L'armée dresse des aigles pour chasser les drones indésirables

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Par AFP
Publié le 16 février 2017 - 09:23
Mis à jour le 18 février 2017 - 10:15
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L'aigle D'Artagnan lors d'une démonstration de chasse au drone le 6 janvier 2017 sur la base aérienn
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© Caroline BLUMBERG / POOL/AFP
L'aigle D'Artagnan lors d'une démonstration de chasse au drone le 6 janvier 2017 sur la base aérienne BA-118 de Mont-de-Marsan
© Caroline BLUMBERG / POOL/AFP

Face à la menace croissante de drones malveillants, ou mal contrôlés, l'armée française explore toutes les options de défense: depuis six mois, elle entraîne quatre aigles royaux à chasser ces engins dans le sud-ouest du pays.

Entre deux départs de chasseurs Rafale, un drone s'élève dans les airs, son bourdonnement audible en bord de piste. Un piaillement strident se rapproche et vient couvrir ce bruit: c'est le "glatissement" de l'aigle, parti de la tour de contrôle à 200 mètres de là, qui fond sur sa proie. En une vingtaine de secondes, le drone est saisi dans les serres de l'oiseau, plaqué au sol, et le rapace couvre sa "proie" de ses ailes. Drone neutralisé, fin de l'exercice.

"Les aigles progressent bien, les résultats sont encourageants", analyse le "Commandant Christophe" (les militaires ne donnent pas leur nom par mesure de sécurité), de l'Escadron des Services de la circulation aérienne, unité chargée d’évaluer cette capacité à plumes.

Déjà majestueux - bien qu'à 8-9 mois encore "des adolescents" -, ces quatre aigles baptisés du nom des célèbres mousquetaires, D'Artagnan, Aramis, Athos et Porthos, sont entraînés depuis l'été à la chasse au drone à Mont-de-Marsan dans le sud-ouest de la France. Cette base aérienne est l'une des cinq en France dotées d'une fauconnerie, avec des faucons et des autours de palombes (un rapace proche de l'épervier) chargés d'ordinaire de "l'effarouchement" d'oiseaux près des pistes.

- Oiseau 'très courageux' -

Pourquoi l'aigle royal (Aquila chrysateos)? Car la nature fait de lui "l'arme" adaptée: "Comme tous les rapaces, il a une vue très développée", peut repérer une proie à 2 km.

Grand (jusqu'à 2,20 m d'envergure), robuste (3 à 5 kg), c'est un oiseau "très courageux". Et puissant en chasse: "Un aigle royal, c'est 250 kg de pression par cm2" et ils sont lancés à 80 km/h en vol linéaire (jusqu'à 180 km/h en piqué), énumère Gérald Machoukow, fauconnier civil employé sur la base.

La police néerlandaise, pionnière, dressait depuis fin 2015 des rapaces (des pygargues à tête blanche) à intercepter des drones. Gérald Machoukow, envoyé jauger l'expérience, en revint convaincu: les aigles peuvent faire le boulot.

Issus d'oeufs d'élevage, les aigles de la base ont été nourris dès l'âge de trois semaines sur des carcasses de drones. Très vite, ils ont assimilé le drone à la nourriture, une nourriture qui un jour s'est mise à voler. L'instinct du chasseur a fait le reste et l'automatisme drone = nourriture reste perpétué par des exercices, bientôt quotidiens, où la "prise" du drone est aussitôt récompensée par un morceau de viande donné par le fauconnier avec lequel l'aigle opère en binôme.

D'abord des interceptions en vol rectiligne, puis d'un point surélevé, bientôt des tests de vol libre: les recrues ont encore du travail avant d'être opérationnelles.

- 'Ne pas fantasmer' -

Le buzz autour du projet "Rapaces/Drones" est palpable. Mais le Commandement de la défense aérienne rappelle que la capacité est "au stade d'évaluation" sur 24 mois. Un premier bilan sera fait en juin, à mi-parcours.

Mais la première impression est bonne: une possibilité "très intéressante, d'un très bon ratio coût/efficacité", pour "sécuriser des installations, comme un aéroport, ou des événements, type match de football, un sommet, la visite d'une haute autorité, etc", résume le commandant Laurent.

Pour les protéger d'éventuelles coupures, les aigles sont équipés de "mitaines" en kevlar et cuir. Car pas question de risquer la vie d'oiseaux "qu'on aime profondément" ou "d'envoyer mes aigles au carton", prévient le fauconnier. "Il ne faut pas fantasmer" et imaginer des aigles lancés sur de gros drones de 20 kg: "impossible", ajoute-t-il.

Mais des appareils de 2, 3 voire 4 kg, oui. Or ces petits engins représentent plus de 75% de la "menace drone", souligne le commandant Laurent, rappelant que les aigles ne sont pas la panacée: mais une séduisante "solution complémentaire" anti-drones, en marge d'autres options (fusils, brouillage, etc) déjà déployées, ou développées. Ainsi, la base de Mont-de-Marsan a commandé une seconde couvée d'aigles-aviateurs, quatre aiglons attendus d'ici l'été.

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