Polémique Brossat-Riolo : "le PCF a payé le prix du sang le plus important"

Auteur(s)
Maxime Macé
Publié le 22 mai 2019 - 17:45
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L'Affiche rouge.
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L'action du PCF au sein de la Résistance a été "incontestable, fondamentale et extrêmement importante" explique l'historien Sylvain Boulouque.
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Ian Brossat, candidat PCF aux élections européennes, et Daniel Riolo ont eu un vif échange mardi 21 dans l'émission des Grandes Gueules de RMC. Le second estimait que le Parti communiste avait collaboré avec les nazis pendant la Seconde Guerre mondiale. "Une erreur historique majeure" selon l'historien Sylvain Boulouque, joint par France-Soir.

Tête de liste aux Européennes pour le Parti communiste français, Ian Brossat était l'invité mardi de l'émission Les Grandes Gueules de RMC. L'actuel adjoint au logement de la mairie de Paris a eu un vif échange avec Daniel Riolo, journaliste sportif et éditorialiste pour la radio, au sujet du rôle du Parti communiste français pendant la Seconde Guerre mondiale.

Sur le plateau, Ian Brossat a expliqué ce qu'était pour lui le Parti communiste: "Le Parti communiste en France, qu'est-ce que c'est? C'est 36, les congés payés. C'est 45, un gouvernement auquel on participe avec le général De Gaulle qui met en place la sécurité sociale" déclare-t-il avant d'être coupé par Daniel Riolo. "C'est la collaboration avec les nazis", a lancé ce dernier débutant ainsi un échange brouillon avec le candidat aux Européennes très en colère face aux propos de son interlocuteur.

"On ne va pas avoir un débat historique. Le général de Gaulle a sauvé le Parti communiste après la guerre en l’intégrant au pouvoir décisionnel alors qu’il avait complètement collaboré", a poursuivi Daniel Riolo provoquant la colère de Ian Brossat.

Interrogé par France-Soir, le professeur Sylvain Boulouque, spécialiste du communisme et de l'anarchisme, a estimé que par cette déclaration Daniel Riolo avait commis "une erreur historique majeure". "Elle vient du fait qu'en juin 1940 au début de l'occupation allemande, les deux principaux dirigeants du PCF en France, à savoir Jacques Duclos et Maurice Tréand, ont tenté de faire reparaître L'Humanité, en vain", explique l'historien qui poursuit en expliquant "qu'il n'y a jamais eu en tant que tel de collaboration du Parti communiste. D'ailleurs le terme même de collaboration est postérieur à cet évènement puisqu'il est inventé par Philippe Pétain en octobre 1940".

"D'ailleurs, après l'épisode de L'Humanité, le PCF revient à sa ligne qu'il a adopté après la défaite française soit celle du défaitisme révolutionnaire. Le parti ne souhaite plus de la victoire du camp antifasciste défendu jusqu'alors et souhaite protéger les positions de l'Union soviétique", précise Sylvain Boulouque. Le PCF va tenir cette ligne jusqu'au 22 juin 1941 et le déclenchement de l'opération Barbarossa (invasion de l'URSS par l'Allemagne nazie), se lançant alors "à corps perdu dans la Résistance".

A partir de 1941, l'action du PCF au sein de la Résistance devient alors "incontestable, fondamentale et extrêmement importante". "En termes de nombre résistants et de sacrifices consentis à la cause, le parti communiste est celui qui a payé le prix du sang le plus important", tranche l'historien au regard du nombre de fusillés par l'occupant. Soit plus des deux tiers de 4.300 victimes avec des symboles comme Guy Moquet (exécuté comme otage), les 22 du groupe Manouchian, ou encore Jean Quarré. A ce chiffre s'ajoutent quelque 5.000 communistes massacrés dans des opérations de l'armée occupante sur le sol français.

Quant au chiffre de 75.000 fusillés brandi par Ian Brossat contre Daniel Riolo, il s'agit d'une "exagération utilisée la première fois par Maurice Thorez à la fin de la guerre. Ce chiffre ne veut pas dire grand-chose, il s'agit simplement d'un élément de propagande". "Je pense que Ian Brossat l'a utilisé sous le coup de la colère, je ne doute pas qu'il connaisse bien l'histoire de son parti et qu'il sait bien qu'il s'agit d'une exagération", souligne Sylvain Boulouque.

Les propos et les sarcasmes de Daniel Riolo ont provoqué de nombreuses réactions. La résistante Odette Nilès, internée dans plusieurs camps dont celui de Châteaubriant (Loire-Atlantique) après avoir été arrêtée lors d'une manifestation en 1941, a notamment écrit sur le site de L'Humanité "Comment avons-nous pu en arriver à cela aujourd'hui, comment certains peuvent-ils parler d'un temps qu'ils n'ont pas vécu avec autant de mépris ou de raccourcis?", avant d'affirmer que "le négationnisme commence toujours ainsi: par un rire, par une moquerie."

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