Séisme politique à Marseille : la maire Michèle Rubirola démissionne en "femme libre"

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Par Julie PACOREL avec Baptiste BECQUART à Paris - Marseille (AFP)
Publié le 15 décembre 2020 - 17:00
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Première femme maire de Marseille, Michèle Rubirola a annoncé mardi sa démission, avançant des raisons de santé et souhaitant que son premier adjoint socialiste, Benoît Payan, devienne "l'urgentiste" d'une ville engluée dans une triple crise.

"J'ai pris la décision de quitter mes fonctions de maire de Marseille", a annoncé, déterminée, Mme Rubirola à l'hôtel de ville, moins de six mois après son élection sur une liste d'union de la gauche inédite, le Printemps marseillais, qui avait mis fin à 25 ans de règne de la droite.

"J'ai connu dès l'été les premières difficultés liées à ma santé. (...) Ces épreuves (de santé) limitent l'énergie que je peux mobiliser. Etre maire de Marseille c'est 300% de son temps, j'en donne 150%", a-t-elle expliqué, soulignant les défis immenses dans une des villes les plus pauvres de France où se conjuguent crises sanitaire, sociale et financière.

Michèle Rubirola, médecin dans les quartiers populaires, quasi-novice en politique, avait été préférée à Benoît Payan, "apparatchik" du PS, pour rassembler la coalition de gauche hétéroclite du Printemps marseillais (Parti socialiste, Parti communiste, une partie des Insoumis, Ecologie-les Verts).

Membre d'EELV, elle avait été suspendue du parti pendant la campagne avant que les écologistes ne rejoignent le Printemps marseillais au deuxième tour.

Aujourd'hui, l'élue souhaite que Benoît Payan devienne maire et elle première adjointe: "Nous formons un binôme et je souhaite que notre binôme continue mais s'inverse".

- "Cohérente" -

L'élection d'un nouveau maire sera décidée par le conseil municipal, qui doit être convoqué sous quinzaine selon la loi. Le vote, qui pourrait se tenir lundi, reste un exercice périlleux pour la nouvelle majorité de gauche.

En juillet, en raison de la loi PLM (Paris-Lyon-Marseille) obligeant à un vote par secteur dans ces trois villes, l'élection de Mme Rubirola s'était jouée au "troisième tour", c'est-à-dire au conseil municipal, au terme de multiples rebondissements.

Le Printemps marseillais avait finalement réussi à s'assurer du soutien de la liste de gauche concurrente conduite par Samia Ghali, figure des quartiers populaires de la ville. Mais qu'en sera-t-il cette fois-ci? "Pour le moment je réserve mon expression", a fait savoir l'ex-socialiste à l'AFP, qui a été consultée par la maire, assurent plusieurs adjoints.

"C'est un changement de rôles dans une équipe qui a une grande cohésion, assure à la presse Jean-Marc Coppola, adjoint à la culture et chef de file du Parti communiste. Je salue le courage de Michèle Rubirola pour cette décision qu'aucun homme n'aurait prise". Mme Rubirola a assuré faire "le choix d'une militante et d'une femme libre".

"On regrette que ça se passe comme ça, de voir dans quelle situation personnelle ça la mettait, elle a toujours dit que le pouvoir n'était pas personnifié, elle est cohérente", assure Marie Batoux, adjointe à l'urbanisme.

- "Faire rire la France" -

L'opposition, elle, a réagi très vivement à la démission de la maire. "Ce soir j'ai mal pour Marseille", a déclaré dans une vidéo sur Twitter la principale rivale de Mme Rubirola lors de l'élection, Martine Vassal, présidente LR du département des Bouches-du-Rhône et de la métropole d'Aix-Marseille, annonçant que sa "famille politique" allait se réunir "pour prendre ensemble des décisions".

Interrogé par l'AFP, le président de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur Renaud Muselier a fait état de son "incompréhension totale". "C'est du jamais vu (...) on va faire rire la France entière encore une fois", a réagi l'homme fort de la droite.

La députée Claire Pitollat (LREM) a dénoncé sur Twitter un "déni de démocratie", demandant comme le conseiller municipal Stéphane Ravier RN le retour aux urnes des Marseillais.

"Je me sens flouée", lâche Sandrine, militante du Printemps marseillais, rencontrée sur le Vieux-Port. "Payan ce n'était pas le choix qu'on avait fait collectivement", ajoute cette fonctionnaire, qui à ce titre préfère taire son nom de famille.

Depuis ses débuts à la mairie, Mme Rubirola s'est mise en retrait à plusieurs reprises, notamment pour raisons de santé. Mal à l'aise face aux caméras, de son propre aveu, elle laissait souvent la place à son premier adjoint.

La démission du maire d'une grande ville en cours de mandat - hormis nomination à de plus hautes fonctions - n'est pas une première mais est en général liée à une mise en cause par la justice, comme l'ancien maire de Bordeaux Alain Juppé qui avait dû renoncer à ses fonctions électives en 2004 après sa condamnation dans l'affaire des emplois fictifs de la mairie de Paris.

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