Glyphosate : une réautorisation en Europe faussée par certaines études ?

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FranceSoir
Publié le 09 juillet 2021 - 16:49
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Un agriculteur français pulvérise du glyphosate dans un champ à Saint Germain-Sur-Sarthe (Sarthe) le 16 septembre 2019
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© JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP/Archives
Un agriculteur pulvérisant du glyphosate dans ses champs
© JEAN-FRANCOIS MONIER / AFP/Archives

Alors que le glyphosate pourrait à nouveau être autorisé en Europe à partir décembre 2022, deux toxicologues pointent les défaillances de certaines études portant sur la génotoxicité du pesticide, et sur laquelle se basent les autorités européennes pour rendre leur verdict.

Des études aux conclusions divergentes

Les autorités européennes chargées de rétablir l’homologation du glyphosate se sont-elles fait berner par Bayer ? C’est ce qu’avancent deux toxicologues de renom, Siegfried Knasmueller et Armen Nersesyan, chercheurs à l’Institut de recherche sur le cancer du Centre hospitalo-universitaire de Vienne (Autriche). Alors que la Commission européenne planche actuellement sur une probable réautorisation du glyphosate, dont l’homologation provisoire prendra fin en décembre 2022, les deux chercheurs affirment que les 53 études sur lesquelles se basent les autorités ne remplissent pas les critères de conformité attendus. « Parmi ces études, quelques-unes sont acceptables, mais la majorité sont un désastre », affirme le professeur Siegfried Knasmueller, cité par Le Monde. « Je me demande comment elles ont pu être considérées comme acceptables par les autorités sanitaires. »

L’origine du litige autour de la toxicité du célèbre herbicide de Bayer remonte à 2015, lorsque le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), qui est la principale autorité de classification des agents cancérogènes dans le monde, a classé le glyphosate comme « cancérogène probable ». Ce qui n’est pas le cas des agences réglementaires en Europe et aux Etats-Unis. Contrairement au CIRC, qui estime qu’il existe des « preuves fortes » de sa génotoxicité, les deux agences considèrent que de telles affirmations n’existent pas.

Plusieurs études commanditées par Bayer

Comment expliquer une telle divergence sur la dangerosité du glyphosate pour la santé humaine ? Il faut se pencher sur la nature des travaux examinés par les différentes instances. Alors que le CIRC a basé ses conclusions sur l’ensemble de la littérature scientifique disponible, les agences nationales de sécurité sanitaires ont fondé leur expertise sur les études confidentielles fournies par Bayer lui-même, considérant que les études industrielles fournies par la firme sont plus fiables que les travaux académiques.

« Ces tests sont menés par des laboratoires privés qui sont sous contrat avec les firmes agrochimiques, avance le toxicologue Helmut Burtscher. La question de savoir à quel point ces tests réglementaires sont fiables s’est particulièrement posée en 2019 avec la révélation que l’un de ces laboratoires s’était livré à des fraudes systématiques. Or il avait produit certains des tests d’évaluation de la génotoxicité du glyphosate. »

Le problème est que ces études commandées par Bayer contiennent la propriété intellectuelle de la firme agrochimique et donc confidentielles. En mars 2019, un arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne autorise les agences nationales de sécurité sanitaires à les consulter, mais pas à en divulguer le contenu. Elles doivent donc publier leurs propres conclusions, qui recevront en septembre prochain les avis de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) et l’Autorité européenne de sécurité des aliments (EFSA). Une consultation publique sera également lancée à l’automne sur le sujet.

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