Les Légendes dévoilées : les coulisses des mythes qui nous gouvernent - Partie II

Auteur(s)
Xavier Azalbert, France-Soir
Publié le 19 mai 2025 - 10:23
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Les légendes
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France-Soir, Pixabay
Les Légendes dévoilées : les coulisses des mythes qui nous gouvernent - Partie II
France-Soir, Pixabay

Dans la première partie, sur les coulisses des mythes qui nous gouvernent, nous avons abordé les légendes, les processus et les rouages associés ainsi que les raisons pour lesquelles nous acceptons ces légendes à travers une analyse des biais cognitifs. Dans cette seconde partie, nous aborderons l'art de façonner les mythes, mais également celui de les décrypter.

 

IV - L’Art de façonner les mythes, les méthodes

Créer une légende, c’est orchestrer une campagne avec la précision d’un agent de la DGSE planifiant une infiltration. Ces méthodes, des plus anciennes aux plus modernes, exploitent la psychologie humaine, les dynamiques sociales et les outils médiatiques pour transformer un récit en mythe indélébile. Après avoir exploré la répétition et les archétypes, plongeons dans les stratégies plus subtiles qui façonnent les légendes.

 

Répétition obsessive : marteler pour convaincre

La répétition grave les récits dans les esprits, une technique étudiée par le psychologue Robert Zajonc. Au Moyen Âge, les sermons martelaient les miracles des saints, comme ceux de Saint-François, pour en faire des vérités incontestées. Aujourd’hui, les médias et les algorithmes de X jouent ce rôle. Une fausse citation attribuée à Keanu Reeves, partagée des milliers de fois, devient une « vérité » virale, comme l’analyse la sociologue Danah Boyd.

Dans l’espionnage, la répétition renforce une légende. Fuligni décrit comment les agents répètent leur fausse identité – nom, hobbies – jusqu’à l’intérioriser. Dans la pop culture, la légende de Beyoncé comme « Queen B » est martelée par des clips, des interviews et des posts, occultant les critiques.

Répétition obsessive : marteler pour convaincre
Répétition obsessive : marteler pour convaincre

 

Archétypes puissants : les figures qui résonnent

Les légendes s’appuient sur des archétypes universels – héros, rebelle, martyr – étudiés par Joseph Campbell dans Le Héros aux mille visages. Che Guevara, avec son béret étoilé, incarne le révolutionnaire romantique, malgré ses controverses, comme le note l’historien Mike Gonzalez. Dans True Lies (1994), Arnold Schwarzenegger joue un espion héroïque, ancré dans un contexte géopolitique crédible (terrorisme), mais amplifié par un charisme « larger-than-life », selon le critique Roger Ebert.

Dans « Le Bureau des légendes », les personnages comme Malotru incarnent l’archétype de l’anti-héros, déchiré entre devoir et humanité, un trope qui résonne avec le public, selon Fuligni. Sur X, des figures comme Elon Musk sont mythifiées comme des « visionnaires », reprenant l’archétype de l’inventeur solitaire.

Archétypes puissants : les figures qui résonnent
Archétypes puissants : les figures qui résonnent

 

Manipulation des sources : réécrire la vérité

La manipulation des sources est une arme redoutable : sélectionner les faits, effacer les critiques, réécrire l’histoire. Dans les régimes autoritaires, cette technique est systématique. Sous Staline, Leon Trotsky, héros de la révolution bolchevique, est rayé des photographies officielles et des manuels, transformé en ennemi du peuple, comme le documente l’historien Orlando Figes. Cette falsification crée une légende unilatérale, où seuls les récits approuvés survivent.

Dans l’espionnage, la manipulation des sources est au cœur du « backstopping ». Bruno Fuligni, dans « Le Bureau des légendes décrypté » », explique comment la DGSE fabrique des archives truquées – certificats, comptes bancaires, profils LinkedIn – pour soutenir la légende d’un agent clandestin. Une seule faille, comme un document incohérent, peut faire s’effondrer la couverture. Cette rigueur s’applique aux légendes culturelles. Thomas Edison, présenté comme l’inventeur de l’ampoule, bénéficie d’une campagne qui minimise le rôle de Nikola Tesla ou Humphry Davy, comme le note l’historien Bernard Carlson. Les sources favorables – brevets, articles élogieux – sont mises en avant, tandis que les controverses sont enterrées.

Dans l’ère numérique, la manipulation des sources prend une nouvelle dimension. Sur X, les influenceurs et les marques diffusent des récits sélectifs, comme les posts de Kylie Jenner vantant sa « success story » sans mentionner son privilège familial. Les algorithmes amplifient ces récits, noyant les critiques dans un flot de contenu. Cette stratégie, comme une opération d’espionnage, repose sur le contrôle de l’information pour façonner la perception.

La pollution informationnelle
Manipulation des sources : réécrire la vérité

 

Info-fiction : le flou entre réalité et invention

L’info-fiction, ce mélange de faits et de fictions, est l’arme des légendes modernes. Elle brouille la frontière entre vérité et invention, rendant les récits irrésistibles. Cette hybridité s’étend aux médias modernes via le « narrative laundering », où des récits biaisés sont légitimés par des institutions. Dans l’affaire Fact & Furious, Libé mêle faits (fermeture du site) et fiction (harcèlement complotiste), s’appuyant sur des individus comme Rudy Reichstadt pour crédibiliser son récit, une tactique de blanchiment de narratif. France-Soir évoque les biais éditoriaux, les zone d’ombres, les dérives éthiques, et le décryptage des articles ciblant des individus et constamment à charge. Les ONG humanitaires, comme certaines accusées de masquer des financements douteux, utilisent l’info-fiction pour maintenir une légende altruiste, selon George Monbiot. Roland Barthes, dans Mythologies, voit dans ces récits des mythes modernes, où la fiction devient vérité par la répétition institutionnelle.

« Le Bureau des légendes » en est un exemple paradigmatique. Éric Rochant, conseillé par d’anciens agents de la DGSE, ancre la série dans des réalités – procédures de filature, stress psychologique – mais y injecte des intrigues romanesques, comme les dilemmes amoureux de Malotru. Fuligni souligne que cette hybridité rend la série si crédible qu’elle inspire des candidatures à la DGSE, transformant une fiction en légende culturelle. Ce point est un éléments crucial qui ancre plusieurs biais, ce que l’on pourrait appeler la fusion des biais, ou plus exactement « la confusion » des genres – on ne sait plus distiguer le vrai du faux et le réel de la fiction tel qu’illustré dans l’article « Vrais Mensonges et Fausses vérités » sur la période covid récente.

Pilule rouge
Vrais mensonges et fausses vérités : les nouveaux standards de la propagande

Hollywood excelle dans l’info-fiction. True Lies (1994), réalisé par James Cameron, place Arnold Schwarzenegger dans un contexte géopolitique plausible – le terrorisme des années 1990 – mais amplifie l’action avec des cascades improbables, comme le note le critique Roger Ebert. Ce mélange donne une illusion de vérité, captivant le public tout en façonnant des perceptions sur l’espionnage. Dans un registre plus sérieux, le film Argo (2012) mêle faits historiques (la crise des otages en Iran) et dramatisation (une fausse production hollywoodienne), brouillant les lignes pour créer une légende héroïque.

Sur X, l’info-fiction prospère via des formats comme les vidéos virales ou les deepfakes. En 2020, une vidéo truquée montrant une célébrité dans une situation compromettante devient virale, alimentant une légende en quelques heures. Comme l’analyse le sociologue Zeynep Tufekci, ces récits hybrides exploitent notre incapacité à distinguer le vrai du faux dans un flux numérique incessant, un défi que les agents de la DGSE affrontent lorsqu’ils protègent leurs légendes. La pollution informationnelle sur la période Covid entraine une dystopie complète ancrant les esprits dans une vérité alternative d’un consensus de groupe, qui se traduit par une opération de neuromarketing gouvernemental où la personne allant se faire vacciner avec un produit expérimental : vaccination et loto un jeu qui se vaut ? Les parallèles sont frappants.

 

Le pouvoir des communautés : l’amplification collective

Les légendes ne sont pas seulement imposées d’en haut ; elles naissent souvent des communautés, du bouche-à-oreille aux fandoms numériques. Au Moyen Âge, les récits oraux des paysans anglais forgent la légende de Robin des Bois, transformant un possible bandit en héros redistributif, comme le documente l’historien Maurice Keen. Ces communautés, en partageant des balades au sein de diverses communautés qui se l’approprient, donnent vie au mythe.

Aujourd’hui, les « fandoms » sur X jouent un rôle similaire. Les fans de Malotru débattent des intrigues, amplifiant la légende de la série comme un miroir de la réalité, certains spéculant même sur des agents réels inspirant Malotru. Les mèmes, ces unités culturelles virales, sont des accélérateurs de légendes. La légende de Keanu Reeves comme « homme parfait » naît de mèmes sur X – photos de lui donnant son siège dans le métro, anecdotes de générosité –, relayés par des millions, comme l’analyse la sociologue danah boyd. Ces récits, souvent flous, s’enracinent grâce à la ferveur collective.

Les communautés peuvent aussi contester les légendes. Depuis plusieurs années, de nombreuses personnes et plus récemment des utilisateurs de X remettent en question la légende philanthropique de Bill Gates, pointant des contradictions dans ses dons, ce qui alimente des contre-récits conspirationnistes. Cette dynamique, comme une opération de contre-espionnage, montre que les légendes sont des champs de bataille, où les communautés façonnent ou déconstruisent les mythes.

Communauté
Le pouvoir des communautés : l’amplification collective

 

Contrôle émotionnel ou jouer sur les cœurs

Une légende doit toucher les émotions pour perdurer. Les créateurs exploitent des sentiments universelspeur, espoir, colère – pour ancrer leurs récits. La légende de Dracula, née du roman de Bram Stoker, joue sur la peur de l’inconnu, transformant un prince valaque en vampire terrifiant, comme l’explique l’historien David Skal. Cette charge émotionnelle rend le mythe inoubliable.

Dans l’espionnage, le contrôle émotionnel est subtil. Fuligni décrit comment les agents de la DGSE construisent des légendes qui éveillent la sympathie – une histoire de deuil, un hobby attachant – pour gagner la confiance de leurs cibles. Dans la pop culture, la légende de Taylor Swift comme artiste « authentique » repose sur des chansons qui parlent d’amours brisées, touchant directement les fans, comme le note la critique Ann Powers. Sur les réseaux sociaux certains posts émotionnels – une vidéo d’un influenceur pleurant pour une cause – deviennent viraux, amplifiant leur légende.

 

Instrumentalisation des médias : la machine à diffuser

Les médias sont le mégaphone des légendes. Au XIXe siècle, la presse à sensation transforme Buffalo Bill, un éclaireur militaire, en héros de l’Ouest américain, occultant ses massacres de bisons, selon l’historien Richard White. Aujourd’hui, les médias traditionnels et numériques jouent ce rôle. La légende de Elon Musk comme « génie futuriste » est amplifiée par des couvertures de Time et des posts sur X sur ses succès technologiques indéniables « réaliser l’impossible » tel que rattraper une fusée entre deux bras géants ce que les ingénieurs d’Arianne Espace ou du CNES jugeaient impossible (même si « impossible n’est pas Français !), minimisant ses controverses, comme le documente le journaliste Ashlee Vance.

Dans « Le Bureau des légendes », les médias fictifs servent à diffuser des récits pour protéger les agents, comme des articles plantés pour crédibiliser une couverture. Fuligni note que la DGSE utilise parfois des journalistes complices pour semer des récits, une tactique que les marques modernes imitent en payant des influenceurs pour promouvoir des légendes, comme Nike mythifiant ses athlètes.

Canon César et Général Paul Pellizzari spécialiste de l'armement.
Instrumentalisation des médias : la machine à diffuser

 

Contestation et déconstruction des légendes

Les légendes ne sont pas intouchables ; elles sont contestées par des contre-récits, un champ de bataille narratif. Les enquêtes journalistiques, les leaks, et les contre-mèmes défient les récits dominants. France-Soir s’est évertué à déconstruire la légende de Fact & Furious comme site fiable, révélant des accusations de pratiques douteuses via l’enquête de 2022, relayée par Idriss Aberkane. Historiquement, les leaks de WikiLeaks, comme les câbles diplomatiques de 2010, déconstruisent la légende des gouvernements comme protecteurs, révélant des vérités gênantes. Dans l’espionnage, les agents doivent contrer les enquêtes sur leurs couvertures, une lutte décrite par Fuligni où une fuite peut détruire une légende. Ces contestations, bien que puissantes, risquent de propager la désinformation où les accusations non vérifiées de Libé alimentent la méfiance dans les médias mainstream.

 

V - Contrôle des légendes : protéger le mythe

Une légende, une fois née, est vulnérable. Critiques, enquêtes, contre-récits menacent de l’ébranler. Les créateurs déploient des stratégies, de la censure brutale aux outils modernes comme DISARM, pour préserver leurs mythes.

 

Étouffer les voix dissidentes : censure et silence

La censure est une arme ancestrale. Au Moyen Âge, l’Église excommunie les hérétiques qui contestent les hagiographies des saints, comme celles de Saint François. Aujourd’hui, les gouvernements suppriment des posts sur X, invisibilisent des personnes, et les entreprises lancent des campagnes pour étouffer les scandales. Apple, par exemple, minimise les révélations sur ses pratiques fiscales pour préserver la légende de Steve Jobs, comme le note le journaliste Charles Duhigg.

Dans l’espionnage comme d’ailleurs en politique, la censure est vitale. Fuligni explique que la DGSE traque les fuites qui pourraient exposer une légende, utilisant des pressions légales ou des cyber-opérations. Dans la pop culture, les studios hollywoodiens censurent les scandales d’acteurs, comme les allégations contre des stars, pour protéger leur image, selon la critique Pauline Kael.

Analyse symposium NATO
censure et silence

 

Anticiper les attaques avec des frameworks comme DISARM

DISARM (Disinformation Analysis and Risk Management) est un outil moderne pour contrer la désinformation, mais il sert aussi à protéger les légendes ou les narratifs qui demandent à être protégés car ils ne résistent pas au test du temps ou de la vérité scientifique. En cartographiant les tactiques des critiques – rumeurs, enquêtes, deepfakes –, DISARM propose des contre-mesures : fact-checking, modération, récits préventifs. Les politiques et les marques l’adaptent pour anticiper les attaques. Par exemple, une figure publique peut diffuser une autobiographie flatteuse pour discréditer une enquête à venir, comme le note l’analyste Claire Wardle. Les livres font partie intégrale de l’ancrage des légendes, mais il présente un risque important, car les écrits restent. Par conséquence, les éléments de logique floue utilisés dans un livre qui ne résistant pas aux différents tests de véracité peuvent se retourner contre les créateurs de la légende.

Dans « Le Bureau des légendes », les agents utilisent des tactiques similaires, plantant des fausses pistes pour protéger leurs couvertures, selon Fuligni. Cette anticipation, comme un jeu d’échecs, est cruciale pour maintenir une légende face aux assauts. Le parallèle avec le jeu de Go tel qu’illustré par Shibumi avec les diverses approches du jeu dont le Yomi (lecture) qui consiste à anticiper les intentions de l’adversaire en visualisant les séquences possibles. Le Yomi psychologique permet de déchiffrer les motivations des légendes en analysant leur schéma de pensée et celui de leurs créateurs. Le jeu de Go sert de prisme pour comprendre la philosophie de la légende de Nicholas Hel dans Shibumi : une quête d’élégance, de maîtrise et de contrôle par la simplicité. Les stratégies du Go – influence territoriale, sacrifice tactique, patience, simplicité et anticipation – se traduisent dans ses actions, où chaque mouvement est un coup sur le goban de sa vie. Trevanian utilise ces parallèles pour tisser une légende autour de Hel, un homme dont la puissance réside dans sa capacité à incarner le shibumi, à la fois dans ses actes et dans son essence. Le point faible des frameworks tel que DISARM est de ne pas pouvoir comprendre la notion d’ « essence ». Dans le jeu de Go comme dans la vie, les meilleurs coups sont souvent les plus simples, ceux qui atteignent un objectif avec une économie de moyens. Un joueur expérimenté préfère un jeu fluide et naturel à une complexité inutile.

DISARM
Anticiper les attaques avec des frameworks comme DISARM

Les gardiens du récit, rôle réservé aux médias et influenceurs

Les médias façonnent l’opinion en relayant les récits officiels. Hollywood transforme Tom Cruise en légende via Mission : Impossible, où il incarne un espion infaillible, occultant ses controverses personnelles. Sur X, les influenceurs, souvent sponsorisés, amplifient ces mythes. En 2021, des influenceurs payés par une marque de mode mythifient un créateur comme « visionnaire », marginalisant les accusations de plagiat, comme l’analyse le journaliste Robin Givhan.

Dans l’espionnage, les médias sont manipulés pour diffuser des légendes. Fuligni décrit comment la DGSE plante des articles pour crédibiliser une couverture, une tactique que les entreprises imitent en achetant des publi-reportages. Ce contrôle médiatique crée un écosystème où la vérité est noyée dans le bruit. Leur role est devenu évident durant la crise covid ou encore récemment avec la trahison du devoir d’informer de l’AFP et des médias en attribuant au Général Pellizzari des faits faux et vérifiables facilement. Mise en demeure par France-Soir, l’AFP modifie sa dépêche et prend en compte le droit de réponse du Général Pellizzari. Gardiens mais pas infaillibles !

 

L’ère numérique : IA et deepfakes

Les technologies bouleversent les légendes. Un deepfake viral sur X, comme une fausse vidéo d’une célébrité prononçant des propos scandaleux, peut créer une légende en heures. L’IA, en générant des récits crédibles – faux articles, profils sociaux – amplifie l’info-fiction, un défi que Fuligni évoque pour l’espionnage moderne. Par exemple, une IA peut créer une fausse biographie pour un agent, mais aussi pour une marque ou une personnalité, renforçant leur légende.

Les contre-mesures numériques, comme les outils de détection de deepfakes, sont en retard. En 2022, une vidéo truquée d’un homme politique devient virale, alimentant une légende conspirationniste avant d’être démentie, selon le MIT Technology Review. Cette course technologique redéfinit la protection des légendes, rendant le contrôle plus complexe.

Timeline
La timeline élément essentiel

 

Contre-mesures citoyennes et résistance 

Les légendes sont protégées par des institutions, mais contestées par des citoyens, journalistes indépendants, et utilisateurs de X. Le fact-checking communautaire, les enquêtes open-source, et les campagnes numériques défient les récits officiels. Des initiatives comme Bellingcat, utilisant l’open-source intelligence pour révéler des vérités (ex. : crimes de guerre), montrent la puissance de la résistance citoyenne. 

Dans l’espionnage, les agents doivent anticiper ces fuites, comme le note Fuligni, une lutte visible quand Malotru gère les risques d’exposition. Cependant, ces contre-mesures risquent de propager la désinformation où des accusations non vérifiées alimentent la polarisation. 

Cette dynamique citoyenne redéfinit le contrôle des légendes, partagé entre institutions et individus.

 

Enquête sur les légendes : fictives vs réelles

Pour démystifier les légendes, séparons les figures fictives, nées de l’imaginaire collectif, des figures réelles, ancrées dans l’histoire, mais amplifiées par le mythe. Cette distinction révèle où s’arrête la réalité et où commence la fiction, offrant une grille analytique pour décoder tout récit, qu’il s’agisse d’un vampire transylvanien ou d’un scandale médiatique contemporain. À travers des exemples historiques et modernes, nous explorerons comment les strates narratives, les biais cognitifs, et les stratégies de storytelling transforment des faits en légendes, et pourquoi elles captivent nos esprits.

A - Légendes fictives : les héros de l’imaginaire

  1. Dracula : Du Prince au Vampire

L’histoire vraie : en 1476, Vlad l’Empaleur, prince de Valachie, défend son territoire contre les Ottomans, empalant ses ennemis avec une cruauté légendaire. Les chroniques, conservées à Bucarest, décrivent un chef brutal mais stratège, admiré par ses sujets pour sa résistance face à l’envahisseur, selon l’historien Radu Florescu. Ses tactiques, bien que violentes, s’inscrivent dans un contexte de guerre médiévale où la terreur était une arme politique.

La légende forgée : au XVIe siècle, des pamphlets allemands exagèrent sa sauvagerie, le peignant comme un tyran sanguinaire dévorant ses victimes. En 1897, Bram Stoker s’inspire de ces récits pour créer Dracula, un vampire immortel, séducteur et terrifiant, doté de pouvoirs surnaturels – transformation en chauve-souris, peur de l’ail, soif de sang. Les films, de Bela Lugosi (1931) à Gary Oldman (1992), amplifient ce mythe, ajoutant des éléments romanesques comme une romance tragique, comme le documente l’historien David Skal. Dracula devient une icône gothique, symbole universel de la peur de l’altérité.

Vlad Tepes
Vlad Tepes

Fiction vs réalité : Vlad était un homme, non un monstre surnaturel. La réalité – un prince stratège dans un contexte de guerre – est éclipsée par une fiction exploitant des peurs profondes : la mort, l’étranger, le mal. Cette légende, comme une couverture d’espion décrite par Bruno Fuligni dans « Le Bureau des légendes décrypté », repose sur une strate factuelle (la cruauté de Vlad) pour construire un récit captivant, transformant un chef historique en mythe intemporel.

Ficelles Psychologiques

  • Peur de l’inconnu : Dracula, venu de l’Est mystérieux, incarne l’altérité, alimentant les angoisses européennes face à l’Empire ottoman.
  • Biais d’ancrage : la cruauté réelle de Vlad, rapportée par les pamphlets, ancre l’image d’un monstre, rendant la fiction vampirique crédible.
  • Effet de narration : l’arc dramatique de Dracula – séduction, menace, destruction – captive, transformant un récit en légende universelle.

     

  1. Robin des Bois : le bandit romantique

L’histoire vraie : aucun Robin des Bois historique n’est formellement identifié, mais les balades anglaises du XIVe siècle s’inspirent des tensions sociales sous Jean sans Terre (1199-1216) : taxes écrasantes, révoltes paysannes, corruption des élites. Des bandits comme Hereward le Saxon, résistant aux Normands au XIe siècle, servent de modèles plausibles, selon l’historien Maurice Keen. Ces figures reflètent un désir populaire de justice dans une société féodale oppressive.

La légende forgée : les récits oraux attribuent à Robin des exploits plausibles – vols redistributifs aux riches, maîtrise du tir à l’arc – mais restent flous sur son identité. À partir du XVIe siècle, les balades littéraires, puis les romans de Walter Scott au XIXe siècle, ajoutent des éléments romanesques : l’amour avec Marianne, la rivalité avec le shérif de Nottingham, la bande des Joyeux Compagnons. Le cinéma, d’Errol Flynn (1938) à Kevin Costner (1991), transforme Robin en héros universel de la justice sociale, comme le note l’historien Stephen Knight.

Fiction vs réalité : la réalité – des hors-la-loi anonymes opérant dans un contexte de révolte – est vague et fragmentaire. La fiction, en créant un justicier romantique, répond à un besoin d’équité face à l’injustice, transformant un possible bandit en symbole intemporel. Cette légende, comme un récit d’espionnage, utilise des faits ténus pour tisser une couverture narrative irrésistible.

Ficelles Psychologiques

  • Biais de confirmation : les opprimés adhèrent à l’idée d’un héros redistributif, validant leurs frustrations contre les élites.
  • Effet de halo : le courage et l’altruisme de Robin occultent l’immoralité potentielle du banditisme, rendant le mythe séduisant.
  • Biais de disponibilité : les récits oraux, puis cinématographiques, dominent les perceptions, éclipsant les sources historiques ambiguës.
Robin des bois
Robin des Bois : le bandit romantique

 

B - Légendes Réelles : les héros amplifiés

  1. Jeanne d’Arc : de la Paysanne à la Sainte

L’histoire vraie : en 1429, Jeanne, une paysanne lorraine de 17 ans, convainc Charles VII de la laisser mener l’armée française contre les Anglais. Sa victoire à Orléans, documentée dans les chroniques, change le cours de la guerre de Cent Ans. Capturée par les Bourguignons, elle est vendue aux Anglais, jugée pour hérésie, et brûlée vive à Rouen en 1431. Réhabilitée en 1456 par un second procès, elle est canonisée en 1920, selon les archives de Rouen consultées par l’historienne Régine Pernoud.

La légende forgée : les visions de Jeanne, invérifiables, sont transformées en signe divin par l’Église et la couronne, qui en font une envoyée de Dieu. Les récits posthumes, comme ceux de Christine de Pizan, puis les œuvres modernes – pièces de George Bernard Shaw, film de Luc Besson (1999) – la dépeignent comme une guerrière mystique, occultant ses doutes humains et ses erreurs tactiques. L’État français et l’Église en font une sainte patriotique, symbole d’unité nationale, comme l’analyse l’historienne Marina Warner.

Fiction vs réalité : Jeanne était une adolescente courageuse, mais faillible, confrontée à des intrigues politiques complexes. La fiction – visions divines, sainteté intouchable – sert des agendas religieux et nationaux, transformant une figure humaine en icône inaccessible. Comme une légende d’espion, son récit mêle faits (victoires militaires) et fictions (intervention divine) pour captiver.

Ficelles Psychologiques

  • Effet de narration : Son arc tragique – visions, victoires, martyre – captive, transformant une vie brève en épopée.
  • Biais de confirmation : les Français, en quête d’unité, adhèrent à l’idée d’une héroïne nationale envoyée par Dieu.
  • Biais de disponibilité : les récits hagiographiques, relayés par l’Église et le cinéma, dominent, éclipsant les archives nuancées.
Jeanne d'Arc
Jeanne d’Arc : de la Paysanne à la Sainte

 

  1. Cléopâtre : la reine mythifiée

L’histoire vraie : Cléopâtre VII (69-30 av. J.-C.), dernière reine d’Égypte, fut une stratège brillante, parlant neuf langues et consolidant son royaume face à la montée de Rome. Ses alliances politiques avec Jules César, puis Marc Antoine, sont documentées par Plutarque et Dion Cassius, comme le détaille l’égyptologue Joyce Tyldesley. Après la défaite d’Actium (31 av. J.-C.), elle se suicide, marquant la fin de l’Égypte ptolémaïque.

La légende forgée : les Romains, pour justifier leur conquête, la dépeignent comme une séductrice manipulatrice, une menace orientale à l’ordre romain. Cette image, amplifiée par les récits d’Octave (futur Auguste), est reprise par Shakespeare dans Antoine et Cléopâtre (1607), puis par Hollywood dans Cléopâtre (1963) avec Elizabeth Taylor, qui la réduit à une femme fatale drapée de luxe. Ces récits occultent son génie diplomatique et ses efforts pour préserver l’Égypte, comme le note Tyldesley.

Fiction vs réalité : la réalité – une reine pragmatique naviguant dans un monde dominé par Rome – est éclipsée par une fiction de séduction et de décadence. Cette légende, comme une couverture d’espion, utilise des faits (ses alliances) pour tisser un récit biaisé servant l’impérialisme romain, tout en fascinant les générations.

Ficelles Psychologiques

  • Biais d’ancrage : Les récits romains, premiers à décrire Cléopâtre, fixent une image biaisée de séductrice, difficile à déloger.
  • Effet de halo : Sa beauté supposée, amplifiée par Hollywood, domine son génie politique, rendant le mythe plus séduisant.
  • Biais de confirmation : Les Romains, puis l’Occident, adhèrent à une Cléopâtre décadente pour justifier leur suprématie.

    Cléopatre
    Cléopâtre : la reine mythifiée

     

  1. Edward Snowden : héros ou traître ?

L’histoire vraie : en 2013, Edward Snowden, ancien contractant de la NSA, divulgue des documents classifiés révélant la surveillance mondiale des États-Unis, notamment via le programme PRISM. Publiés par The Guardian et The Washington Post, ces leaks exposent l’espionnage de citoyens, d’alliés, et de gouvernements. Réfugié à Hong Kong, puis en Russie, Snowden divise l’opinion, comme le documente la journaliste Laura Poitras dans Citizenfour (2014). Il est accusé de trahison par les États-Unis, mais célébré comme lanceur d’alerte par d’autres.

La légende forgée : pour les défenseurs des libertés, Snowden est un héros sacrificiel, risquant sa vie pour exposer les abus de pouvoir. Pour les autorités américaines, il est un traître, compromettant la sécurité nationale. Les médias, le film Snowden (2016) d’Oliver Stone, et les débats sur X amplifient ces récits, utilisant des techniques d’info-fiction similaires à celles de « Le Bureau des légendes », où les agents manipulent les perceptions, comme le note Bruno Fuligni. Les posts viraux, comme ceux relayant ses interviews, cristallisent ces légendes opposées.

Fiction vs réalité : Snowden est un individu complexe, ni pur héros ni traître absolu. La réalité – un homme confronté à des dilemmes éthiques, opérant dans un système opaque – est simplifiée par des fictions binaires servant des agendas politiques. Ces récits, comme une légende d’espion, mêlent faits (les leaks) et dramatisation (exil, menace) pour captiver.

Ficelles Psychologiques

  • Biais de confirmation : Les défenseurs des libertés adhèrent à la légende héroïque, les pro-sécurité à celle du traître, chacun filtrant les faits.
  • Effet de narration : Son arc dramatique – révélation, fuite, exil – captive, transformant un analyste en figure mythique.
  • Biais de récense : Les révélations de 2013, très médiatisées, dominent les perceptions, éclipsant les débats antérieurs sur la surveillance.
Snowden
Edward Snowden : héros ou traître ?


 

  1. autres exemples en annexe (4)
VII. Conséquences des légendes : entre inspiration et manipulation

Les légendes ne sont pas neutres. Elles inspirent des mouvements, mais aussi manipulent les esprits, polarisent les sociétés et figent des stéréotypes. Comprendre leurs impacts est essentiel pour aiguiser notre esprit critique.

 

Inspiration et cohésion : le pouvoir d’unir

Les légendes galvanisent. Jeanne d’Arc unifie la France en 1429, son courage inspirant une nation en guerre. Superman, né en 1938, redonne espoir à une Amérique en crise, comme le note Bradford Wright. « Le Bureau des légendes », en humanisant les espions, inspire des vocations à la DGSE, selon Fuligni, prouvant que les légendes, même fictives, ont un impact réel.

Dans l’ère numérique, les légendes comme celle de Greta Thunberg mobilisent des millions pour le climat. Ses discours, amplifiés par X, créent une communauté mondiale, comme l’analyse Rebecca Solnit, montrant le pouvoir des récits à fédérer.

 

Manipulation et polarisation : le côté sombre

Les légendes manipulent, souvent au service du pouvoir. La légende de Cléopâtre, en la réduisant à une séductrice, renforce les stéréotypes genrés et justifie l’impérialisme romain, selon Joyce Tyldesley. Edward Snowden divise : héros pour les défenseurs des libertés, traître pour les gouvernements, alimentant des guerres médiatiques, comme le documente Laura Poitras. Cette polarisation suit la « spirale du silence » d’Elisabeth Noelle-Neumann, où les minorités se taisent face aux récits dominants, amplifiant les divisions. La légende de Donald Trump comme « outsider » polarise les États-Unis, ses partisans défiant les médias mainstream, comme l’analyse Zeynep Tufekci.

Sur X, les légendes virales polarisent. En 2020, les mèmes sur des figures politiques, comme Donald Trump ou Alexandria Ocasio-Cortez, amplifient les divisions, transformant des individus en caricatures, selon Zeynep Tufekci. 

Cette manipulation, comme une opération d’espionnage, exploite nos émotions pour contrôler les récits.

 

Stéréotypes et désinformation : les dommages collatéraux

Les légendes figent des clichés. Dracula, en incarnant l’Est comme menaçant, alimente des préjugés xénophobes, comme l’analyse David Skal. L’info-fiction, comme dans True Lies, exagère les menaces géopolitiques, influençant les perceptions sur le terrorisme, selon le politologue Joseph Nye.

Les légendes peuvent aussi propager la désinformation. La légende philanthropique de certaines marques, comme les campagnes de « greenwashing », masque des pratiques polluantes, comme le révèle le journaliste George Monbiot. Les récits fictifs sur l’espionnage, bien que divertissants, simplifient les complexités géopolitiques, un risque que Fuligni souligne.

 

Héritage culturel et mémoire collective

Les légendes façonnent la mémoire collective, définissant l’identité culturelle sur des générations. La légende de Jeanne d’Arc, comme sainte patriotique, forge le nationalisme français, devenant un « lieu de mémoire », selon Pierre Nora. La légende de Dracula, amplifiée par Hollywood, façonne l’imaginaire gothique mondial, influençant la littérature, le cinéma, et le tourisme, comme le note David Skal. Dans l’espionnage, les légendes d’agents influencent la perception des services secrets où la série redéfinit l’image de la DGSE. 

Cet héritage montre que les légendes ne s’éteignent pas ; elles s’inscrivent dans la culture, orientant notre vision du monde.

 

Hollywood : l’usine à légendes

Hollywood est le maître de l’info-fiction, transformant acteurs et récits en mythes planétaires. True Lies (1994) illustre ce talent : Arnold Schwarzenegger y joue un espion charismatique, ancré dans les peurs réelles du terrorisme, mais amplifié par des cascades romanesques, comme le note Roger Ebert. Ce mélange brouille réalité et fiction, rendant le film addictif et façonnant des perceptions sur l’espionnage. Cette capacité s’étend aux séries et aux jeux vidéo. « Le Bureau des légendes », documentée auprès de la DGSE, crée des légendes d’espions crédibles, humanisant des agents anonymes, comme le note Bruno Fuligni. Le jeu Assassin’s Creed mythifie des figures historiques – Cléopâtre comme reine énigmatique, Léonard de Vinci comme génie universel – en mêlant faits et fiction, façonnant l’imaginaire des joueurs, selon l’historienne Joyce Tyldesley.

Hollywood
Hollywood : l’usine à légendes

Les acteurs eux-mêmes deviennent des légendes. Schwarzenegger, via Terminator et True Lies, incarne le héros d’action, son passé d’immigré autrichien éclipsé par son aura, selon la biographie de Marc Eliot. Marilyn Monroe, dans Les Hommes préfèrent les blondes (1953), est mythifiée comme une icône de féminité, ses combats contre les studios occultés, comme le documente Pauline Kael. Les studios protègent ces légendes via des contrats, des campagnes médiatiques et la censure des scandales, créant un écosystème où le mythe règne.

Hollywood influence aussi les légendes historiques. Le film Cleopatra (1963) redéfinit l’image de la reine égyptienne, la réduisant à une séductrice glamour, loin de la stratège décrite par Plutarque. Cette réécriture, comme une légende d’espion, sert des agendas culturels, renforçant l’hégémonie occidentale, selon Joyce Tyldesley.

 

Conclusion : une grille pour décoder le monde

Paris, 2025. Un post sur X devient viral, transformant une anecdote en légende en quelques heures. À Hollywood, un biopic réécrit l’histoire d’une star, occultant ses failles. À l’Élysée, des communicants polissent l’image d’un dirigeant, créant un mythe moderne. Les légendes, qu’elles naissent dans les planques de la DGSE, les studios de Los Angeles ou les réseaux sociaux, sont des récits puissants, mêlant faits, flou et fiction pour capturer nos esprits.

Grâce au « Bureau des légendes décrypté » de Bruno Fuligni, aux analyses de Roland Barthes, et à des exemples comme Dracula, Jeanne d’Arc, ou Edward Snowden, nous avons construit une grille de lecture : des objectifs (inspirer, contrôler, dissimuler) aux processus (strates, storytelling), des biais cognitifs (confirmation, halo) aux méthodes (répétition, info-fiction), jusqu’aux conséquences (inspiration, manipulation). Cette grille, illustrée par des schémas et des chronologies, vous permet de décoder les récits qui façonnent notre monde, qu’ils soient historiques ou viraux.

À l’avenir, les légendes évolueront avec l’IA et les deepfakes, amplifiant l’info-fiction. Des outils comme Grok pourraient créer des récits crédibles ou déconstruire des mythes, mais aussi propager des légendes truquées. Dans un prochain article, nous appliquerons ce cadre au couple Macron, analysant comment leurs légendes publiques – Emmanuel comme « mozart de la finance » (qui endette la France de 1000 milliards), Brigitte comme « première dame élégante » – ont été construites, quelles zones d’ombre, elles dissimulent, et comment des enquêtes, comme celle de Xavier Poussard, défient les récits officiels. Dans un monde où un mème sur X peut devenir une légende, démêler le vrai du faux n’est pas seulement une compétence : c’est une mission.

 

 

Annexe - L’Affaire Fact & Furious : d’un côté une légende médiatique de l’autre son décryptage

L’histoire vraie : en janvier 2021, Fact & Furious, un site de fact-checking fondé par Antoine Daoust, émerge de nulle part en France, obtenant un certificat IPG du ministère de la Culture et un contrat avec l’Agence France-Presse (AFP) pour prétendre lutter contre la désinformation, malgré l’absence de formation journalistique de l’ancien militaire et barman Daoust. Le 26 novembre 2022, le site ferme brusquement, et ses comptes sur les réseaux sociaux disparaissent. Depuis mars 2022, France-Soir enquêtait sur les cibles des articles de ce média, et après une vidéo de Malika Daoust au micro d’Idriss Aberkane, révélant oralement des informations fortement préjudiciables à Daoust, le 28 novembre, France-Soir publiait une enquête. Elle sera relayée par l’essayiste Idriss Aberkane, qui décrit le site comme une officine servant à « blanchir de fausses informations » et d’être lié à un réseau opaque de fact-checkers ciblant des figures comme Didier Raoult ou Christian Perronne. Cette enquête de France-Soir n'a fait l'objet d'aucun droit de réponse, ni de plainte en diffamation.

Le témoignage de Malika Daoust, épouse d’Antoine, allègue des violences conjugales (plainte et certificat médical à l'appui), un double langage anti-vaccins, et des pratiques qu’elle jugerait illégales (exemple de faux tests PCR). Les poursuites pour violence furent confirmées en 2024 avec une relaxe en 2025 alors que le procureur avait confirmé les violences, de manière surprenante, le tribunal ne retrouvera pas les certificats médicaux pourtant annexés à la plainte et aux conclusions de l’avocate de Malika Daoust. Comment le procureur aurait-il pu confirmer les violences sans une plainte accompagnée des certificats médicaux attestant de 6 jours puis 4 jours d’interruption de temps de travail ?

Légende tissée par Libé
Libération tisse une légende pour Fact & Furious 

Libération, via CheckNews (28 novembre 2022), répond en 10 heures, dépeignant France-Soir et Aberkane comme des « conspirationnistes » menant une « campagne de harcèlement » contre un « petit site indépendant », et révélant une tentative de rachat de Fact & Furious par France-Soir lors d’un appel téléphonique enregistré. Les faits – création, fausses informations, fermeture, plaintes, accusations – forment le socle d’une guerre narrative.

La légende forgée : Libération tisse une légende où Fact & Furious est un héros modeste, victime d’une offensive complotiste orchestrée par France-Soir et Aberkane, accusés de « dérives » et de « coups tordus ». Ce récit, amplifié par des posts sur X, victimise Antoine Daoust et s'exerce à discréditer France-Soir comme acteur de la désinformation. 

À l’inverse, France-Soir déconstruit la légende de Fact & Furious qui agitait comme une « officine » au service d’un réseau de fact-checkers autour de Rudy Reichstadt, organisée pour discréditer des dissidents comme Raoult ou les opposants au narratif officiel en utilisant toutes les étiquettes possibles sans preuve (antisémitisme, extrême droite,…). La légende de Libé polarise les lecteurs mainstream dans un narratif convenu alors France-Soir déconstruit méthodiquement et factuellement la pollution informationnelle de Libé.

Fiction vs réalité : la réalité – des informations biaisées d’un site servant un narratif convenu et contraire à l’éthique journalistique, des accusations graves avec des images de tests PCR portant les mêmes numéros, et une fermeture précipitée – est submergée par le récit fictionnalisé pratiqué par Libé. Libé pratique l’info-fiction, mêlant faits (fermeture du site) à une dramatisation (harcèlement complotiste) pour protéger l’image du fact-checking. France-Soir apporte les éléments factuels sur le rôle de Fact & Furious comme élément d’un « cartel », utilisant son enquête et des témoignages dont celui de Malika Daoust pour les décrypter. Comme dans « Le Bureau des légendes », où les agents tissent des couvertures crédibles, Libé a essayé de reprendre les éléments de narratif pour faire perdurer la légende créée autour de Fact&Furious pour captiver, brouillant vérité et fiction.

Ficelles Psychologiques

  • Biais de confirmation : les lecteurs de Libération valident la légende anti-conspirationniste, tandis que ceux de France-Soir qui pourraient croire en un complot médiatique, se retrouvent face à des éléments qui remettent en cause l’éthique des médias. Cela peut être vu comme un renforcement des préjugés de part et d’autres.
  • Effet de halo : Fact & Furious a habillé sa crédibilité via son contrat AFP, tandis que France-Soir tire son aura de son image de « média libre ».
  • Biais de disponibilité : le titre percutant « dérives complotistes » de Libération domine en tentant d’empêcher les lecteurs de s’intéresser à l’article de France-Soir et de reléguer les faits à un second rang. De son côté France-Soir titre « onde de choc » pour illustrer le choc de la fermeture d’un site qui sans aucun antécédent s’est retrouvé propulsé avec un contrat de l’AFP à tenter de vérifier des faits sans aucune expertise. L’AFP couvrant aussi l’histoire des violences conjugales avec Pauline Talagrand rédactrice à l’AFP qui avertira Antoine Daoust que sa femme l’avait appelée pour lui faire part de faits concernant Antoine Daoust. Talagrand écrira à Antoine Daoust : « vas-y mollo Antoine ».
  • Effet de narration : les récits dramatiques (lanceuse d’alerte vs victime de harcèlement) captivent, simplifiant une réalité nuancée.
Fact&Furious
L’Affaire Fact & Furious : d’un côté une légende médiatique de l’autre son décryptage

 

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