En Italie, la délicate valse des directeurs publics avec le nouveau gouvernement

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Par Fanny CARRIER, avec Céline CORNU à Milan - Rome (AFP)
Publié le 03 août 2018 - 10:02
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e vice-Premier ministre italien Luigi Di Maio à Rome, le 12 juin 2018
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© Alberto PIZZOLI / AFP
Le nouvel exécutif italien a obtenu la démission du patron des chemins de fer, Renato Mazzoncini, en dépit de ses bons résultats
© Alberto PIZZOLI / AFP

Le nouveau gouvernement populiste italien s'est lancé dans une valse des directeurs d'entreprises et d'organismes publics, déclenchant de vives tensions, en particulier autour de l'audiovisuel public.

C'est une tradition liée à toute alternance, mais l'union composite du Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème) et de la Ligue (extrême droite), au pouvoir depuis deux mois, provoque dans ce domaine des étincelles.

Le chef de l'Institut national de la Sécurité sociale (Inps), l'économiste Tito Boeri, s'est d'abord attiré les foudres de Luigi Di Maio, le chef de file du M5S, et de Matteo Salvini, le patron de la Ligue.

La raison: des déclarations de M. Boeri en faveur de l'immigration, nécessaire selon lui pour payer les retraites, ou sur le fait que la réforme du travail voulue par le M5S allait conduire à la suppression de milliers d'emplois.

MM. Di Maio et Salvini ont réclamé son départ à grands cris, avant de décider d'attendre l'expiration de son mandat fin 2018, alors que sur les réseaux sociaux, des internautes détaillaient le CV de l'expert face à ceux particulièrement maigres de ses deux détracteurs.

Egalement dans la ligne de mire du nouveau gouvernement: le président du gendarme de la Bourse, Mario Nava, arrivé en avril après avoir pris un congé de son poste de directeur à la supervision des institutions financières au sein de la Commission européenne.

Des parlementaires M5S le soupçonnent de bénéficier, grâce à son statut à la Commission, "d'une immunité substantielle" face à la justice italienne, ce qui selon eux est incompatible avec ses responsabilités au sein de la Consob.

Le chef du gouvernement, Giuseppe Conte, a demandé à la Consob de l'informer à ce sujet.

"Des gens qui avaient accusé la Consob de bureaucratisme et de formalisme se retranchent derrière la motivation la plus bureaucratique" qui soit, a dénoncé l'économiste Marco Onado, ex-commissaire de la Consob, dans un éditorial publié par Il Sole 24 Ore.

Il a fustigé "une peur de l'occupation du pouvoir qu'aucun gouvernement n'avait jamais montrée dans l'histoire de la République italienne".

De manière plus classique, le nouvel exécutif a obtenu la démission du patron des chemins de fer italiens, Renato Mazzoncini, en dépit de ses bons résultats.

- Bataille pour la Rai -

En trois ans, le groupe a connu une croissance de 18% par an, tandis que le nombre de passagers a progressé de 25% entre 2014 et 2018.

Le ministre des Transports a évoqué une question d'"éthique" pour demander la révocation du conseil d'administration du groupe, au motif que celui-ci n'avait pas lancé de procédure quand M. Mazzoncini a été renvoyé devant la justice pour une affaire de fraude plus ancienne.

Mais ces batailles sont restées discrètes par rapport à celle lancée pour la présidence de la Rai, institution qui gère les chaînes publiques de télévision et de radio et qui fait traditionnellement l'objet d'un partage entre les différentes forces en présence au gouvernement.

Après plusieurs semaines de tractations, la Ligue et le M5S se sont accordés sur Marcello Foa, un journaliste italo-suisse de 55 ans, présenté par la presse comme un souverainiste pourfendeur de la "pensée unique".

Cette nomination a provoqué une volée de critiques, à droite comme à gauche. Au point que mercredi, la commission parlementaire de surveillance a refusé de valider ce choix, avec une opposition frontale des élus de Forza Italia, le parti de Silvio Berlusconi.

Or, la Ligue et Forza Italia avaient fait campagne commune pour les législatives de mars, au sein d'une coalition de droite qui reste en vigueur dans nombre d'instances locales.

Furieux, M. Salvini a fustigé le choix du vieux milliardaire de "s'opposer au changement", en insistant sur son succès dans les sondages alors que Forza Italia est en chute libre.

"Marcello Foa est une personne appréciée, estimée en Italie", a-t-il insisté.

Plus prudent, M. Di Maio plaide pour une "alternative". En effet, M. Foa assure désormais la présidence de la Rai en tant que doyen du conseil d'administration, un pied de nez au vote des parlementaires qui s'accorde mal avec les idéaux du M5S, né d'une révolte contre les arrangements de la vieille classe dirigeante.

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