Juliette Gréco : la muse de Saint-Germain-des-Prés a 90 ans (DIAPORAMA + VIDÉO)

Elle fait mentir sa chanson qui dit qu'"il n'y a plus d'après à Saint-Germain-des-Prés". A 90 ans, Juliette Gréco, née le 7 janvier 1927, n'a pas quitté les lumières de la scène et les feux de l'actualité.

Celle qui fut, dans les années d'après-guerre, "la muse de Saint-Germain-des-Prés", a entamé il y a deux ans une tournée d'adieux baptisée Merci. "J'ai 88 ans, et je n'ai pas envie de monter sur scène en boitant. C'est une question de courtoisie, de dignité. (...) Je veux partir debout. Je ne voudrais pas faire pitié. J'ai horreur de ça", déclarait-elle à l'époque au Parisien.

Malgré quelques coups de fatigue, plusieurs concerts annulés ou écourtés, et surtout un AVC il y a presque un an, le 24 mars 2016 à Lyon, la tournée a eu lieu. Juliette Gréco a ainsi fêté sur scène ses 89 ans, l'an dernier, sur la scène du Théâtre de la Ville à Paris. Son état de santé reste cependant fragile, et à la fin de l'année dernière elle a dû à nouveau interrompre cette tournée d'adieux, pour se reposer et se remettre de son AVC.

C'est que cette icône de la chanson française n'a plus 18 ans, l'âge où la petite provinciale née à Montpellier découvrit Saint-Germain-des-Prés, l'existentialisme, les Jeunesses communistes, Boris Vian et Jean-Paul Sartre, Prévert et Kosma, Françoise Sagan et Miles Davis, le jazz et la chanson, le Tabou et le Bœuf sur le toit.

Le succès sera fulgurant, dans les années 50 et 60: l'Olympia, les États-Unis, des chansons écrites par Raymond Queneau, Robert Desnos, Jacques Prévert, Charles Aznavour, Charles Trénet, Georges Brassens, Guy Béart, Léo Ferré ou Serge Gainsbourg, et qui passeront à la postérité: Si tu t'imagines, Je hais les dimanches, Il n'y a plus d'après, Jolie môme, Un petit poisson un petit oiseau, Déshabillez-moi, La Javanaise…

Comme beaucoup de chanteuses, Juliette Gréco a fait un détour important par le cinéma, tournant dans une trentaine de films: Hollywood (Le soleil se lève aussi, Les racines du ciel, Drame dans un miroir), le cinéma français (Orphée, Quand tu liras cette lettre, Elena et les hommes) et la télévision (en 1965 elle est la vedette du feuilleton Belphégor ou le Fantôme du Louvre).

Mais c'est la chanson (la scène, les enregistrements, et quelques essais de parolière) qui remplira l'essentiel du reste de sa carrière, des années 70 au début du XXIe siècle, avec des périodes d'absence mais des retours réguliers à l'Olympia, au Châtelet, en France et à l'étranger, de nouveaux albums (dont le dernier, Juliette Gréco chante Brel, date de 2013) et des collaborations avec des chanteurs de la jeune génération (Olivia Ruiz, Adrienne Pauly, Miossec, Abd Al Malik, Féfé, Melody Gardot, Marc Lavoine).

Côté vie privée, sa voix un peu nasillarde et gouailleuse, son physique de liane, ses grands yeux en amande, son nouveau nez, sa robe noire, son indépendance, sa modernité et ses idées de gauche séduiront le trompettiste de jazz Miles Davis, le comédien Philippe Lemaire (son mari de 1953 à 1956, avec lequel elle eut une fille, Laurence-Marie, en 1954), le producteur américain Darryl F. Zanuck, et Michel Piccoli (son mari de 1966 à 1977).  Comme elle le dit dans sa chanson Je suis comme je suis (1951, paroles de Jacques Prévert, musique de Vladimir Cosma): "J'aime celui qui m'aime/ Est-ce ma faute à moi/ Si ce n'est pas le même/ Que j'aime chaque fois?"

Pourtant cela fait longtemps que Juliette est devenue sage. C'est en 1988 qu'elle a épousé son pianiste et accompagnateur, Gérard Jouannest, qu'elle connaissait depuis une vingtaine d'années et qui est toujours à ses côtés, à 83 ans.

(Voir ci-dessous une vidéo de Juliette Gréco interprétant Déshabillez-moi à l'Olympia en 2004, et un diaporama):