A deux semaines des législatives anticipées, le Portugal prévoit l’expulsion de 18 000 étrangers en situation irrégulière

La question de limmigration s’invite aussi au Portugal. À l’approche des élections législatives anticipées, prévues le 18 mai prochain, le gouvernement intérimaire a annoncé son intention d’expulser environ 18 000 étrangers en situation irrégulière. Tout comme un certain Olaf Scholz en Allemagne, le Premier ministre Luis Montenegro, accusé de conflit d'intérêt et dont le gouvernement minoritaire a chuté en mars dernier, moins d’un an après sa formation, tente de s’approprier un thème central du prochain scrutin, qui promet encore une course serrée et un Parlement une nouvelle fois sans majorité.
Élu Premier ministre en mars 2024 après la victoire de son parti, le Parti social-démocrate (PPD/PSD), Luís Montenegro et sa formation sont arrivés en tête sans obtenir de majorité absolue, ce qui l’a conduit à former un gouvernement minoritaire avec ses alliés, tout en refusant une alliance avec le parti nationaliste Chega.
Soupçons de conflit d’intérêt et rejet de la motion de confiance
En février dernier, un média révèle que l’épouse et les enfants de Luís Montenegro sont associés dans Spinumviva, une société d’achat et de vente de biens immobiliers créée par le Premier ministre début 2021. Cette société pourrait bénéficier d’une modification de la loi foncière alors en discussion au Parlement, ce qui soulève des soupçons de conflit d’intérêt. Luís Montenegro, qui avait quitté la gestion de Spinumviva à l’été 2022 après être devenu président du PSD, affirme que l’entreprise ne mène pas d’activité immobilière liée à cette loi et que sa participation a été transférée à sa femme, devenue actionnaire majoritaire, et à ses enfants.
Dans la foulée, André Ventura, leader de Chega, annonce une motion de censure contre le gouvernement, dénonçant ce possible conflit. Fin février, un autre média révèle que Spinumviva perçoit une redevance mensuelle de 4 500 euros de Solverde, un groupe d’exploitation de casinos soumis à des concessions d’État, ce qui renforce les accusations.
Face à ces révélations et la pression, Montenegro convoque un Conseil des ministres extraordinaire le 1ᵉʳ mars, annonce que la société sera désormais gérée uniquement par ses enfants, et menace de déposer une motion de confiance. Le 11 mars, le Parlement rejette la motion de confiance demandée par Montenegro. Une large majorité des députés, y compris ceux du Parti socialiste, de Chega et de l’extrême gauche ont voté contre comme ils l’avaient promis, marquant la première défaite d’un gouvernement au Parlement portugais depuis 1977
Suite à cet échec, Luís Montenegro a présenté sa démission, et le président de la République, Marcelo Rebelo de Sousa, a décidé de convoquer des élections législatives anticipées.
La campagne bat son plein au Portugal à deux semaines du scrutin et les débats, vifs, concernent aussi bien la gestion économique, la récente méga-panne d’électricité, mais surtout l’immigration, un thème jusque-là porté, et depuis des années, par Chega. Pour ces législatives, le gouvernement décide de prendre des mesures fortes.
Un système “qui ne fonctionne pas”
António Leitão Amaro, ministre de la Présidence, a déclaré samedi que le gouvernement de centre-droit enverrait environ 18 000 notifications aux migrants illégaux et connus des autorités pour leur demander de partir. L’opération débute dès la semaine prochaine avec 4 500 sans-papiers, qui seront conviés à partir dans un délai de 20 jours.
António Leitão Amaro avait déclaré la semaine dernière que "le Portugal doit revoir son système d'expulsion, qui ne fonctionne pas". "Il est important de réaliser que le Portugal est l'un des trois pays d'Europe qui exécute le moins d'expulsions de personnes ayant reçu l'ordre de partir pour avoir enfreint les règles, y compris pour des raisons de sécurité", a-t-il déclaré.
Depuis septembre 2024, le gouvernement a tenté de mettre en place un nouveau système visant à renforcer le contrôle et l’expulsion des migrants en situation irrégulière. Ce dispositif prévoit la création d’une unité nationale des étrangers et des frontières intégrée à la police nationale (PSP), chargée notamment du contrôle aérien des frontières, de l’application des lois sur l’immigration, ainsi que des expulsions et des rapatriements. Ce système a été conçu pour pallier les défaillances apparues après la suppression en octobre 2023 du Service des étrangers et des frontières (SEF), dont les missions ont été transférées à la police.
Mais le projet a rencontré une forte opposition au Parlement. Le refus parlementaire a freiné la mise en œuvre complète du nouveau dispositif, obligeant le gouvernement intérimaire à recourir à d’autres mesures administratives, comme l’envoi massif de ces notifications d’expulsion.
Lors du scrutin de l'année dernière, Chega a obtenu le meilleur score pour un parti en troisième position dans l'histoire récente du Portugal. Ce parti affirme que des sondages sur les réseaux sociaux le déclarent vainqueur pour ce scrutin tandis que les intentions de vote, selon les sondages institutionnels, iraient à hauteur de 30 % à l’alliance au pouvoir AD, à hauteur de 27 % pour le Parti socialiste et à hauteur de 15 % pour le parti Chega.
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.