"Tu serais prêt à tirer dans la foule ?" : 20 ans de réclusion requis contre une recrue d'Abaaoud

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Par Caroline TAIX - Paris (AFP)
Publié le 24 février 2020 - 22:23
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Le parquet de Paris a requis la peine maximale, vingt ans de réclusion, contre Reda Hame, un Parisien recruté et entraîné en Syrie en juin 2015 par Abdelhamid Abaaoud, le coordinateur des attentats du
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Le parquet de Paris a requis la peine maximale, vingt ans de réclusion, contre Reda Hame, un Parisien recruté et entraîné en Syrie en juin 2015 par Abdelhamid Abaaoud, le coordinat
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"Pensez-vous qu'Abaaoud l'aurait choisi s'il n'avait pas perçu sa détermination?" Le parquet a requis lundi à Paris la peine maximale, vingt ans de réclusion, contre Reda Hame, un Parisien recruté et entraîné en Syrie en juin 2015 par Abdelhamid Abaaoud, le coordinateur des attentats du 13-Novembre.

Reda Hame, un ancien technicien en informatique de 34 ans, a rejoint le groupe Etat islamique en juin 2015 en Syrie. Il y est resté huit jours: pendant trois jours, Abdelhamid Abaaoud l'a formé à la kalachnikov, puis l'a raccompagné à la frontière turque en lui donnant 2.000 euros et 500 dollars en liquide et une mission: commettre un attentat en Europe.

"Si on te passe de quoi t'armer, est-ce que tu serais prêt à tirer dans la foule?", lui avait demandé Abaaoud. "Par exemple, imagine un concert de rock", avait ajouté "l'émir". Cinq mois plus tard, trois commandos de jihadistes, dont Abaaoud, attaquaient le Bataclan pendant un concert, ainsi que le Stade de France et des terrasses bondées à Paris, faisant 130 morts.

Reda Hame a été arrêté à Paris en août 2015. Il affirme avoir feint d'accepter cette mission meurtrière uniquement pour rentrer en France. "Jamais de la vie je n'aurais fait de mal à quelqu'un", a-t-il dit à la cour d'assises spéciale qui le juge depuis jeudi. "Quand j'ai vu ce qu'ils faisaient contre des civils, je me suis dit: +Ils sont tarés+".

Reda Hame, qui a passé quatre ans et demi en détention provisoire, est jugé pour participation à une association de malfaiteurs à visée terroriste. L'avocate générale a requis vingt ans de réclusion criminelle avec une période de sûreté des deux tiers. Il s'agit de la peine maximale encourue, les faits jugés remontant à 2015. La loi du 21 juillet 2016 a fait passer cette peine à trente ans.

Reda Hame "rejoint la Syrie au moment où les plus acharnés, ceux qui vont frapper l'Europe, la France, partent", a déclaré la magistrate du Parquet national antiterroriste. "Devait-il lui-même participer aux attentats du 13-Novembre ?", a-t-elle interrogé. Malgré les dénégations de l'accusé, la question plane depuis le début du procès.

- "Vous étiez opérationnel ?"-

Il est soupçonné d'avoir rencontré Mohamed Abrini, un proche d'Abaaoud qui passe pour un logisticien des attentats du 13-Novembre.

Autre question de l'avocate générale: "Pensez-vous qu'Abaaoud l'aurait choisi s'il n'avait pas perçu sa détermination?". Reda Hame s'est comporté selon elle "comme un soldat" qui "suit les instructions". Au lieu de rentrer directement en France, il passe par l'Europe de l'Est, Prague et Budapest, comme le lui avait demandé Abaaoud.

A Paris, entre son retour et son arrestation, il reprend une vie normale: il sort avec sa petite amie, fait du shopping. Mais il fait aussi des recherches sur Youtube avec les mots "kamikaze" et "suicide bombers".

Reda Hame a martelé qu'il avait fait avec le groupe Etat islamique "un abandon de poste". Il n'a pas appelé Abdelhamid Abaaoud de Prague, comme ce dernier le lui avait demandé. L'accusé aux cheveux coupés ras et à la barbe de trois jours dit avoir jeté ses coordonnées.

Il explique avoir voulu rentrer en France "très vite" après son arrivée à Raqqa. "Quand ils ont gardé mon passeport, je me suis senti piégé". Il a été pris en charge par Abaaoud qui aurait, selon lui, été intéressé par son profil discret et son passeport toujours valide.

Ce jihadiste a entraîné personnellement Reda Hame. "On partait tous les deux dans son pick-up, à 50 kilomètres de Raqqa" pour s'entraîner. "Ce qu'on me demandait de faire n'était pas excessivement difficile, pas très technique". Abaaoud recherchait "l'efficacité", a expliqué l'accusé: "faire le plus grand nombre de victimes possible, c'était ça l'efficacité", a rebondi la présidente Xavière Simeoni.

Au bout de trois jours, Abaaoud lui a dit: "c'est parfait, la formation est terminée". "Vous étiez opérationnel?" a interrogé la présidente. "Oui. (...) A l'époque j'étais capable de me servir d'une kalachnikov", a répondu Reda Hame.

Le verdict est attendu mardi.

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