser", a glissé Laurent Baumel. A l'étude, "la possibilité de saisir le conseil constitutionnel", selon Christian Paul.

Le patron du PS Jean-Christophe "Cambadélis en a décroché 2-3" depuis mardi soir, affirmait un élu légitimiste. Le parti avait décidé que le dépôt - mais pas la simple intention de censure - vaudrait "sanctions", à savoir exclusion, à quelques mois d'une primaire et des législatives. Il y a eu "de grosses pressions", "aux investitures, à l'exclusion, aux subventions", a dénoncé le frondeur Pascal Cherki, au lendemain d'une réunion de groupe ayant viré au psychodrame.

Peu avant l'heure fatidique, Benoît Hamon "cherchait des soutiens devant l'ascenseur", selon une source à gauche. Mais nombreux étaient à ceux qui pensaient que les "frondeurs" ne franchiraient pas totalement la ligne jaune.

"Une nouvelle fois, le convoi s'arrête au Morbihan sans aller jusqu'à la Nièvre.... ", a twitté le président du groupe PS Bruno Le Roux, référence aux départements 56 et 58 (où est la circonscription de Christian Paul).

Le président des députés FG André Chassaigne s'est agacé: "en politique, à un certain moment, il faut faire acte de courage (...) même si on a sur la tête des menaces". "Le texte est aujourd’hui adopté avec la complicité de la droite, qui en approuve la philosophie", a déploré son groupe.

L'amertume était forte aussi chez certains socialistes légitimistes, "pris entre l'enclume des frondeurs et le marteau" de Manuel Valls. "On va rester dans le flou sur la ligne" ces prochains mois, déplorait-on.

Le rapporteur Christophe Sirugue avait présenté mardi une ultime proposition de compromis, avec compensations obligatoires en cas de baisse de la rémunération des heures supplémentaires par accord d'entreprise. "Le groupe aurait suivi", a-t-il estimé auprès de l'AFP. Mais cette proposition a été parasitée, selon lui, par un amendement sur les heures sup cosigné par près de 130 socialistes.

Manuel Valls et plusieurs responsables de la majorité ne voulaient surtout plus toucher un "texte de progrès social", "désormais équilibré". François Hollande a réclamé en Conseil des ministres plus de "pédagogie" sur la loi. Et le chef du gouvernement a admis que son gouvernement ne disposait plus que d'une "majorité relative" à l'Assemblée.

LR et UDI avaient décidé, cette fois, de ne pas chercher à censurer le gouvernement, pour cesser la "mascarade" et laisser la gauche dans son "champ de ruines", jusqu'en 2017. Une absence de l'opposition critiquée par François Bayrou (Modem), mais aussi par Nicolas Dupont-Aignan (DLF).

 

À LIRE AUSSI

Image
Des affrontements et des incidents ont eu lieu en marge de la manifestation contre la "Loi Travail" à Paris.
Loi Travail : les opposants étaient moins nombreux ce mardi à battre le pavé
Pour la dernière journée de mobilisation avant la trêve estivale, les opposants à la loi Travail étaient moins nombreux dans les rues. Le défilé parisien, entre place ...
05 juillet 2016 - 18:57
Politique
Image
Jean-Marie Le Guen.
Loi Travail : le texte ne bougera plus, prévient Le Guen
Jean-Marie Le Guen a assuré dans un entretien au "Monde", daté de mardi, que le gouvernement ne "dénaturera pas le projet" de loi Travail, quitte à passer à nouveau pa...
04 juillet 2016 - 21:18
Politique
Image
Les députés dans l'hémicycle.
Loi Travail : plus de 1.000 amendements déposés par les députés
Alors que le texte de la loi Travail doit de nouveau être étudié par l'Assemblée nationale à partir de mardi, les députés opposés au texte ont déjà préparé les débats ...
04 juillet 2016 - 19:48
Politique

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.