Abattage halal ou casher : les questions demeurent sur les règles

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La rédaction de FranceSoir.fr avec AFP
Publié le 22 juillet 2016 - 18:10
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Halal ou casher, l'abattage rituel, régulièrement contesté, défend ses pratiques au nom de la liberté de culte.
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Halal ou casher, l'abattage rituel, régulièrement contesté, défend ses pratiques au nom de la liberté de culte. Sans étourdissement de la bête mais "dans les règles de l'art" et avec le souci de la souffrance animale, assurent ses experts.

Une commission d'enquête parlementaire doit rendre un rapport en septembre sur les "conditions d'abattage des animaux de boucherie" dans les 263 abattoirs français, dont 218 ont l'agrément nécessaire au sacrifice juif ou musulman. La filière rituelle, surtout halal, n'est pas négligeable, qui représente 14% de l'abattage des bovins et 22% de celui des ovins, selon Interbev, l'interprofession des viandes.

En France, la réglementation oblige à l'étourdissement des animaux destinés à la consommation avant leur abattage. Mais une dérogation est prévue, en vertu des prescriptions juives ou musulmanes selon lesquelles une bête tuée alors qu'elle est déjà inconsciente est impure. La Cour européenne des droits de l'Homme (CEDH) a invoqué la liberté de culte pour consacrer cette disposition, encadrée depuis 2011 par un régime d'autorisation préalable.

Le président de la commission d'enquête, Olivier Falorni (apparenté PRG), ne veut pas d'un débat sur le terrain cultuel. "La question qui nous importe, c'est la souffrance animale, et c'est à ce sujet que l'abattage sans étourdissement nous interroge", explique-t-il à l'AFP. Le député de Charente-Maritime s'est déplacé dans un abattoir halal à Meaux, en Seine-et-Marne. "Nous avons vu un sacrificateur extrêmement expérimenté qui égorgeait l'animal en cinq secondes", confie le parlementaire. Mais "il y a au moins une minute de doute entre la saignée de l'animal et sa perte de conscience effective".

La grande mosquée de Paris (GMP) contrôle, avec celles de Lyon et Evry, des sacrificateurs détenteurs d'un certificat de compétence en protection animale (CCPA) et d'une habilitation religieuse (environ 450 cartes en circulation pour le halal). Elle met en avant la sûreté de ses procédures. "Le bien-être animal est inscrit dans le Coran depuis 14 siècles !", fait valoir la vétérinaire Naima Ouachour, responsable qualité au service halal de la GMP. "Les sacrificateurs sont sensibilisés sur ce point, primordial. L'animal ne doit pas voir le sang ni le couteau". Le geste sacrificiel sur la bête, allongée en direction de La Mecque, est "opéré rapidement pour éviter stress et douleur".

Le rituel casher est proche, et même plus strict. Le shohet (sacrificateur) est lui aussi titulaire du CCPA, en plus d'une carte signée par le grand rabbinat de France. Les parties arrières, susceptibles d'avoir été en contact avec le nerf sciatique - jugé impropre -, sont écartées, et la carcasse est examinée après abattage pour vérifier qu'elle ne présente pas de lésions, notamment aux poumons.

David Bloch emploie deux sacrificateurs casher dans son abattoir à Haguenau, en Alsace. "Quand on nous dit que le métier n'a pas évolué ce n'est pas vrai: on est passés des tueries artisanales à des abattoirs modernes, avec un contrôle sanitaire bien plus précis", assure-t-il en relevant que la réglementation contraint, après un laps de temps n'excédant pas une minute trente, à un "étourdissement pour soulager l'animal si le sacrifice a été mal fait". "Un geste rituel pratiqué selon les règles de l'art, avec perte de conscience rapide, n'engendre pas plus de souffrance qu'un conventionnel", affirme le grand rabbin Bruno Fiszon, membre de l'Académie vétérinaire et conseiller du grand rabbin de France.

Et Olivier Falorni de rappeler que sa commission d'enquête est née après trois premières vidéos choquantes de l'association L214 qui, "en l'occurrence, concernaient l'abattage conventionnel". Certaines défaillances dans les abattoirs relèvent de la maltraitance, selon le député: "Réduire la problématique de la souffrance animale à l'abattage rituel serait un non-sens".

Les cultes peuvent-ils cependant évoluer sur l'étourdissement ? Olivier Falorni constate plutôt un "raidissement", le Conseil français du culte musulman (CFCM) et les grandes mosquées y étant désormais, comme le Consistoire israélite, unanimement opposés. Or des pays musulmans, comme l'Indonésie, acceptent l'étourdissement préalable s'il est réversible. Un étourdissement post-jugulation, presque simultanément à l'égorgement, est aussi possible. "Je crois que le consommateur musulman doit pouvoir avoir le choix entre deux types de halal, avec ou sans étourdissement", estime le président de la commission d'enquête.

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