Bangladesh : désespérés, les Rohingyas cherchent une échappatoire

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Par AFP
Publié le 15 juin 2017 - 20:42
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Des migrants Rohingyas au bangladesh, qui ont fuit les violences ethiques dans l'ouest de la Birmani
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Des migrants Rohingyas au bangladesh, qui ont fuit les violences ethiques dans l'ouest de la Birmanie, où vit cette minorité musulmane, le 25 décembre 2016 à Teknaf
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Dans la torpeur et l'insalubrité de camps surpeuplés du Bangladesh, des centaines de milliers de réfugiés rohingyas ayant fui la Birmanie rêvent d'une vie meilleure, loin d'ici.

Face à la fermeture des routes maritimes traditionnelles utilisées par les trafiquants, les membres de cette minorité musulmane persécutée en Birmanie doivent trouver de nouveaux moyens pour s'enfuir de l'impasse que constitue pour eux le Bangladesh.

"Les gens désespèrent de quitter les camps", raconte le responsable communautaire Mohammad Idris.

"Ceux qui ont de l'or ou de l'argent paient des trafiquants pour qu'ils les sortent par voie aérienne, ceux qui n'en ont pas tentent de passer par la route."

Pays pauvre d'Asie du Sud, le Bangladesh n'accorde pas le statut de réfugié aux nouveaux arrivants, alors même que 70.000 personnes ont franchi clandestinement la frontière à l'automne pour échapper aux meurtres, viols en réunion et tortures dans l'ouest de la Birmanie.

Il leur refuse aussi le droit de travailler et aimerait déplacer ces populations sur une île déserte du golfe du Bengale présentant des risques d'inondations. Un projet dénoncé à grands cris par les défenseurs des droits de l'homme.

Les routes océaniques utilisées par les trafiquants pour exfiltrer des Rohingyas vers l'Asie du Sud-Est sont plus étroitement surveillées depuis que les images en 2015 de rafiots surpeuplés, remplis de personnes affamées, ont choqué la planète.

Mais il en faut plus pour arrêter les filières de passeurs qui font preuve de toujours plus d'ingéniosité.

"C'est incroyable à quel point les réseaux de trafiquants sont profondément enracinés sur le terrain et opèrent facilement entre les pays", constate Shakirul Islam, directeur de l'organisation d'aide aux migrants Ovibashi Karmi Unnayan Program.

- Faux papiers -

Ces mafias sont capables de fournir de faux passeports et certificats de naissance bangladais aux Rohingyas, ethnie apatride car non reconnue par la Birmanie à majorité bouddhiste bien que certains y soient installés depuis plusieurs générations.

La plupart des Rohingyas au Bangladesh vivent dans une misère noire dans les camps du district côtier de Cox's Bazar, à la pointe sud-est du pays. Avant même les arrivées massives de la fin de l'année dernière, 300.000 personnes s'y trouvaient déjà, legs de vagues de violence passées.

Mohammad, un Rohingya sans-papiers de 20 ans, a dû dépenser 600.000 takas (6.750 euros) pour atteindre l'Arabie saoudite où il réside désormais.

"J'ai payé un ami sur place pour me procurer un passeport du Bangladesh et d'autres papiers. Il m'a aussi aidé à passer la douane", raconte-t-il à l'AFP dans une conversation Whatsapp, demandant de ne pas révéler son nom de famille.

Ceux qui ne peuvent se payer un billet d'avion prennent le bus, ou même marchent. Direction l'Inde puis le Népal ou le Pakistan. Certains se sont même installés dans la région sous tension du Cachemire.

- Paiements dématérialisés -

La prolifération des services de paiement par mobile au Bangladesh facilite l'activité des trafiquants. Selon une étude, il leur est ainsi plus aisé de transférer discrètement de l'argent aux personnes se trouvant sur leur chemin pour qu'ils ferment les yeux sur leurs affaires.

"Ils distribuent efficacement l'argent entre tous les acteurs-clés", dit Selim Ahmed Parvez, chercheur à la fondation Manusher Jonno, "des trafiquants locaux aux forces de l'ordre, responsables administratifs, politiciens et parrains".

Le Rapid Action Battalion (RAB) du Bangladesh, une unité d'élite paramilitaire constituée pour lutter contre l'extrémisme et le crime organisé, dit combattre ces filières.

"Nous avons mis un terme avec succès aux migrations par bateau. Nous nous concentrons maintenant sur les autres routes de contrebande", affirme à l'AFP Nurul Amin, commandant du RAB à Cox's Bazar.

Mais, s'interroge-t-il, "si quelqu'un veut à tout prix émigrer, pouvez-vous vraiment l'en empêcher ?"

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