TTIP et CETA : tout savoir sur ces deux traités qui suscitent de nombreuses inquiétudes

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 14 octobre 2016 - 21:17
Mis à jour le 17 octobre 2016 - 14:44
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Des opposants au CETA.
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©John Thys/AFP
L'impopularité des accords commerciaux internationaux est croissante dans les opinions publiques.
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Le Parlement de la Wallonie, une des assemblées législatives de Belgique, a opposé ce vendredi son veto à la signature par la Belgique de l'accord de libre-échange entre l'UE et le Canada (Ceta). Cet accord, sur le point d'être signé, suscite de nombreuses inquiétudes, tout comme celui en négociation avec les USA, le TTIP (ou Tafta).

Négocié depuis sept ans, le Ceta, parfois accusé de servir de "cheval de Troie" pour les Etats-Unis, prévoit la suppression des droits de douane pour presque tous les produits. Parmi les exceptions, certains produits agricoles, comme les viandes bovines et porcines dans le sens Canada-UE. L'accord fournit aussi une protection supplémentaire à un large éventail de produits européens d'origine géographique spécifique (AOC), tels le jambon de Parme ou le roquefort.

Grâce au Ceta, les entreprises de l'UE auront désormais accès aux marchés publics canadiens, y compris au niveau des villes et des provinces, qui gèrent une partie importante des dépenses publiques. Une avancée importante pour les Européens, qui avaient déjà donné un large accès à leur marché aux entreprises canadiennes.

Le Ceta ne modifiera pas les règles européennes sur la sécurité alimentaire ou la protection de l'environnement. Comme aujourd'hui, les produits canadiens ne pourront être importés et vendus dans l'UE que s'ils respectent la réglementation: le boeuf aux hormones, par exemple, ne sera toujours pas autorisé.

Contrairement au Ceta, le TTIP, accord commercial qui vise à supprimer les barrières douanières et règlementaires entre les Etats-Unis et l'UE, est loin d'être bouclé. Entamées en 2013, les négociations piétinent. Fin septembre, l'UE a renoncé à conclure ce dossier sous l'administration de Barack Obama. Et la perspective des élections aux Pays-Bas, en France et en Allemagne en 2017 devrait encore repousser la fin des discussions.

Tout d'abord parce que le TTIP concerne les USA, première puissance économique et politique mondiale. "C'est la première fois que l'UE négocie un accord avec un partenaire équivalent en taille", souligne Sébastien Jean, directeur du centre de recherche français CEPII. "L'UE et les Etats-Unis étaient jusqu'ici habitués à partir de leur position quand ils commençaient à négocier". D'où la crainte de chaque côté de l'Atlantique qu'un certain modèle ne soit imposé à l'autre.

En outre, la relation des Européens avec les Etats-Unis est plus compliquée qu'avec le Canada. "En France, le débat n'est pas exempt de relents anti-américanistes (...) Et en Allemagne, après le scandale (d'espionnage, ndlr) de la NSA, la méfiance vis-à-vis de ce partenaire a grandi", rappelle M. Jean. Pour ne rien arranger, les discussions ont démarré de manière plutôt confidentielle entre négociateurs américains et européens, une opacité dénoncée par les opposants au traité.

Enfin, "l'ambition du TTIP est plus grande en matière réglementaire que pour le Ceta. Au départ, on a parlé d'harmonisation réglementaire, un terme trompeur, alors qu'il s'agissait plutôt de coopération. Une grande partie de l'opposition en Europe est notamment liée à cette suspicion que cet accord reviendrait à subordonner nos réglementations et protections environnementales et des consommateurs aux intérêts des grandes multinationales", constate M. Jean.

Un point particulièrement sensible, aussi bien pour le Ceta que le TTIP, porte sur la possibilité donnée aux multinationales qui investissent dans un pays étranger de porter plainte contre un Etat adoptant une politique publique contraire à leurs intérêts propres. L'opinion allemande s'est mobilisée sur le sujet, échaudée par une plainte déposée, dès 2012, par un opérateur de centrales contre le gouvernement, qui avait décidé d'abandonner progressivement le nucléaire après la catastrophe de Fukushima.

En février 2016, le Canada a fait un pas en direction des Européens en acceptant que soit renforcé le droit des gouvernements d'imposer des règlements aux investisseurs. Avait été également convenue la mise sur pied d'un tribunal permanent composé de 15 juges professionnels nommés par l'UE et le Canada. C'est "une sorte de Cour publique des investissements qui ouvre la voie à une Cour internationale des investissements", estime un négociateur européen. Mais les ONG estiment qu'elle ne va pas assez loin.

Les ministres européens devraient en principe valider officiellement cet accord mardi 18 octobre, lors d'une réunion où sera présentée la "déclaration interprétative" de l'UE et du Canada, envoyée la semaine dernière aux 28 Etats membres pour lever les dernières inquiétudes.

Le Ceta doit ensuite être signé par l'UE, au nom des 28 Etats membres, et le Canada, en présence du premier ministre, Justin Trudeau, le 27 octobre à Bruxelles. Il entrera en application provisoire et de façon partielle dès que le Parlement européen l'aura approuvé, a priori d'ici la fin de l'année.

Le veto wallon pourrait toutefois peser sur ce calendrier. En tout état de cause, les différents Parlements nationaux devront ensuite ratifier le Ceta pour que le Traité entre définitivement en vigueur, ce qui peut prendre des années.

 

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