Au procès de Montigny-lès-Metz, de lointains souvenirs et la "marque" de Francis Heaulme

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Par Anne LEC'HVIEN - Versailles (AFP)
Publié le 12 décembre 2018 - 21:48
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Des témoins qui le situent à proximité des faits, des similitudes avec ses autres crimes: les éléments liant Francis Heaulme au double meurtre de Montigny-lès-Metz, qu'il a toujours nié, ont été à nouveau scrutés mercredi lors de son procès en appel à Versailles.

"J'ai ramené cette personne qui est là, dans le box des accusés, voilà". A la barre, un menuisier de 62 ans, sur la défensive. "On me fait répéter toujours la même chose, qu'est-ce que vous voulez qu'on raconte de plus...", s'agace Joachim Cadete.

Dans ce double meurtre qui remonte au 28 septembre 1986, la procédure a rendu impossible toute preuve matérielle et l'accusé répète la même antienne: "Montigny, c'est pas moi". La cour d'assises des Yvelines en est donc réduite à étudier des éléments indirects dont les souvenirs de témoins interrogés pour certains à de multiples reprises.

C'est le cas de M. Cadete qui dit avoir rencontré Francis Heaulme ce jour-là, au bord de la Moselle, l'avoir trouvé "accroupi" avec du sang sur le visage, et l'avoir ramené dans sa 4L après une partie de pêche, à la tombée de la nuit.

"On lui a demandé ce qu'il s'était passé, il a dit qu'il avait fait une chute sur les cailloux", résume-t-il.

Pourquoi avoir témoigné seulement en 2002 ? "On a mis du temps, mais on l'a fait", se défend Emile David, son beau-frère, qui était avec lui. "C'était très difficile de prendre une décision, de vouloir témoigner, pour pas qu'on nous fasse des reproches, 15 ans après", dit-il.

Ces témoignages avaient, à l'époque, étoffé la défense de Patrick Dils, condamné en 1989 et finalement innocenté après 15 ans de prison.

Ils situent Francis Heaulme à 4 km des lieux du crime, autour de l'heure de la mort de Cyril Beckrich et Alexandre Beining, tous deux âgés de 8 ans. A l'audience, dans des échanges parfois très tendus, la défense du "routard du crime" met en doute l'heure, puis la date de cet épisode.

Dans le box, l'accusé observe l'audience derrière ses lunettes. Au fil des années, il a livré de nombreuses versions de ce dimanche. A Versailles, il a confirmé avoir pris son vélo pour aller au cimetière, passant à l'aller et au retour le long du talus où ont été retrouvés les corps. Mais il n'est jamais monté, répète-t-il.

Interrogé sur les pêcheurs, il secoue la tête: "Je me rappelle plus". "C'est tellement +questionné+ que je mélange tout", dit-il.

- "Contexte criminel" -

Ces différentes versions ont occupé le gendarme qui arrive, plus tard, à la barre. Entre 2000 et 2002, 15 ans après les faits, Francis Hans a été chargé d'enquêter en vue du 3e procès de Patrick Dils, qui mènera à son acquittement.

Son équipe a mis en évidence des similitudes entre les neuf meurtres pour lesquels Francis Heaulme a été condamné et la scène de Montigny-lès-Metz: une "violence extrême", un "déshabillage" des victimes et des "hospitalisations" quelques jours après les meurtres notamment.

Il y a "un contexte criminel dans lequel il passe à l'acte, ce contexte, il lui est propre", assure M. Hans. "C'est sa marque à lui".

L'ex-enquêteur raconte aussi que l'accusé a dit au cours d'une audition avoir croisé le 28 septembre 1986 un "détraqué sexuel" en bas du talus, qui s'appelait "Henri Leclaire".

Ce manutentionnaire, qui avait avoué les faits avant de se rétracter en 1986, a de nouveau été mis en cause en 2014, mais définitivement blanchi. Il doit être entendu jeudi matin à Versailles.

Soulignant d'autres variations de l'accusé, M. Hans conclut: "C'est lui seul qui détient la vérité".

"Vous l'avez dit, vous avez dû +prioriser+", lance Me Alexandre Bouthier pour la défense, soulignant que la "piste" d'une "Fiat Panda" aperçue par plusieurs témoins a été écartée, comme le témoignage d'un enfant ayant vu un homme ensanglanté qui n'était "ni Dils, ni Heaulme".

"Vous avez peut être appris par la suite" que, "malgré vos conclusions", un juge d'instruction "a ordonné un non-lieu" au profit de Francis Heaulme, glisse ironiquement l'avocat à l'adresse du témoin. Un non-lieu infirmé, dans un second temps, par la justice.

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