Echec d'un coup d'Etat au Gabon au moment où le président, malade, était à l'étranger

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Par Amaury HAUCHARD - Libreville (AFP)
Publié le 07 janvier 2019 - 16:47
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Des gendarmes gabonais patrouillent dans le quartier Cocotiers près du siège de la radio-télévision nationale (RTG) à Libreville, le 7 janvier 2019
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© Steve JORDAN / AFP
Des gendarmes gabonais patrouillent dans le quartier Cocotiers près du siège de la radio-télévision nationale (RTG) à Libreville, le 7 janvier 2019
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Une tentative de coup d'Etat menée par une poignée de soldats a échoué lundi au Gabon, pays dont le président, malade, est absent depuis deux mois et demi et où le gouvernement n'assure plus que les affaires courantes.

Le chef du commando, le lieutenant Ondo Obiang Kelly, commandant-adjoint de la Garde républicaine (GR) chargée de la protection de la présidence, a été arrêté et deux autres membres du commando ont été tués, a annoncé la présidence.

Un groupe de militaires est apparu lundi à l'aube à la radio-télévision nationale (RTG) appelant à un soulèvement et annonçant la prochaine formation d'un "Conseil national de restauration" de la démocratie.

Le chef du groupe "a été arrêté", selon la présidence. "La situation est sous contrôle".

Les forces de sécurité ont "pris le bâtiment (de la radio) d'assaut, abattu deux membres du commando et libéré les otages", selon un communiqué. Les membres du commando, après avoir "neutralisé" des gendarmes ont lu leur communiqué.

Les forces de sécurité ont été déployées, a déclaré le porte-parole du gouvernement, Guy-Bertrand Mapangou. Les frontières du pays restent ouvertes.

En revanche, l'internet était toujours coupé dans Libreville en soirée. L'ONG Internet sans frontières a "condamné avec la plus grande fermeté la coupure internet intervenue au Gabon le 7 janvier 2019, à la suite d'une tentative de coup d'Etat militaire".

M. Mapangou, a parlé d'une dizaine de militaires impliqués dans la tentative de coup d'Etat. La présidence avait indiqué auparavant que six militaires étaient impliqués.

"Il ne sera toléré aucun trouble et aucune incitation à la haine ni à l'insurrection", a ajouté le porte-parole, invitant les Gabonais "à vaquer librement à leurs activités".

La RTG a repris ses programmes lundi soir.

En début de soirée, les rues de Libreville étaient calmes et vides.

L'Union africaine a "fermement" condamné "la tentative de coup", réaffirmant "le rejet total par l'UA de tout changement inconstitutionnel de pouvoir".

Paris a également condamné cette tentative de coup d'Etat, appelant au "strict respect" de la Constitution dans cette ancienne colonie française et pays producteur de pétrole.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a condamné la tentative de putsch et lancé un appel pour que tous les acteurs politiques suivent les moyens constitutionnels. M. Guterres a toujours été opposé "aux changements de pouvoir non constitutionnels, surtout par la force", a indiqué son porte-parole, Stéphane Dujarric.

- Blindés -

Dans la matinée, des coups de feu ont été entendus. Des blindés avaient bloqué l'accès à l'un des grands boulevards de Libreville.

Dans un seul quartier populaire proche de la radio, des dizaines de jeunes ont incendié une voiture et enflammé des pneus, semblant vouloir répondre à l'appel au soulèvement des mutins.

Les forces de l'ordre ont tiré des gaz lacrymogènes pour disperser les manifestants.

Le lieutenant Ondo Obiang Kelly s'est dit président d'un Mouvement patriotique des jeunes des forces de défense et de sécurité du Gabon (MPJFDS). Deux militaires, coiffés des bérets verts de la GR et tenant des fusils d'assaut, se tenaient derrière lui lors de la lecture de son message.

Le mouvement "demande à tous les jeunes des forces de défense et de sécurité et à toute la jeunesse gabonaise de se joindre à nous", a déclaré le militaire en annonçant la prochaine formation d'un "Conseil national de restauration" afin de "garantir au peuple gabonais une transition démocratique".

- "Si vous dormez, réveillez-vous!" -

Victime d'un accident vasculaire cérébral (AVC) le 24 octobre, le chef de l'Etat, Ali Bongo Ondimba, âgé de 59 ans et dont la famille est au pouvoir depuis 1967, a été transféré au Maroc, où il poursuit depuis sa convalescence.

La vacance du pouvoir n'a pas été déclarée en l'absence du chef de l'Etat. La Cour constitutionnelle a transféré une partie de ses pouvoirs au Premier ministre et au vice-président.

"Si vous êtes en train de manger, arrêtez. Si vous êtes en train de prendre un verre, arrêtez. Si vous dormez, réveillez-vous. Réveillez vos voisins (...), levez-vous comme un seul homme et prenez le contrôle de la rue", a encore déclaré le militaire à la radio. Il a invité "tous les hommes du rang et les sous-officiers" à se procurer "armes et munitions" et à "prendre le contrôle" des points stratégiques du pays.

Le militaire a appelé la population à les soutenir, "pour sauver le Gabon du chaos".

Le 31 décembre, le président Bongo, affaibli, avait pris la parole de Rabat pour la première fois depuis son hospitalisation. Sa déclaration du nouvel an a été qualifiée par les militaires putschistes de "honte" pour un "pays (qui) a perdu sa dignité".

Les militaires putschistes ont dénoncé la "confiscation du pouvoir par ceux qui le 31 août 2016 ont fait assassiner nos jeunes compatriotes", en référence aux troubles qui avaient suivi la dernière présidentielle qui avait vu la réélection, contestée par l'opposition, d'Ali Bongo.

Le président a succédé en 2009 à son père Omar, à la mort de ce dernier, et a été réélu en 2016. Omar Bongo a dirigé le Gabon de 1967 à sa disparition.

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