Epilepsie : le valproate responsable de 450 malformations congénitales

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 24 février 2016 - 10:27
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La médecine française progresse dans le domaine des complications liées à la grossesse.
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©Regis Duvignau/Reuters
Le valproate a provoqué au moins 450 malformations congénitales chez des bébés exposés in utero en France, selon un rapport de l'Igas.
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Le valproate de sodium, médicament utilisé dans le traitement contre l’épilepsie et les troubles bipolaires, a provoqué au moins 450 malformations congénitales chez des bébés exposés in utero en France, selon un rapport commandé par la ministre de la Santé Marisol Touraine. Les malformations portent principalement sur le coeur, les reins, les membres, la colonne vertébrale et incluent des becs de lièvre.

Le valproate, un médicament indispensable dans le traitement de l'épilepsie, a provoqué au moins 450 malformations congénitales chez des bébés exposés in utero en France, selon un rapport qui critique le "manque de réactivité" des autorités sanitaires et du laboratoire Sanofi. "Le constat de la mission est celui d'un manque de réactivité des autorités sanitaires et du principal titulaire de l'autorisation de mise sur le marché", écrit l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) dans un rapport publié mardi 23.

Commandé par la ministre de la Santé Marisol Touraine, le rapport évalue à "entre 425 et 450 le nombre de cas de naissances d'enfants vivants ou mort-nés exposés in utero au valproate entre 2006 et 2014 qui sont porteurs de malformations congénitales", en appliquant à la France entière des données obtenues dans la région Rhône-Alpes. Selon l'Igas, il faudra toutefois attendre le mois de mai pour avoir une "mesure plus précise de l'impact des prescriptions de valproate sur la descendance des femmes exposées".

Dès le 1er mars, l'avertissement pour les femmes enceintes qui figurait déjà dans la notice du médicament va être inscrit sur la boîte, a indiqué à l'AFP le directeur général de la santé, Benoît Vallet. Incontournable pour certains patients atteints d'épilepsie, mais également utilisé pour traiter les troubles bipolaires, le valproate de sodium est présent dans plusieurs spécialités pharmaceutiques dont l'antiépileptique Dépakine, commercialisé en France par Sanofi depuis 1967, puis sous forme générique par d'autres laboratoires. Sanofi le commercialise dans plus de 120 pays.

Le valproate est sur la sellette depuis plusieurs années à cause de son risque élevé de malformations -de l'ordre de 10%- mais également d'un risque plus élevé de retards intellectuels et/ou de la marche ainsi que de cas d'autisme, qui peuvent atteindre jusqu'à 40% des enfants exposés.

Ces derniers risques ne sont connus que depuis les années 2000 alors que celui de malformations congénitales a commencé à filtrer à partir des années 1980. Les malformations portent principalement sur le coeur, les reins, les membres, la colonne vertébrale (spina bifida) et incluent des becs de lièvre.

Un arbitrage rendu au niveau européen en 2014 a conduit tous les pays européens à revoir leur condition de prescription du valproate pour "minimiser les risques". Ce médicament ne doit plus désormais être prescrit aux filles et aux femmes en âge de procréer, ni aux femmes enceintes "sauf en cas d'inefficacité ou d'intolérance aux alternatives médicamenteuses". Mais les autorités n'envisagent pas pour l'instant de l'interdire.

"Le valproate est un médicament de référence (dont on ne peut pas toujours se passer, NDLR) qui ne peut pas être supprimé comme par exemple le distilbène", a expliqué Benoît Vallet, en présentant le rapport de l'Igas. "On a encore des efforts à faire" pour que les informations sur les risques "parviennent au médecin et à la patiente", a dit le directeur général de l'agence du médicament (ANSM), Dominique Martin.

"Nous comprenons la détresse de ces familles", a réagi le laboratoire Sanofi, affirmant avoir "toujours respecté" ses "obligations d'information auprès des professionnels de santé comme des patients". Il précise également avoir mentionné les risques de malformations "dès le début des années 1980" et ceux de troubles neuro-développementaux "dès le début des années 2000".

Selon le rapport de l'Igas, le nombre de femmes en âge de procréer (15-49 ans) sous valproate a baissé en France de 25% entre 2006 et 2014, passant de 125.000 en 2006 à 93.000 en 2014, dont 37.000 traitées pour épilepsie et 56.000 pour des troubles bipolaires.

"Nous sommes relativement satisfaits du rapport qui reconnait un manque d'information de la part du laboratoire et une inertie des pouvoirs publics" a déclaré Marine Martin, la présidente de l'association d'aide aux parents d'enfants souffrant du syndrome de l'anticonvulsivant (Apesac). Elle réclame une prise en charge spécifique ainsi que la création d'un fonds d'indemnisation et précise avoir déjà recensé 1.050 victimes du valproate sur son site internet à ce jour dont la plupart souffrant de troubles autistiques. Marine Martin devrait être reçue par la ministre de la Santé le 7 mars pour discuter de ces questions.

 

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