Syrie : l'armée turque donne l'assaut contre l'enclave kurde d'Afrin, le coup de poker d'Erdogan
C'est une opération militaire à hauts risques que vient de lancer l'armée turque, appuyée par des rebelles syriens proches d'Ankara, contre l'enclave kurde d'Afrin dans le nord de la Syrie. Dimanche 21, une offensive terrestre et aérienne a été lancée contre cette région aux mains des YPG, composante militaire du PYD, l'un des principaux partis kurdes syriens, alors que les bombardements aériens ont commencé samedi.
Des milliers de combattants syriens, alliés du régime de Recep Tayyip Erdogan, participent à cette attaque, baptisée "Rameau d'olivier", où ils sont appuyés par l'aviation et les forces spéciales turques. Il s'agit de la seconde offensive turque en Syrie après celle de 2016, "Bouclier de l'Eurphrate", contre des positions tenues au nord de la Syrie par l'organisation Etat islamique et les Forces démocratique syriennes (FDS) dont le YPG est une composante majeure. Cette offensive avait abouti à la prise de la ville d'al-Bab des mains des djihadistes de l'EI après de rudes combats.
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Si cette opération avait pour but de lutter contre l'organisation salafiste, elle visait également à empêcher les Kurdes d'effectuer une jonction entre l'enclave d'Afrin et le reste du Rojava (territoire kurde autonome en Syrie, situé le long de la frontière turque).
Les raisons de cette nouvelle opération militaire turque viennent notamment de la décision américaine, à la mi-janvier, d’entraîner et d’équiper une force de 30.000 hommes en Syrie, dont les membres seraient majoritairement affiliés au YPG. Craignant que ces groupes ne s'implantent durablement aux portes de son pays, Recep Tayyip Erdogan avait menacé de "tuer dans l'œuf cette armée terroriste". En effet, La Turquie accuse les YPG d'être la branche en Syrie du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), une organisation qui mène une sanglante guérilla sur le sol turc depuis 1984. Ankara considère que des livraisons d'armes sont faîtes depuis la Syrie aux membres du PKK. La Turquie souhaite avec cette opération veut empêcher la constitution d’une entité kurde en continu le long de sa frontière.
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Alors que l'offensive entre ce lundi dans son troisième jour, les rebelles pro-turcs ont assuré avoir pris le contrôle de plusieurs villages et positions stratégiques sur des hauteurs dans la région d'Afrin. Selon l'Observatoire syrien des droits de l'homme (OSDH), 18 personnes, pour la plupart des civils, ont été tuées dans les bombardements turcs depuis samedi. Ankara affirme n'avoir touché que des "terroristes" et accuse les YPG de "propagande".
En lançant samedi l'offensive, le président Recep Tayyip Erdogan a pris le risque de provoquer la colère de son allié américain, qui soutient activement les FDS, mais les premières de Washington étaient mesurées. Les Etats-Unis n'ont pas officiellement condamné l'offensive mais ont appelé la Turquie à mener une opération "d’une portée et d’une durée limitées".
La France a adopté un ton plus ferme en exhortant Ankara à mettre fin à son offensive et en réclamant une réunion d'urgence du Conseil de sécurité de l'ONU, qui doit se tenir lundi à huis clos.
Du côté de la Russie, allié indéfectible du régime syrien, la réaction été nettement plus faible puisque Moscou, qui soutient pourtant les YPG, a donné un blanc-seing à l'intervention d'Erdogan en retirant ses soldats, plusieurs centaines, qui se trouvait dans l'enclave d'Afrin.
En Turquie, des protestations sur les réseaux sociaux contre cette opération ont éclaté. Et selon les médias locaux, elles ont été suivies d'arrestations d'une quarantaine de personnes, dans la nuit du dimanche à ce lundi. Les manifestations de soutien aux Kurdes syriens ont également été interdites.
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