Asile : tirs croisés de LR et la gauche contre la majorité, elle-même soumise à des tensions

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Par Fabrice RANDOUX - Paris (AFP)
Publié le 05 avril 2018 - 02:09
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Tirs croisés sur le projet de loi "asile-immigration" : la majorité, elle-même soumise à des tensions, s'est retrouvée, au premier jour de l'examen des 900 amendements en commission, prise à partie par LR dénonçant un "appel d'air" et par la gauche indignée d'un "affaiblissement des droits fondamentaux".

La droite a focalisé ses critiques sur les premiers articles du texte, qui visent à faciliter le séjour de ceux ayant obtenu une protection internationale.

Cible majeure de LR : la possibilité pour les mineurs reconnus réfugiés, qui jusqu'ici pouvaient faire venir leurs parents, de faire venir aussi leurs frères et soeurs, pour que "le droit à la réunification familiale ne s’exerce pas au détriment de l’unité des familles".

"On va pousser des familles à envoyer des mineurs en tête de pont", a dénoncé Fabien Di Filippo (LR), jugeant cela "humainement scandaleux". "Votre naïveté va conduire à une augmentation des flux", a renchéri Eric Ciotti (LR).

Ces propos ont fait bondir plusieurs députés LREM. "Qu'y a-t-il d'humainement scandaleux à permettre à des mineurs de pouvoir reconstituer leur famille ? Comment peut-on être qualifié de +tête de pont+ quand on fuit une zone de guerre ou qu'on est une jeune fille mutilée?", a ainsi répondu Laetitia Avia.

Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a estimé que LR "confond" les mineurs réfugiés - 400 en 2016 - avec "les mineurs non accompagnés". "Ceux-là (ndlr, près de 15.000 l'an dernier), qui viennent surtout de Guinée, de Côte d'Ivoire, du Mali, n'obtiendront pas le statut du réfugié", a-t-il assuré.

Autre angle d'attaque LR : la lutte contre le terrorisme. Eric Ciotti a déposé des amendements pour que l'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) puisse "retirer" le statut de réfugié lorsque la personne est soupçonnée de radicalisation, et pas seulement en cas de condamnation ou menace grave pour la sécurité nationale.

L'Ofpra travaille "avec la DGSI (Direction générale de la sécurité intérieure", a répondu M. Collomb, et a "la préoccupation à chaque instant de protéger le territoire", selon la rapporteure Elise Fajgeles.

- Tensions sur le délai d'appel -

En appui de la majorité face à la droite sur ces premiers articles, la gauche est montée au front quand on a abordé la réduction, contestée par les associations, des délais d'instruction de la demande d'asile. L'objectif du gouvernement est d'arriver à six mois contre quatorze aujourd'hui.

Ugo Bernalicis (LFI) a dénoncé un "rabot majeur et inacceptable" sur la réduction de 120 à 90 jours du délai pour déposer la demande d'asile après l'entrée en France. Au-delà, le dossier sera examiné en "procédure accélérée", une "sous-procédure" offrant moins de garanties, selon le socialiste Hervé Saulignac, mais créée par l'ex-majorité lors de la précédente réforme de l'asile en 2015.

Pour le communiste Stéphane Peu, cette disposition "affaiblit les droits fondamentaux des demandeurs d’asile" car elle ne tient pas compte des "difficultés à obtenir un rendez-vous" en préfecture.

Une vingtaine de "marcheurs" critiques ont plaidé dans ce sens, estimant comme Delphine Bagarry que "le primo-arrivant en France n’est pas toujours informé des démarches qu’il doit entamer". Mais ils ont surtout protesté contre un autre point controversé du texte, la réduction d'un mois à quinze jours du délai pour faire appel d'un rejet. Ce délai a été jugé "beaucoup trop court" pour Martine Wonner.

Le chef de file LREM Florent Boudié et la rapporteure ont proposé de permettre le dépôt d'un "recours sommaire" qui pourrait être complété par un mémoire avant l'audience d'appel mais ils n'ont pas réussi à faire adopter leurs amendements, critiqués jusque dans leur majorité. Pour la LREM Sonia Krimi comme le MoDem Erwann Balanant, ces recours simplifiés risquaient d'augmenter le rejet en étant jugés trop sommaires.

La commission a cependant voté quelques amendements pour garantir certains droits des demandeurs.

Ainsi, un amendement de la rapporteure, initialement porté par une cinquantaine de LREM, exclut les pays qui pénalisent l'homosexualité de la liste des "pays d'origine sûrs" (dont les demandeurs sont soumis d'office à la procédure accélérée et peuvent être renvoyés même s'ils font appel d'un rejet). Cela concerne l'Inde, le Sénégal et le Ghana. M. Boudié a fait voter des amendements pour s'assurer de la réception par le demandeur de la notification des décisions de l’OFPRA par voie électronique ou pour garantir la présence de l'interprète lors d'une audience en vidéo-conférence.

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