Etats-Unis : un médecin blessé par balle veut s'exprimer sur les armes à feu

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Par W.G. Dunlop - Baltimore (Etats-Unis) (AFP)
Publié le 17 janvier 2019 - 08:52
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Le Dr Joseph Sakran, qui a reçu une balle dans le cou à l'âge de 17 ans, à l'hôpital Johns Hopkins de Baltimore le 2 janvier 2019
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© William DUNLOP / AFP
Le Dr Joseph Sakran, qui a reçu une balle dans le cou à l'âge de 17 ans, à l'hôpital Johns Hopkins de Baltimore le 2 janvier 2019
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Joseph Sakran avait 17 ans lorsqu'il a reçu une balle dans le cou. Aujourd'hui chirurgien, il soigne sur sa table d'opération des victimes de fusillades, et voit dans les violences par armes à feu aux Etats-Unis un problème de santé publique auquel les professionnels du secteur doivent s'attaquer.

Le médecin de Baltimore, l'une des villes les plus violentes du pays, est le visage d'une campagne destinée à fédérer tous ceux soignant au quotidien les victimes de violences par balles, afin de mieux combattre ce qu'il qualifie de "crise de santé publique".

Cette dernière tombe selon lui sous la "responsabilité" des professionnels de la santé et de leur travail de "prévention", au même titre que les autres menaces planant sur la santé des Américains, tabac ou obésité.

Pour le chirurgien de 41 ans, qui dit avoir parlé à "des centaines, voire des milliers", de détenteurs d'armes, la solution n'est pas de les interdire.

"Dans les années 1960 et 1970, lorsque les gens mourraient en nombre dans des accidents de la route, nous ne nous sommes pas débarrassés des voitures. Nous avons réfléchi à la façon de les rendre plus sûres", explique-t-il depuis l'hôpital Johns Hopkins de Baltimore, où il est chirurgien en chef aux urgences.

- "Recouvert de sang" -

La vie de Joseph Sakran a basculé en 1994 après un match de football américain à Burke, dans l'Etat de Virginie.

Une bagarre a éclaté, quelqu'un a ouvert le feu et l'adolescent de 17 ans qu'il était à l'époque s'est retrouvé "recouvert de sang", au point de ne pas pouvoir déterminer où la balle s'était logée.

Les médecins ont prélevé un morceau de veine sur l'une de ses jambes afin de pouvoir sauver sa carotide. Il est resté hospitalisé pendant plusieurs semaines, subissant de nombreuses opérations, dont il porte toujours les stigmates aujourd'hui.

"Cela m'a donné l'envie de faire carrière dans la médecine et de devenir chirurgien traumatologue", raconte-t-il.

Clin d'oeil du destin: il a fait ses classes dans le même hôpital, formé par ceux qui lui avaient sauvé la vie quelques années auparavant.

- Une réponse au lobby -

Joseph Sakran se dit maintenant "légèrement irrité" par les commentaires de la NRA (National Rifle Association), puissant lobby américain des armes à feu, pour lequel les professionnels de la santé n'ont pas leur mot à dire dans le débat.

"Quelqu'un devrait dire aux médecins suffisants et anti-armes de rester à leur place", a tweeté en novembre la NRA, qui avait notamment dans son viseur une revue médicale publiant à son goût beaucoup trop d'articles favorables à un plus grand contrôle des armes.

"Qu'un groupe dise que nous ne faisons pas partie de la solution a suscité un tollé parmi la communauté médicale, et pas seulement chez ceux ne possédant pas d'armes", relève M. Sakran.

Le quadragénaire est aujourd'hui l'une des voix d'une campagne médiatique dont le nom, "This is our lane" (nous sommes à notre place) répond directement aux attaques de la NRA.

Mais "ce n'est pas eux contre nous", souligne-t-il. "Il s'agit surtout de travailler ensemble et de faire en sorte de rendre nos communautés plus sûres".

L'objectif de la campagne? Communiquer sur les violences par armes à feu, appeler à changer les lois, et former les professionnels de la santé à mieux aborder le sujet avec leurs patients, en leur donnant par exemple des conseils sur la façon d'entreposer leurs armes en toute sécurité.

Les professionnels de la santé sont selon lui "en première ligne" face aux violences par armes à feu, et occupent une position privilégiée pour s'adresser aux victimes et à leurs familles.

"Nous les voyons dans leurs moments les plus vulnérables et difficiles", confie-t-il.

Près de 40.000 personnes sont tuées chaque année par balles aux Etats-Unis.

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