Le +cashless+, monnaie courante et business juteux pour les festivals

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Par Wafaa ESSALHI - Rennes (AFP)
Publié le 19 septembre 2018 - 16:32
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Au festival Art Rock à Saint-Brieuc, le 25 mai 2012
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© FRED TANNEAU / AFP/Archives
Au festival Art Rock à Saint-Brieuc, le 25 mai 2012
© FRED TANNEAU / AFP/Archives

Payer sa bière ou sa galette saucisse en +cashless+ est devenu monnaie courante dans les festivals. Ce système réduit l'attente et sécurise les transactions mais les modes de remboursement et la possible exploitation des données font grincer des dents.

"Le cashless (sans espèce) est rentré dans les moeurs, c'est comme le paiement sans contact à la boulangerie", explique Carol Meyer, directrice du festival Art Rock à Saint-Brieuc qui est passé en 2016 à la démonétisation sous forme de carte à puce puis au bracelet rechargeable qui sert aussi de ticket d'entrée.

"Avant, on se retrouvait avec une poignée de jetons dans une poche pour payer ses boissons et des tickets pour les repas dans l'autre", justifie la directrice.

Les Trans Musicales de Rennes abondent: "L'attente au bar est réduite, on perd moins de temps à chercher sa monnaie, son code de carte bancaire et si on perd son bracelet, on le désactive", précise Chloé Poisson, responsable des relations avec le public.

"69% des festivaliers sont favorables au cashless", selon une étude du cabinet Gece, réalisée pour les Art Rock en 2016.

Si ce mode de paiement séduit, certains grincent des dents une fois l'euphorie du festival terminée.

"J'ai rechargé 15 euros sur mon bracelet que je n'ai pas utilisés. J'étais bien trop défoncée pour me faire rembourser à la borne", raconte Angèle. La jeune festivalière du Sonar à Barcelone n'a pas non plus respecté le temps imparti pour récupérer le montant disponible en ligne.

Résultat: la somme tombe automatiquement dans les caisses du festival en "donation".

La Route du Rock à Saint-Malo récupère ainsi "entre 10.000 et 30.000 euros", selon les années. "Ça permet d'éponger nos dettes", admet Romain Gislais, en charge de la comptabilité.

En moyenne, entre un et deux euros par personne sont laissés sur les bracelets, indique Carol Meyer, un pactole non négligeable.

"On fait une grosse politique de communication pour les modalités de remboursement, la date limite est indiquée sur le bracelet", assure Art Rock. "A un moment donné, il faut clôturer notre compte avec le prestataire" de cashless.

- marché en plein essor -

Face au tollé, des festivals comme Les Francofolies, Marsatac, les Trans Musicales acceptent désormais de rembourser même hors délai. Les Vieilles Charrues à Carhaix, plus grand festival de musique de France, ont décidé de restituer automatiquement les sommes sur les cartes bancaires dès la fin du festival.

"Les gens ont confiance, on n'est pas là pour les arnaquer", rétorque Jérôme Tréhorel, directeur des Vieilles Charrues, qui dépense une centaine de milliers d'euros pour le cashless.

"Dans certains festivals, on met 20 euros de cashless et on se retrouve avec deux euros en moins d’office, on taxe la consigne et le prix du bracelet", dénonce-t-il.

Les prestataires font payer la location des terminaux de paiement, les bracelets et le logiciel. Un coût très vite rentabilisé.

Pour le président de PayinTech, Bertrand Sylvestre: "C'est mathématique, le système réduit la queue au bar donc accélère les ventes".

"On observe une augmentation de 15 à 20% des ventes", appuie Martin Rigot-Muller de chez Yuflow, qui gère Les Francofolies à la Rochelle.

Le festivalier devient "un consommateur" et "le cashless va soutenir la diversité de l'offre". "80% des festivals en France en sont équipés, c'est un marché de plusieurs millions d'euros qui va en augmentant", assure la patron de Yuflow qui fournit également les stades, parcs d'attractions, hôtels.

Certains festivals font de la résistance: aux Eurockéennes de Belfort il est possible de payer sa pizza en espèces. L'argument du directeur: "On défend l’idée du festival comme un espace de liberté", face au risque d'"exploitation des données".

Du côté des prestataires on assure "ne pas exploiter" ces données. "Nos clients sont les organisateurs de festival, on n'est pas en contact avec le grand public", précise Yuflow.

Marsatac à Marseille les utilise pour "savoir quel bar a mieux fonctionné et à quelle heure", explique Laurence Chansigaud. "On ne garde pas plus d'informations que celles de la billetterie".

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