Attentats de janvier : rappel des 5 jours qui ont secoué la France

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 04 janvier 2016 - 12:35
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Des pancartes "Je suis Charlie" en hommage aux victimes.
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©Srdjan Zivulovic/Reuters
Il y a un an, la France a vécu l'un des pires attentats commis sur son sol.
©Srdjan Zivulovic/Reuters
Le 7 janvier 2015, la rédaction de "Charlie Hebdo" était attaquée par les frères Kouachi. S'en est suivi quatre jours de chasse à l'homme, de tensions et de commémorations telles que la marche républicaine du 11 janvier. Récit.

Mercredi 7 janvier 2015. Au 10, rue Nicolas Appert, dans le XIe arrondissement de Paris, l'équipe de Charlie Hebdo est réunie pour la première conférence de rédaction de l'année. Sur la table, café et gâteau marbré. Traîne aussi le dernier numéro: Michel Houellebecq, caricaturé en mage décadent, professe: "En 2015, je perds mes dents... En 2022, je fais ramadan!"

Un bruit incongru, "pop pop", vient interrompre une blague entre le dessinateur Charb et le chroniqueur Philippe Lançon. Cagoulés et armés de kalachnikov, les frères Chérif et Saïd Kouachi viennent de faire leur première victime: le webmaster Simon Fieschi (il survivra).

Les deux assaillants lancent "Allah akbar". Pour s'assurer qu'il est bien là, ils appellent Charb, le directeur de l'hebdomadaire satirique, menacé depuis des années pour la publication des caricatures de Mahomet. Puis ils tirent "dans le tas", racontera le grand reporter Laurent Léger, miraculé pour s'être "jeté derrière une table dans une encoignure".

En sortant, les djihadistes crient: "on a vengé le prophète Mohamed! On a tué Charlie Hebdo!". Dans leur fuite, ils sèment encore la mort, abattant un policier à terre, Ahmed Merabet. Bilan: 12 morts parmi lesquels les dessinateurs Cabu, Wolinski, Charb, Tignous, Honoré, l'économiste Bernard Maris.

La France est sonnée. "Le 11-Septembre français", titre en une Le Monde avec la photo d'une foule rassemblée d'où se détache une femme montrant une page imprimée en noir et blanc avec trois mots simples: "Je suis Charlie".

Cette riposte verbale a été imaginée par un graphiste dans les heures suivant l'attaque. Le hashtag #JeSuisCharlie se répand sur Twitter. Des dizaines de milliers de personnes se rassemblent spontanément à Paris, en France, dans les grandes villes européennes. La "France de Charlie" a son épicentre dans la capitale, place de la République, non loin du journal attaqué. Grimpée sur la statue, une foule juvénile porte à bout de bras les lettres lumineuses: "Not afraid".

La solidarité s'organise pour que l'hebdo reparaisse rapidement. François Hollande, qui s'est immédiatement rendu devant l'immeuble de Charlie Hebdo, prend la parole en soirée pour une courte mais solennelle adresse à la Nation. "Notre meilleure arme, c'est notre unité. Rien ne peut nous diviser, rien ne doit nous séparer". Il décrète jeudi "jour de deuil national".

Le plan Vigipirate est relevé au niveau maximum "alerte attentat" pour l'Ile-de-France, dans la capitale les forces de l'ordre reçoivent d'importants renforts. La traque des frères Kouachi, dont la trace se perd au nord de Paris, s'organise.

Jeudi 8 au petit matin, une jeune policière municipale, Clarissa Jean-Philippe, s'effondre à Montrouge, près de Paris, sous les balles d'un tireur cagoulé, ajoutant à la psychose ambiante. Au même moment, les Kouachi sont reconnus par le gérant d'une station-essence, dans l'Aisne. Le Raid et le GIGN se déploient. Une vaste zone rurale, à 80 km au nord-est de Paris, est fouillée minutieusement.

A midi, la France se fige pour une minute de silence. Le glas sonne à Notre-Dame de Paris. La Tour Eiffel marque le deuil en s'éteignant quelques instants, en soirée. A Washington, Barack Obama inscrit "Vive la France!" sur le livre d'or de l'ambassade.

Qualifiés de "héros djihadistes" par la radio de l'organisation Etat islamique (EI), les frères Kouachi reparaissent vendredi 9 au matin dans une imprimerie de Dammartin-en-Goële (Seine-et-Marne), rapidement encerclée par les forces de l'ordre.

Porte de Vincennes à Paris, un homme muni d'armes automatiques et d'explosifs fait irruption à la mi-journée dans la supérette Hyper Cacher. Un employé et trois clients, tous juifs, sont tués durant la prise d'otage. Le forcené est aussi l'auteur de la fusillade de la veille à Montrouge.

Il s'agit d'Amédy Coulibaly, délinquant de 32 ans qui a rencontré Chérif Kouachi en prison. Il déclare s'être "synchronisé" avec les tueurs de Charlie Hebdo et vouloir cibler "des juifs".

En fin d'après-midi, à Dammartin, un tumulte de détonations retentit. Les frères Kouachi sont tués en tentant de sortir. Un employé de l'imprimerie, caché sous un évier, est libéré. Au même instant, l'assaut est donné à l'Hyper Cacher. Coulibaly est abattu par la police. Les otages rescapés sortent.

François Hollande dénonce un "acte antisémite effroyable" et des "fanatiques qui n'ont rien à voir avec la religion musulmane".

Au total, les trois djihadistes ont tué 17 personnes: dessinateurs, journalistes, policiers, juifs.Avant d'être abattus, ils ont eu le temps de parler à des médias, se revendiquant d'Al-Qaïda pour les Kouachi et de l'EI pour Coulibaly.

Dimanche 11 janvier, Paris devient "la capitale du monde", selon l'expression du président Hollande. Entouré d'une cinquantaine de responsables étrangers, le chef de l'Etat défile en tête d'une "marche républicaine". L'Allemande Angela Merkel, les Premiers ministres britannique, espagnol, italien, turc, les présidents du Mali et de la Commission européenne ont fait le voyage.

Tous ne sont pas des champions de la "liberté d'expression". Mais tous marchent en silence bras dessus, bras dessous. Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu est à quelques mètres du président palestinien Mahmoud Abbas.

Suit une foule énorme, bigarrée, aussi émue que festive et résolue. Elle proclame "je suis Charlie, juif, policier". En province, les Français défilent aussi en masse.

Au moins 3,7 millions de manifestants dans le pays, dont 1,2 à 1,6 million à Paris, un record depuis l'enterrement de Victor Hugo le 1er juin 1885.

A l'étranger, on marche aussi: Londres, Washington, Madrid. Salman Rushdie tweete: "Vive la France! Dans quel autre pays des millions de gens se rassembleraient tenant des crayons et des stylos pour défendre la liberté journalistique et artistique?".

Au pays qui a inventé le slogan "CRS, SS", on applaudit les hommes en uniforme en hommage aux trois policiers tués.

Le soir du 11 janvier, l'image des tueries fait place à celle de millions de silhouettes en rangs serrés, et aux visages de nouveaux héros: un jeune musulman malien, Lassana Bathily, qui a sauvé des otages juifs à l'Hyper Cacher, un flic musulman, Ahmed Merabet, tué au nom de l'islam.

 

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