Procès en appel de Jérôme Kerviel : un enregistrement clandestin évoque des "manipulations"
Dans cet enregistrement clandestin, qui daterait du 15 juin 2015, on peut entendre une conversation privée tenue dans un café parisien entre l'ex-vice-procureure de la République de Paris Chantal Colombet-De Leiris et une ex-policière de la Brigade financière, Nathalie Le Roy, chargée de l'enquête sur l'affaire Kerviel.
Dans des extraits sélectionnés par la défense et diffusés à l'audience après l'avoir été dans la presse, la magistrate désormais retraitée évoque l'affaire Kerviel avec Mme Le Roy, pointant du doigt des dysfonctionnements: "Vous étiez entièrement manipulée par la Société Générale", "quand on voit que les scellés n'ont jamais été exploités". En face, Mme Le Roy abonde dans ce sens: "On ne savait pas où aller. On a été dirigés, en fait".
L'ex-magistrate va plus loin: "Dans cette affaire, y'avait des choses qui sont pas normales. Quand vous en parlez, tous les gens qui sont un peu dans la finance, ils rigolent, sachant très bien que c'est évident que la Société Générale savait".
Elle affirme notamment que ce n'est pas un magistrat qui a rédigé l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel de Paris, "c'est un des avocats [de la Société Générale] qui lui a communiqué".
Un autre extrait met en cause nommément Jean Reinhart, l'un des avocats de la banque présents dans la salle. Et Mme Colombet-De Leiris d'enfoncer le clou: "Ils (les magistrats du parquet de Paris, NDLR) étaient complètement sous la coupe des avocats de la Générale. Vous le gardez pour vous. C'était inimaginable".
A l'issue de l'écoute de l'enregistrement, Me Olivier Baratelli bondit. Il est mandaté par l'ex-magistrate car pour elle, l'enregistrement est illégal puisque clandestin et le diffuser à l'audience est donc un délit susceptible de poursuites. Peine perdue. La cour rejette sa demande, "l'infraction" n'étant pour elle pas "suffisamment établie".
Jérôme Kerviel, condamné pénalement pour abus de confiance, a redit mercredi que son ex-employeur "savait" et n'a rien fait pour mettre un terme à ses pratiques de "rog-trading" (trading voyou).
La Cour de cassation a confirmé en 2014 sa condamnation à cinq ans de prison, dont trois ferme, pour abus de confiance, mais cassé les dommages et intérêts réclamés par la banque, estimant que ses mécanismes de contrôle avaient failli.
À LIRE AUSSI
L'article vous a plu ? Il a mobilisé notre rédaction qui ne vit que de vos dons.
L'information a un coût, d'autant plus que la concurrence des rédactions subventionnées impose un surcroît de rigueur et de professionnalisme.
Avec votre soutien, France-Soir continuera à proposer ses articles gratuitement car nous pensons que tout le monde doit avoir accès à une information libre et indépendante pour se forger sa propre opinion.
Vous êtes la condition sine qua non à notre existence, soutenez-nous pour que France-Soir demeure le média français qui fait s’exprimer les plus légitimes.
Si vous le pouvez, soutenez-nous mensuellement, à partir de seulement 1€. Votre impact en faveur d’une presse libre n’en sera que plus fort. Merci.