Les "Panama Papers" mis en ligne, avec l'espoir de nouvelles révélations


Les "Panama Papers", qui ont alimenté une cascade de révélations sur l'évasion fiscale, seront en partie accessibles au public à partir de ce lundi 9 au nom de la "transparence" mais également dans l'espoir de débusquer de nouveaux scandales.
Après 18h GMT (20h en France), chaque internaute pourra consulter une base de données fondée sur les millions de documents du cabinet panaméen Mossack Fonseca, où figurent notamment le Premier ministre britannique David Cameron et son homologue islandais contraint à la démission, Sigmundur David Gunnlaugsson.
"C'est un cheminement naturel vers la transparence pour permettre à la société civile d'obtenir les informations de base sur les +Panama Papers+", explique dans un entretien à l'AFP Gerard Ryle, le directeur du Consortium international des journalistes d'investigation (ICIJ) qui a fait éclater le scandale.
Sa base de données de quelque 200.000 sociétés-écrans et particuliers se présentera comme un registre. Mais elle ne rendra que partiellement compte des quelque 11,5 millions de documents des "Panama Papers" qui n'ont, d'après l'ICIJ, pas encore livré tous leurs secrets.
"Il y a tellement de documents. C'est impossible de savoir ce que vous ratez jusqu'à ce que vous trouviez quelque chose", assure M. Ryle, qui estime qu'il faudra encore "plusieurs mois" avant de les explorer en intégralité.
Cette mise en ligne, que le cabinet Mossack Fonseca menace de contester en justice, répond d'ailleurs à un double objectif: faire œuvre de transparence mais également lever de nouveaux lièvres. "Les gens vont trouver des noms importants que nous avons ratés. Ils pourront contacter l'ICIJ et nous transmettre des tuyaux", affirme M. Ryle, ancien journaliste d'investigation en Australie et en Irlande.
Son organisation, basée à Washington, en a fait l'expérience après avoir mis en ligne des bases de données sur les précédents scandales des "Offshore Leaks" et des "LuxLeaks", sur des accords fiscaux secrets entre les multinationales et le Luxembourg. Plus de 500 "tuyaux" étaient alors parvenus à l'ICIJ, conduisant, pour certains, à de nouvelles révélations, affirme M. Ryle. L'enjeu est de taille: maintenir l'élan qui est né après les premières révélations parues dans plus de 100 journaux à travers le monde début avril.
Les "Panama Papers" ont éclaboussé des chefs d'Etat en Argentine, Ukraine et Russie mais également des stars du football (Lionel Messi) ou du cinéma (Pedro Almodovar), soulevant une onde de choc qui a contraint la communauté internationale à passer à l'action.
Mi-avril, les grandes puissances du G20 ont promis de dresser une nouvelles liste noire des paradis fiscaux non-coopératifs en l'assortissant de sanctions, et de tenter de lever le voile sur le secret entourant les sociétés offshore.
Plus récemment, jeudi, les Etats-Unis ont annoncé une série de mesures visant à mieux contrer les techniques d'évasion fiscale et de blanchiment d'argent via les sociétés-écrans, dont les "Panama Papers" ont révélé l'utilisation à grande échelle.
"Les +Panama Papers+ soulignent l'importance des efforts que les Etats-Unis ont menés au niveau national et les efforts entrepris avec nos partenaires internationaux pour faire face à ces défis communs", avait alors souligné la Maison Blanche. Selon M. Ryle, cette mobilisation montre que seul un scandale qui "embarrasse tout le monde" est de nature à faire bouger la communauté internationale.
Moins d'un an après les révélations des LuxLeaks fin 2014, les ministres des Finances de l'Union européenne avaient d'ailleurs adopté un mécanisme d'échange automatique d'informations sur les accords fiscaux passés entre Etats et multinationales, un effort jugé insuffisant par les ONG.
Qu'en sera-t-il quand le flot de révélations des "Panama Papers" commencera à se tarir? Les gouvernements tiendront-ils leurs engagements? "Seul le temps permettra de dire si les promesses ont été tenues", reconnaît M. Ryle, qui admet qu'il y a toujours un "danger" que la mobilisation ne s'essouffle. Les "Panama Papers" auront été, quoi qu'il arrive, salutaires, poursuit-il. "C'est une bonne chose que les dirigeants fassent des promesses car on peut maintenant leur demander des comptes".
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