Autorisée pendant le confinement, la chasse est-elle vraiment écolo ?

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FranceSoir
Publié le 02 novembre 2020 - 13:41
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La justice a débouté jeudi des chasseurs qui avaient porté plainte contre le cinéaste Luc Besson en l'accusant de laisser proliférer sur sa propriété de l'Orne des cerfs au détriment des champs voisin
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© GUILLAUME SOUVANT / AFP/Archives
Certains chasseurs pourront chasser pendant le confinement de novembre 2020
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Si les dispositions plus précises sont encore attendues, les chasseurs ont reçu la confirmation qu'ils pourront chasser durant ce confinement. Car, arguent le gouvernement et les pro-chasse, le mois de novembre est un temps fort pour la régulation des espèces. Mais la chasse est-elle vraiment écolo ?

Les chasseurs bénéficieront d’une dérogation pour pouvoir s’adonner à leur loisir favori pendant ces semaines de confinement. Le communiqué du ministère de la Transition écologique vient donc rassurer les nombreux intéressés (la France compte 1 million de chasseurs). Mais, précise la secrétaire d’État chargée de la diversité Bérangère Abba, il s’agit avant tout « d’éviter un accroissement des dégâts faits aux cultures, aux forêts et aux biens par une prolifération des populations de grand gibier comme les sangliers ou les chevreuils. » Ce serait donc « uniquement à cette fin et sur demande de l’autorité administrative que des actions de chasse pourront avoir lieu dans les prochaines semaines ».

Régulation des espèces et gibier d'élevage
L’argument fait évidemment bondir de nombreux écologistes qui réfutent la vertu régulatrice de la chasse. Officiellement, les chasseurs français tueraient chaque année 22 millions d’animaux. Mais, selon Pierre Rigaux, naturaliste et auteur de l’essai « Pas de fusil dans la nature », sorti en septembre 2019, ce chiffre est bien en-deçà de la réalité : il ne tient pas compte des dégâts causés sur une trentaine d’espèces (marmotte, mouflon, lièvre variable, tétras lyre) ni des animaux tués par piégeage notamment. En réalité, les chiffres seraient « deux à trois fois plus élevés si l’on tient compte des animaux blessés, non retrouvés et donc non décomptés », estime Pierre Rigaux dont les propos ont été récemment repris par le magazine WeDemain. Sans oublier que, chaque année en France, 14 millions de faisans, 5 millions de perdrix grises et rouges, 1 million de canards colverts, 40 000 lièvres et 100 000 lapins de garenne notamment sont élevés pour être lâchés dans la nature… et chassés dans la foulée. S’ils survivent au fusil, ils meurent rapidement, incapables de s’adapter à la vie à l’état sauvage.

A lire aussi : La surpopulation de sangliers, une situation devenue ingérable ?

Les chasseurs et la communication "verte"
Si la régulation des espèces nuisible est incontestablement nécessaire pour préserver les cultures notamment, Pierre Rigaux dénonce également ces actions de communication qui tendent à « verdir » la chasse. En 2018, les membres de la Fédération nationale des chasseurs se déclaraient « premiers écologiques de France, ceux qui contribuent le plus fiancièrement, socialement et scientifiquement à la biodiversité ». Des actions menées, pour l'essentiel, grâce aux subventions versées par l’état aux fédérations régionales et départementales des chasseurs… Actions qui pourraient être menées par des associations écologistes (sans tuer d’animaux, donc) si elles aussi bénéficiaient des fonds en question, arguent les écologistes.

Les chasseurs ont l'oreille des politiques
Mais c’est un fait : les chasseurs ont, depuis toujours, l’oreille des politiques. Alors qu’ils ne représentent qu’1,7% de la population, ils bénéficient de l’appui de 115 députés (membres du groupe d’étude « Chasse et territoires » à l’Assemblée nationale) et de 72 sénateurs au sein du groupe Chasse et pêche. Ce sont donc, respectivement, les troisième et deuxième groupes d’études les plus fréquentés par nos parlementaires. Les chasseurs ont aussi le soutien du président de la République qui leur a offert la réforme de la chasse en juillet 2019. Et leur a notamment fait cadeau de la baisse du prix du permis de chasse national, passé de 400 à 225 euros… pour encourager les nouvelles adhésions et le renouvellement générationnel. Le geste avait particulièrement crispé Nicolas Hulot qui avait, au même moment, annoncé sa démission du gouvernement.

A lire aussi : La chasse à l'arc, une pratique ancestrale, écologique mais cruelle

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