Procès d'Abdelkader Merah : "Paris Match" publie une photo interdite
Abdelkader Merah affalé sur le banc des accusés, l'air distant. Derrière lui les gendarmes, devant lui ses avocats, Antoine Vey et Eric Dupond-Moretti. C'est la photographie prise lors du procès du terroriste, condamné à 20 ans de prison, qu'a choisi de diffuser Paris Match dans son édition de ce jeudi 8 ainsi que sur son site internet. Une démarche qui est pourtant interdite et soulève donc la polémique.
La loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse dispose en effet que "dès l'ouverture de l'audience des juridictions administratives ou judiciaires, l'emploi de tout appareil permettant d'enregistrer, de fixer ou de transmettre la parole ou l'image est interdit. Le président fait procéder à la saisie de tout appareil et du support de la parole ou de l'image utilisés en violation de cette interdiction".
Les seuls photos de prévenus au tribunal qui peuvent être diffusées sont celles prises avant l'ouverture des débats, à condition que la défense, les parties civiles, le ministère public et le président y consentent.
La photographie, de mauvaise qualité et qu'aucun autre média n'a publié, s'apparente plus à une photo volée qu'à un cliché pris avec le consentement de tous. En le publiant, Paris Match s'expose à une amende de 4.500 euros, mais surtout à la "confiscation du support de l'image utilisé". En théorie, la justice pourrait donc faire cesser la diffusion du magazine ou de la photo en ligne. Une mesure cependant rare et qui n'aurait d'impact que si elle était prise dans l'urgence, avant que de nombreux exemplaires de l'hebdomadaire aient été vendus.
L'association de la presse judiciaire (APJ) a sévèrement dénoncé ce "torpillage" de son travail. "L'APJ déplore, et le mot est faible, la publication par Paris Match de deux photos prises dans la salle de la cour d'assises de Paris au cours du procès de l'affaire Merah", écrit-elle dans un communiqué publié ce jeudi 9, ajoutant: "Si cette publication enfreint la loi (...) elle remet également en cause la confiance que l'APJ construit jour après jour avec les magistrats pour permettre aux chroniqueurs judiciaires et à tous les journalistes de travailler dans les meilleures conditions au sein des juridictions françaises".
Paris Match n'en est pas à son premier "coup d'éclat" du genre. Le magazine avait déjà publié en 2008 une photo du tueur en série Michel Fourniret lors de son procès, se faisant retirer son accréditation. Il avait également été condamné pour des affaires retentissantes comme la publication des photos du corps du préfet Erignac en 1998, ou de celui de François Mitterrand en 1996. En juillet dernier, la justice a interdit toute nouvelle publication de photos de l'attentat de Nice parues dans l'hebdomadaire.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.