Utiliser la réalité virtuelle pour soigner les phobies, c'est possible

Auteur(s)
Amandine Zirah
Publié le 12 mai 2016 - 12:11
Mis à jour le 13 mai 2016 - 18:20
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Une femme qui a peur d'une araignée.
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©Atias Laurent/Sipa
La réalité virtuelle s'invite désormais dans les cabinets privés.
©Atias Laurent/Sipa
Grâce à un système de réalité virtuelle, le psychanalyste Rodolphe Oppenheimer soigne depuis plusieurs mois ses patients atteints de phobies. Quelle que soit leur peur,ils sont immergés dans un environnement qui les effraie et peuvent donc être directement confrontés à leur pire angoisse. Résultats garantis.

De plus en plus utilisés dans le domaine de la santé, les casques de réalité virtuelle s'attaquent désormais aux… phobies. Tout droit sortie du futur, cette nouvelle thérapie vient de débarqueren France où le psychanalyste Rodolphe Oppenheimer la pratique dans son cabinet privé, à Clichy-la-Garenne (Hauts-de-Seine)."Je me suis aperçu que certaines phobies, de par leur nature, contraignaient les gens à ne pas se soigner ou du moins d'avoir le minimum d'outils pour le faire",  explique-t-il à FranceSoir prenant l'exemple d'un agoraphobe (peur des grands espaces et des lieux publics) qui aura du mal à sortir de chez lui pour aller à la rencontre d'un professionnel. Même chose pour les phobies sociales. "Une personne qui a peur de rencontrer quelqu'un n'ira pas forcément consulter".

Conscient du problème qu'ils peuvent rencontrer, Rodolphe Oppenheimer a alors décidé de s'aventurer dans un domaine encore peu exploité dans l'Hexagone: la réalité virtuelle pour guérir les phobies, des plus minimes aux plus embarrassantes. Un pari gagnant puisqu'il enregistre actuellement "70% de guérison" grâce à cette nouvelle technologie. Pour lui, rien de plus efficace que de se confronter à ses peurs. "Moins on s'expose, moins on guérit. Ca empire le problème", confie-t-il précisant qu’il faut toutefois un minimum de volonté pour se soigner. Son remède: la combinaison psychanalyse et réalité virtuelle.

Concrètement, le protocole est toujours le même: une première séance pour bien comprendre ce dont souffre le patient, savoir depuis combien de temps et analyser le pourquoi du comment. Puis, vient le temps de l'immersion. "Grâce au casque de réalité virtuelle, on a reconstruit un certain nombre d'environnements. Le patient peut alors se confronter à ce qui l'effraie le plus". Toutefois, pour celles et ceux qui ne se sentent pas de rencontrer un professionnel en raison de leur phobie, le psychanalyste fait alors une consultation par Skype ou bien par téléphone. L'objectif: mettre la personne en confiance pour qu'un jour, elle puisse se déplacer.

Lors d'une séance d'immersion, le patient n'est pas directement confronté à ce qui lui fait peur. Le psychanalyste y va très progressivement et le plonge petit à petit dans un environnement créé avec la société C2care. Puis, le patient devra faire part de son niveau d'angoisse, sur une échelle de un à cent. Au total, il est recommandé de faire 10 à 12 séances, d'une heure chacune, pour aller mieux. Une très grande avancée sachant qu'à "l'époque, des personnes souffrant de gènes récurrentes restaient 15 à 20 ans en analyse".

Pour celles et ceux qui s'interrogent sur leur phobie, se demandant si elle peut éventuellement être guérie grâce à la réalité virtuelle, Rodolphe Oppenheimer, membre associé de l'Institut National de Psychanalyse, s'est montré clair:"ce qui va rentrer dans le domaine du casque de réalité virtuelle, c'est tout ce qui est lié aux TTC (thérapies comportementales et cognitives, NDLR), c'est-à-dire aux peurs paniques, aux crises d'angoisse et éventuellement aux ruminations". S'il pratique cette thérapie depuis maintenant trois mois, le psychanalyste a déjà fait face à des phobies peu communes. "J'ai travaillé avec une patiente qui avait peur de faire de la plongée à partir du moment où on pouvait trouver des détritus humains, explique-t-il tout en précisant qu'il "y a autant de phobies que l'on peut s'en imaginer". "Chacun a sa propre histoire".

Quant à la progression de la réalité virtuelle en Europe, la France n'est pas en retard et va même "prendre beaucoup d'avance". "Aujourd'hui, quelques hôpitaux sont équipés de cette technologie mais ils ont peu d'environnements à disposition", a-t-il affirmé précisant que le développement de cette technologie serait une réel révolution pour l'industrie pharmaceutique et remettrait donc en question leur modèle économique. "Lorsqu'une personne a une phobie, mes patients m'indiquent fréquemment se voir prescrire des médicaments", notamment des antidépresseurs. Si cet euphorisant peut aider certains à refaire surface ou bien devenir une béquille pour d'autres, il faut toutefois "affronter le problème".

Désormais, pour que son développement se poursuive, de nouvelles étapes doivent encore être franchies, à commencer par son accessibilité. "Il faut pouvoir l'utiliser à la maison. Avoir un matériel qui soit accessible tant sur le plan financier que sur celui de sa taille et donc de son encombrement". 

Cet article fait partie de notre dossier "Réalité virtuelle: un outil moderne et novateur pour la médecine" à consulter en cliquant ici.

 

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