Présidentielle : Macron-Le Pen même combat ? En 2002 déjà la gauche se pinçait le nez pour voter Chirac

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Pierre Plottu
Publié le 28 avril 2017 - 15:02
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Jacques Chirac a été pendant un quart de siècle la marionnette politique la plus connue des Guignols.
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Au second tour de la présidentielle de 2002 Jacques Chirac recueillait 82% des suffrages contre Jean-Marie Le Pen. Un score que ne semble pas parti pour renouveler Emmanuel Macron.
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Le "ni-ni" théorisé par Nicolas Sarkozy fait des émules parmi les électeurs de gauche, dont une partie se refuse à voter Macron, même face à Marine Le Pen, au second tour de la présidentielle le 7 mai prochain. En 2002 pourtant, une large majorité avait voté Chirac contre Le Pen père. Le sortant faisait déjà figure de repoussoir.

Premier tour de l'élection présidentielle, 21 avril 2002 à 20h: c'est le choc. Sur toutes les chaînes s'affichent les visages de Jacques Chirac mais surtout de Jean-Marie Le Pen. Le Front national et son président récidiviste de la haine raciale sont qualifiés pour le second tour d'une élection présidentielle. La gauche et Lionel Jospin sont éliminés, de peu mais avec fracas. Immédiatement la levée de bouclier est large dans le monde politique, la société civile et la population avec à l'arrivée un score de dictateur africain pour Jacques Chirac -dont il ne fit rien- grâce notamment à la forte mobilisation des électeurs de gauche. Alors, quinze ans plus tard, rebelote? Non, et sur tous les tableaux.

L'accueil du résultat tout d'abord. Marine Le Pen est au second tour et pas de grande manifestation, pas de choc particulier -la qualification de Macron ou le score de Mélenchon ont presque plus été commentés. Les syndicats ne parviennent pas à s'entendre sur un mot d'ordre unitaire pour défiler le 1er mai, ni pour un rassemblement commun. La société civile se fait discrète, les artistes majoritairement muets. Il n'y a guère que les hommes politiques, de droite comme de gauche pour sembler prendre la mesure de ce 21 avril partagé (PS et LR sont tous deux hors course et en ruine). Annoncée depuis des mois, des années même, la qualification du Front national a ainsi été accueillie avec indifférence. On s'habitue à tout visiblement.

Les chiffres, ensuite. Les uns et les autres semblent déjà se positionner pour "l'après", se consacrer au troisième tour de la présidentielle que sont devenues les élections législatives. Qui pour mener la droite les 11 et 18 juin? Quel avenir pour Mélenchon? Quelle majorité pour Macron? Sauf que ce dernier n'est pas encore élu.

Et si les sondages le donnent vainqueur au soir du second tour du 7 mai prochain, son avance s'étiole. Parti avec 62% des intentions de vote au soir du 23 avril, Emmanuel Macron attire désormais 59% des sondés. Des scores élevés mais sans commune mesure avec les 82% de Jacques Chirac en 2002. Surtout, la tendance est à la baisse, inquiétant car la politique n'est pas une affaire de mathématiques mais de dynamique, pour paraphraser Marine Le Pen sur TF1, mardi 25.

A droite les reports de voix se font majoritairement, mais pas unanimement, pour le candidat En Marche. A gauche, où le combat contre le racisme et l'extrême droite sont des marqueurs historiques, la tergiversation domine: nombreux sont ceux qui n'ont pas voté pour lui dimanche et qui se refusent à glisser un bulletin Macron dans l'urne. Ou hésitent. L'abstention et le vote blanc s'immiscent ainsi dans les débats, notamment dans les rangs de la France insoumise de Mélenchon. Ce serait faire le jeu du FN? "Fi!", répondent les insoumis, reprenant de fait le "ni-ni" théorisé par Nicolas Sarkozy.

En 2002 pourtant, voter Chirac était déjà un traumatisme pour l'électorat de gauche. Lionel Jospin lui-même avait attendu cinq jours avant d'appeler les électeurs à "exprimer par leur vote leur refus de l'extrême droite", sans citer Jacques Chirac. Certains électeurs s'étaient mis en scène avec des gants ou autres pinces à linge sur le nez pour exprimer leur dégout d'un vote "en se bouchant le nez". Mais la peur et le rejet de l'extrême droite avaient au final été les plus forts.

Jacques Chirac était pourtant le candidat du libéralisme, héritier de la droite des charters pour reconduire à la frontière ces immigrés dont "le bruit et l'odeur", selon la fameuse expression du Discours d'Orléans (juin 1991), rendaient "fou" les Français. Le président de l'évacuation de l'église Saint-Michel aussi, ou encore de la réforme des retraites -avortée sous la pression de la rue-, du plafonnement des salaires des fonctionnaires, de la réduction des déficits à marche forcée, de la reprise des essais nucléaires... Une "vraie droite", en somme. Dont le programme est sans commune mesure avec celui d'Emmanuel Macron.

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