Comment Sergueï Pougatchev a sombré
Banquier, chef d'entreprise milliardaire, oligarque déchu, voyou en fuite… Sergueï Pougatchev, 51 ans, a côtoyé les plus puissants hommes de Russie avant de sombrer. Ce mercredi 26, il a été placé sur la liste des personnes recherchées par Interpol. On sait peu de chose sur sa personnalité. Derrière sa barbe, symbole de sa proximité avec l'Eglise orthodoxe, Sergueï Pougatchev se montre très discret et fuit médias. Une réserve qui tranche avec l'image des nouveaux oligarques russes affichant sans complexe leur fortune et leur réseau.
Diplômé de l'université de Leningrad (actuelle Saint-Pétersbourg), il y fonde sa première banque en 1990. Il y rencontre un certain Vladimir Poutine, conseiller du maire de la ville à l'époque. Il fréquente aussi le président Boris Eltsine et sa famille. Sa nouvelle banque, la Mejprombank (ou IIB) deviendra celle des services généraux de la présidence russe. On le surnomme depuis "le banquier du Kremlin" ou plus récemment "le banquier de Poutine".
C'est en 1999 que Sergueï Pougatchev commence à faire des affaires en France. Il rachète une entreprise de limousines monégasque qu'il développe également à Nice. L'élection de Vladimir Poutine en 2000 lui ouvre la voix du Sénat mais aussi du marché de l'énergie, de l'aéronautique et de la construction navale, secteurs ou la proximité avec le pouvoir est précieuse voire indispensable en Russie. Ce sont d'ailleurs ses chantiers qui seront un temps pressentis pour la constriction des navires Mistral. Il s'attaque aussi au marché du luxe via une holding basée au Luxembourg. C'est elle qui rachètera l'épicerie fine Hédiard en 2007. Quatre ans plus tard, alors que la valeur de la société est en chute libre, il en confie la gérance à son fils Alexandre, 26 ans à l'époque, et à qui il avait déjà "offert" France-Soir en 2009. Alexandre Pugatchev s'en retirera en 2012.
La fin des années 2000 marque le début des ennuis pour Sergueï Pougatchev. On le dit alors en froid avec Vladimir Poutine. La Mejprombank sert surtout à l'époque à octroyer des fonds aux entreprises de l'empire Pougatchev. Les rumeurs de tromperies des clients et des investisseurs se font de plus en plus persistantes alors que la crise plombe les affaires de l'oligarque. Sa banque fait faillite en 2010.
C'est cette année-là, selon les autorités russes, qu'il aurait définitivement franchi la ligne jaune qui lui a valu la liste rouge d'Interpol. Poursuivi pour escroquerie, il aurait détourné les fonds (environ un milliard d'euros) que lui a versé la banque centrale russe pour faire face à la crise. Exilé, il se cache depuis (probablement en Europe) de la justice russe qui a ordonné son arrestation en 2013. En 2014, il s'était exceptionnellement exprimé dans le Financial Times. Il y décriait les relations "militaires" entre le pouvoir russe et les hommes d'affaires, réduits à l'état de "serfs" de Vladimir Poutine.
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