1 million de jeux pour les enfants réfugiés : la belle initiative d'une petite entreprise de Montpellier

Auteur(s)
Pierre Plottu
Publié le 14 décembre 2017 - 09:29
Image
L'initiative Bioviva For Life a besoin de dons.
Crédits
©Bioviva
Bioviva For Life veut lever 500.000 euros pour fabriquer et distribuer 1 million de jeu pour les enfants réfugiés.
©Bioviva
Hanté par les images d'enfants réfugiés qui ont fui la guerre, un entrepreneur montpelliérain a décidé de prendre le taureau par les cornes et d'aider à son niveau. Le pari un peu fou de cet entrepreneur: fabriquer et distribuer un million de jeux de société éducatifs à ces gosses dont l'enfance a été volée par la violence des adultes, explique-t-il à "France-Soir". Il a besoin pour cela de 500.000 euros et lance un appel au don

Tout part de la volonté d'un homme. Jean-Thierry Winstel, patron de Bioviva, une petite PME montpelliéraine spécialisée dans les jeux de société, voulait aider a son niveau ces millions de gamins réfugiés dont les images hantent les JT. Mais comment? L'idée lui est venue une nuit, raconte-t-il à France-Soir en rendant à ces gosses une partie de leur enfance, volée par la violence des adultes, grâce à son métier. L'entrepreneur se lance donc un défi, celui d'arriver à fabriquer et distribuer un million de jeux aux enfants réfugiés.

Futile? Pas selon l'entrepreneur qui se base sur la pyramide de Maslow (lien). "Dans les camps, la base de la pyramide, les besoins physiologiques et de sécurité, sont au cœur des préoccupations. Mais quid des autres étages? Des besoins d'accomplissement, d'estime et de s'accomplir?", explique-t-il avec son léger accent montpelliérain. Or c'est justement l'objectif des jeux que développe sa société, contribuer à l'épanouissement des enfants et leur socialisation via des activités de groupe.

Sauf que sa PME, spécialisée dans les jeux de société éco-responsables éducatifs et de sensibilisation à la nature, n'a aucune expérience en matière d'humanitaire. Et, bien que florissante, ne dispose pas du budget colossal que demande une telle opération.

Lire aussi: Un réfugié syrien de 16 ans demande au monde de lui "donner une chance"

Jean-Thierry Winstel décroche son téléphone. Première étape, appeler l'imprimeur avec qui il travaille depuis des années pour lui proposer l'idée. Banco! Graphot, c'est le nom de la société, le suit. Le projet prend corps. Grâce la gouaille et la détermination communicatives de Jean-Thierry Winstel, très vite un groupe d'entreprises et de volontaires se forme.

Outre Graphot, le papetier Arjowiggins Creative Papers, les agences de communication Kaliop et Entre nous soit dit, le spécialiste des annuaires de sociétés Kompass, les ingénieurs informatiques d'Ip Stream et de Solutrek, les spécialistes de la lutte contre le gaspillage alimentaire Excellents Excédents forment le noyau dur de la mobilisation. Tous travaillent bénévolement ou à prix coûtant. Des ONG rejoignent aussi l'aventure pour distribuer les jeux sur place, là où la demande se fait sentir, même si quelques petites structures françaises participent aussi, à Calais ou Ivry notamment. "Nous avons aussi contacté l'Unicef. +Super projet!+, nous ont-ils répondu... Mais ne comptez pas sur nous tout de suite car la décision prendra des mois", raconte Jean-Thierry Winstel.

Car l'entrepreneur veut aller vite. Sa nuit d'insomnie date seulement d'avant l'été mais, en quelques mois, il a déjà réussi à envoyer les premiers jeux.

Ceux-ci sont édités en arabe, la langue parlée par l'écrasante majorité des enfants réfugiés. "La langue ce n'est pas la question!" réplique-t-il, interrogé à ce sujet. "Il faudrait les faire en quelle langue? En français? Mais il n'y a pas de réfugiés français!". Puis de préciser que la moitié des produits n'ont pas de texte mais des pictogrammes, pour leur caractère universel. Sans compter que les enfants des camps (les publics visés sont les 4-7 ans et 8-12 ans) n'ont que très peu accès à l'instruction.

Grâce à toutes les bonnes volontés et à force de tirer les prix, les acteurs du projet "Bioviva For Life" (lien vers le site dédié) parviennent à produire des jeux pour 0,50 euros pièce. Sortir un million d'unité reviendra donc à 500.000 euros. Un record pour des produits de qualité. Mais une somme tout de même colossale pour l'attelage de volontaires engagés dans l'initiative.

L'étape suivante sera donc celle de la mobilisation. Du public, bien sûr, mais aussi et surtout des entreprises pour l'équipe, qui n'a pas la force de frappe médiatique d'Omar Sy et sa "Love Army for Rohingya". Grâce à l'opération lancée ce jeudi 14, Bioviva For Life veut toucher un large public. Car bien que lancée depuis plusieurs semaines, l'initiative peine a franchir les limites du Sud-Ouest et les cercles de bénévoles engagés. "Nous espérons arriver à lever 50.000 euros avant la fin de l'année. C'est 100.000 jeux. Mais après Noël commencera le plus dur: trouver les 450.000 euros restants", confie celui qui veut rester confiant, même si "maintenant qu'il faut agir, certaines entreprises qui étaient volontaires au début se font désirer...".

Un million de jeux, pour plusieurs millions de gamins qui en bénéficieraient, serait plus qu'un symbole. Une première étape? "Peut-être", sourit l'entrepreneur, conscient de la tâche qui lui reste à accomplir. "Mais nous réfléchissons aussi à pérenniser le processus. Par exemple en reversant 1 euro pour tout jeu acheté? Ou en lançant une gamme de jeux dédiés à la paix? Il est trop tôt pour le dire, mais ce sera un projet pour 2018".

Comment participer au projet Bioviva For Life?

- pour les particuliers, une cagnotte en ligne est disponible en cliquant sur ce lien: HelloAsso Bioviva For Life (les dons par chèque envoyé par courrier sont aussi acceptés)

- pour les entreprises: formulaire de contact dédié

- en diffusant sur les réseaux sociaux le hashtag dédié: #Games4Refugees

À LIRE AUSSI

Image
Des migrants réunis dans l'Église Saint-Ferréol de Marseille, le 22 novembre 2017
Solution en vue pour les jeunes migrants réfugiés dans une église marseillaise
La soixantaine de jeunes migrants isolés, parfois adolescents, réfugiés depuis mardi dans une église de Marseille ont obtenu gain de cause, et accepté jeudi soir la mi...
23 novembre 2017 - 22:08
Image
Des réfugiés rohingyas de Birmanie arrivent à Teknaf, le 12 septembre 2017 au Bangladesh
Dans l'exode des Rohingyas, des enfants seuls et vulnérables
Le garçon rohingya perdu a fait le voyage depuis la Birmanie seul, se raccrochant à des étrangers d'autres villages pour franchir rivières et jungles, jusqu'à ce qu'il...
13 septembre 2017 - 14:58
Image
Des réfugiés syriens s'inscrivent auprès d'entreprises lors d'un salon de l'emploi dans le camp de Z
En Jordanie, un salon de l'emploi pour aider les réfugiés syriens
Sans travail depuis cinq ans, Mohammed Ahmad sillonne nerveusement les allées d'un salon de l'emploi dans le camp de réfugiés syriens de Zaatari en Jordanie, inscrivan...
05 octobre 2017 - 13:52

L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.

Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement  car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.

Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.

Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.

Je fais un don à France-Soir

Dessin de la semaine

Portrait craché

Image
bayrou
François Bayrou, baladin un jour, renaissant toujours
PORTRAIT CRACHE - François Bayrou, député, maire de Pau et plusieurs fois ministres, est surtout figure d’une opposition opportuniste. Éternel candidat malheureux à la...
20 avril 2024 - 10:45
Politique
Soutenez l'indépendance de FS

Faites un don

Nous n'avons pas pu confirmer votre inscription.
Votre inscription à la Newsletter hebdomadaire de France-Soir est confirmée.

La newsletter France-Soir

En vous inscrivant, vous autorisez France-Soir à vous contacter par e-mail.