Le "parcours du combattant" des communes contre les fuites d'eau

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France-Soir, avec AFP
Publié le 17 mai 2023 - 13:05
Cet article provient directement de l'AFP (Agence France Presse)
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Pont du Gard en Provence
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Pont du Gard (partie monumentale d'un aqueduc romain), situé au pied d'Uzès, près de Nîmes.
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DÉPÊCHE — En France, un litre d'eau potable sur cinq est perdu dans les fuites. Une situation "inacceptable" pour Emmanuel Macron et bon nombre d'élus. Mais le défi, notamment financier, s'avère de taille pour certaines collectivités qui tentent de s'organiser avant le retour des sécheresses estivales.

Dans l'Ain, "on avait fait le constat que le taux de renouvellement des canalisations était insuffisant, et surtout que les plus petits syndicats et les communes isolées avaient du mal à faire face aux travaux, donc elles ne les faisaient pas", note Jean-Yves Flochon, vice-président du conseil départemental, qui a décidé d'augmenter ses aides pour inciter à résorber les fuites.

"100 ans pour tout changer"

"Aujourd’hui on doit renouveler à peu près 1% des canalisations par an. Donc (si on reste à ce rythme), il faudra 100 ans pour tout changer", d'où la nécessité d'accélérer, explique l'élu.

Fin mars, le gouvernement a annoncé un "Plan eau" comprenant 180 millions d'euros annuels pour aider les communes les plus vulnérables à résoudre le problème, "fruit d'un sous-investissement historique" dans les réseaux, dont la majorité date des années 60.

Parmi les 170 "points noirs", où les taux de fuites sont supérieurs à 50%, la commune corse de Rutali a lancé les rénovations en 2007-2008, mais "c’est un parcours du combattant" et "ça coûte excessivement cher", affirme son maire Dominique Maroselli.

"Il faut avoir la foi. Le plan eau, c’est très bien, mais rendez-vous compte : 180 millions d'euros, 2 000 communes, faites le calcul ! La démarche est bonne, mais ça ne fait pas beaucoup".

"Quand on fait une tranchée de 100 mètres, c’est le même coût qu'en milieu urbain, mais au bout, on n’a que trois abonnés", souligne Charles Chivilo, président de la communauté de communes d’Agly-Fenouillèdes (Pyrénées-Orientales), où le réseau doit alimenter 6 500 habitants répartis sur 24 communes.

En 2020, le volume total des fuites en France représentait près de 937 millions de m3, soit la consommation annuelle d’environ 18 millions d’habitants, selon l'administration.

Les causes sont multiples : âge des canalisations, corrosion, vieillissement des joints, types de raccordement aux maisons... Et la sécheresse qui aggrave les fuites en détériorant les sols, indique Veolia, l'un des principaux gestionnaires de l'eau en France.

Robot et chiens

"La canicule de l'an dernier a généré une demande d'innovation et de solution des collectivités qui veulent éviter d'avoir à imposer des restrictions d'usage", indique l'entreprise qui a mis en place des surveillances des fuites via des capteurs sonores et... des chiens renifleurs.

De leur côté, les communes tentent de réagir chacune à sa manière.

La métropole lyonnaise a repris en main la gestion de l'eau, longtemps confiée au privé : "Aujourd'hui, 15% de l'eau distribuée disparaît dans les sols, soit 33 000 litres chaque jour", indique la collectivité qui prévoit de "remplacer chaque année une quarantaine de kilomètres sur les 4 100 du réseau".

À Alès (Gard) et Saint-Paul-de-Tartas (Haute-Loire), des travaux sont en cours.

Une opération "délicate", notamment pour la circulation en centre-ville, et coûteuse (cinq millions d'euros), mais "indispensable" car 60 000 m³ s'échappent chaque année de l'ancien réseau qui court sous la chaussée, souligne la commune gardoise.

Même constat à Saint-Paul-de-Tartas, 190 habitants : "Nous nous sommes rendus compte au fur et à mesure de la vétusté de l’ancien réseau datant de 1966 qui lâchait, avec beaucoup de fuites diffuses. Si nous n’avions pas anticipé, nous serions aujourd’hui contraints d'alimenter certains foyers par citernage", explique la maire Marie-Laure Mugnier. Elle a dû recourir à l'emprunt et augmenter les factures d'eau pour trouver une partie du 1,2 million d'euros nécessaire.

D'autres misent sur la technologie. Suresnes (Hauts-de-Seine) a effectué en 2022 un diagnostic de ses canalisations, posées entre 1925 et 1957, via un robot, le PipeDiver de la société Xylem.

Malgré un faible taux de fuite (8%) et "même si la durée de vie des canalisations peut atteindre jusqu'à 100 ans, il faudra le moment venu envisager leur renouvellement", et "compte tenu de l’ampleur des travaux et des montants financiers en jeu" (20 millions d'euros), il est important "de programmer au mieux ces renouvellements", explique Sénéo, l'un des syndicats gestionnaires de l'eau dans l'ouest parisien.

Ce diagnostic a toutefois un coût élevé (600 000 euros). Toutes les communes ne pourront pas se l'offrir.

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