Accident de Millas : "partager la peine" des victimes et des proches est "essentiel"

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Par AFP
Publié le 15 décembre 2017 - 14:02
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Des élèves, accompagnés par une mère et une gendarme, arrivent au collège Christian Bourquin, près d
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Des élèves, accompagnés par une mère et une gendarme, arrivent au collège Christian Bourquin, près de Perpignan, le 15 décembre 2017
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L'aide aux victimes, comme celles de l'accident de Millas, passe par une prise en charge psychologique mais aussi par des "rituels" sociaux comme des rassemblements, essentiels pour qu'elles se sentent entourées, explique à l'AFP Carole Damiani, docteur en psychologie clinique et directrice de l'association "Paris Aide aux victimes".

QUESTION: Quel est le rôle de la cellule d'urgence médico-psychologique mise en place à Millas ?

REPONSE: "Pour les personnes qui ont assisté à l'événement, directement impliquées voire blessées, le traumatisme psychique se met en place très rapidement. On est d'autant plus efficace qu'on intervient tôt.

Les victimes ressentent très vite un sentiment d'abandon, parce qu'elles ont l'impression qu'on ne va pas les comprendre. C'est important qu'il y ait des professionnels formés auprès d'elles pour montrer qu'ils savent ce qu'est un traumatisme. Cette cellule a aussi pour fonction d'initier une prise en charge qui, pour certains, peut être longue."

Q: Quelles sont les personnes à prendre en charge ?

R: "Toutes les personnes impliquées de près. Celles qui étaient là au moment de l'événement, les parents en deuil, les parents de victimes pour lesquels on va faire de la +guidance+, c'est-à-dire les aider à trouver les bonnes réponses, ce n'est pas évident de se retrouver avec un enfant qui est complètement perdu, qui ne dort plus, qui régresse.

Il y a des debriefings pour les personnels de secours bien sûr. Ils sont habitués mais personne n'est jamais indemne devant la mort d'enfants, surtout dans ces circonstances particulièrement horribles.

Ce qui est important aussi, ce sont tous les rituels. Il y aura peut-être un hommage dans la commune des enfants. Spontanément il y a souvent des rassemblements, des fleurs, parfois des minutes de silence, des marques de soutien aux proches. C'est important parce qu'ils se sentent entourés. Le fait qu'on partage leur peine est essentiel."

Q: Le collège a rouvert ses portes pour "libérer la parole". Quel rôle ont les enseignants ?

R: "Les enseignants sont des référents stables généralement pour les enfants, donc il est important qu'ils puissent communiquer. Eux-mêmes sont pleins d'émotion, avec les psychologues, ils vont échanger sur la façon de parler aux enfants et gérer leurs émotions. Les enseignants posent parfois des questions telles que "est-ce que je dois cacher mes émotions, est-ce que je peux dire que je suis très ému ?"

Le fait que le collège soit ouvert, cela aide, cela veut dire que la vie continue quelque part, l'école est un repère. Ce serait peut-être encore pire pour les enfants de se retrouver tout seuls chez eux."

Q: Quel traumatisme vivent les victimes ?

R: "Il y a d'une part le traumatisme d'avoir rencontré la mort, ils auraient pu mourir, l'image de cette rencontre avec la mort va s'incruster auprès d'eux et ils ne vont pas arrêter d'y penser. Ils risquent de développer des troubles anxieux, ne plus monter dans un bus ou un autre moyen de transport.

D'autre part il y a le deuil, le deuil de leur copain qui était assis à côté d'eux, avec très souvent la culpabilité de se dire 'je n'ai pas pu le sauver, je n'ai pas pu l'aider, j'aurais pu être à sa place'."

Q: Comment se passe la prise en charge ?

R: "Il y a des techniques thérapeutiques qui vont permettre d'apaiser un peu les images qui envahissent et de travailler sur les évitements phobiques. Parfois cela ne se manifeste pas tout de suite. Il est important de donner aux victimes des adresses pour leur permettre de consulter à bon escient par la suite. La cellule d'urgence, c'est très bien mais cela ne suffit pas. Cela se passe aussi sur la durée. Cela peut prendre des mois, le temps qu'il faudra."

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