Thaïlande : l'ex-Premier ministre Thaksin dénonce un scrutin "truqué"

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Par Jerome TAYLOR et Sophie DEVILLER - Bangkok (AFP)
Publié le 25 mars 2019 - 17:07
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L'ancien Premier ministre de Thaïlande Thaksin Shinawatra interviewé à Hong Kong par l'AFP le 25 mars 2019
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© ISAAC LAWRENCE / AFP
L'ancien Premier ministre de Thaïlande Thaksin Shinawatra interviewé à Hong Kong par l'AFP le 25 mars 2019
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Les élections législatives de dimanche en Thaïlande ont été "truquées" et sont entachées d'"irrégularités" pour que l'armée conserve le pouvoir, a déclaré à Hong-Kong, dans un entretien exclusif avec l'AFP, l'ancien Premier ministre Thaksin Shinawatra, évincé en 2006 par les militaires.

"Tout le monde sait en Thaïlande, toute la communauté internationale qui a observé le scrutin sait qu'il y a eu des irrégularités", a relevé lundi le milliardaire de 69 ans, qui vit en exil et n'est pas retourné dans son pays depuis plus de dix ans.

Ces législatives ont été les premières à être organisées depuis le coup d'Etat en 2014 du général Prayut Chan-O-Cha contre la soeur de Thaksin, Yingluck.

Le chef de la junte est bien parti pour conserver le pouvoir à l'issue de ce scrutin, mais les accusations de fraudes se multiplient.

Et lundi, Thaksin Shinawatra a rompu un silence médiatique de plusieurs mois, ajoutant sa voix au chapitre.

"Le nombre des bulletins a dépassé de beaucoup le nombre des votants dans de nombreuses provinces", a-t-il assuré de la terrasse d'un hôtel de luxe plongeant sur la baie de Hong Kong.

Par ailleurs, près de deux millions de bulletins ont d'ores et déjà été invalidés en raison d'un système de cochage prêtant à confusion.

"Si le gouvernement est élu à partir d'une élection truquée, comment voulez-vous obtenir le respect de la communauté internationale ?", a déclaré Thaksin Shinawatra, renversé en 2006 pendant qu'il participait à l'Assemblée générale des Nations unies à New York.

Ce coup d'Etat avait par la suite provoqué près d'une décennie de violentes manifestations entre ses partisans (les "rouges" réformateurs) et ses ennemis (les "jaunes" proches de l'élite conservatrice, de l'armée et de la monarchie), des heurts qui ont fait de nombreux morts.

En 2008, pour échapper à des poursuites qu'il qualifie de "politiques", le magnat avait décidé de s'exiler à Dubaï.

- "Profite de la vie" -

"J'aime toujours mon pays, j'aime mon peuple", mais si aucun retour en Thaïlande n'était possible, "je m'en fiche", a déclaré l'ex-Premier ministre, éphémère propriétaire du club de football anglais de Manchester City dans les années 2000.

Alors que beaucoup le soupçonnent de continuer à tirer dans l'ombre de nombreuses ficelles, il a insisté sur le fait qu'il ne contrôlait plus les factions politiques liées à son clan.

"Je vais avoir 70 ans cette année. Si je devais créer un nouveau parti, cela serait celui : +Profite de la vie+", a-t-il plaisanté.

Vendredi, le milliardaire a célébré le mariage de sa plus jeune fille à Hong Kong, en présence notamment de la soeur du roi de Thaïlande, la princesse Ubolratana.

Cette dernière avait voulu se présenter contre la junte au poste de Premier ministre pour un parti lié à Thaksin Shinawatra.

Mais le monarque Maha Vajiralongkorn avait rapidement torpillé les ambitions de sa soeur et opposé une fin de non-recevoir à cette candidature "hautement inappropriée", la monarchie se devant de rester "au-dessus de la politique".

Encore très populaire au sein des classes rurales défavorisées du nord de la Thaïlande, Thaksin Shinawatra est accusé par ses détracteurs de corruption et d'avoir versé dans le populisme au point d'avoir été surnommé par certains "le Berlusconi d'Asie".

"Personne n'est parfait. Personne n'a raison ou tort à 100%. Certes, nous devons apprendre du passé, mais nous ne devons pas être prisonniers de ce passé", a relevé le magnat.

Né à Chiang Mai (nord) dans une famille d'origine chinoise prospère grâce au commerce de la soie, Thaksin Shinawatra a commencé sa carrière dans la police avant de se lancer dans les affaires dans les années 1980 et de faire fortune dans les télécommunications.

Aujourd'hui, "le seul moyen pour la Thaïlande de prospérer est de devenir une démocratie à part entière et d'organiser des élections libres et équitables", a-t-il conclu, insistant sur le fait que si des manifestations devaient avoir lieu, elles se devaient d'être "pacifiques".

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