Acte isolé ou expression d'une colère plus large, la gifle à Macron divise

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Par Anne RENAUT - Paris (AFP)
Publié le 09 juin 2021 - 16:56
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Emmanuel et Brigitte Macron le 8 juin 2021 à Valence
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© PHILIPPE DESMAZES / POOL/AFP
Emmanuel et Brigitte Macron le 8 juin 2021 à Valence
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Acte isolé ou expression d'une colère plus profonde ? L'exécutif voit dans la gifle au chef de l'Etat un "fait isolé" mais pour d'autres politiques ou analystes, elle est le signe d’un mécontentement toujours présent depuis le mouvement des "gilets jaunes".

Si la gifle infligée à Emmanuel Macron mardi dans la Drôme par un fan d'histoire médiévale abonné à des sites d'extrême droite est un acte "grave", qui a suscité l'indignation générale, il n'est "pas représentatif" des Français ou même de la "colère" d'une partie d'entre eux, a estimé mercredi le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal.

S'il y a bien "des Français inquiets, qui doutent, qui sont en colère", ils "savent exprimer cela dans le cadre du débat et dans le cadre du vote", a-t-il plaidé.

Le chef de file des députés LREM Christophe Castaner a lui fait valoir qu'Emmanuel Macron, reparti aussitôt après la gifle saluer des badauds, allait "au contact" avec les Français, alors que le chef de l'Etat est accusé par ses adversaires d'arrogance voire de mépris.

Emmanuel Macron s'est lancé depuis la semaine dernière dans un tour de France des régions pour prendre le pouls du pays après plus d'un an de pandémie, qui a succédé à la crise des "gilets jaunes" fin 2018-début 2019, pendant laquelle des milliers manifestants ont défilé chaque semaine contre la politique du gouvernement.

Des portraits du chef de l'Etat avaient notamment été brûlés et le président avait connu à l'époque sa plus forte impopularité.

- Détestation -

Cette gifle pourrait être le "signe d'un retour de colère extrêmement chaude" qui a été "gelée" par le Covid, prévient le politologue Pascal Perrineau, qui fut l'un des "garants" du grand débat organisé par l'exécutif après la crise des "gilets jaunes".

Un avis partagé par le potentiel adversaire d'Emmanuel Macron en 2022, l'ex-LR Xavier Bertrand, qui pense comme lui qu'il faut être "à portée de baffe" pour sentir le "pouls" des Français et déplore que M. Macron n'ait "jamais pris la mesure de la crise des +gilets jaunes+" à venir lors de son itinérance mémorielle en novembre 2018.

Ce geste traduit le fait qu'il n'y a "plus rien entre le président et des Français en colère", alors que pendant des décennies, le débat politique s'organisait avec des "forces collectives", des partis politiques, des syndicats, ou des corps intermédiaires. "Là, il y a plus rien" et "même plus d'idéologie", explique sur France 5 M. Perrineau chercheur au Cevipof.

"Quand il n'y a plus d'idéologie, quand il n'y a plus de collectif, (...) il reste des personnes, des individus, que l'on peut aduler ou détester, et il y a beaucoup de détestation parce que la société française est en colère", souligne-t-il.

Une étude de la Fondation Jean-Jaurès avançait en avril que le niveau de détestation d'Emmanuel Macron était le principal facteur d'une éventuelle victoire de Marine Le Pen à la présidentielle, outre le rapprochement programmatique entre RN et LR et la "dédiabolisation" de l'ancien Front national.

Les quatre émotions qui ressortent le plus sur M. Macron sont toutes négatives: la "colère", le "désespoir", le "dégoût", puis la "honte", relèvent les auteurs, en rappelant que les émotions jouent "un rôle considérable" dans les comportements électoraux.

- "Ecoute" -

Le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a lui vu dans ce geste "une longue détérioration du débat public".

Cet acte "oblige à faire le débat démocratique de manière apaisée, à respecter son interlocuteur" et à "ne pas avoir des propos qui peuvent s'apparenter à de la violence", a plaidé à cet égard le patron de la CFDT Laurent Berger.

Le patron de la CGT Philippe Martinez pointe pour sa part "un problème démocratique dans ce pays, une qualité d'écoute qui n'est pas à la hauteur des problèmes sociaux et économiques posés".

Relancer la réforme des retraites, comme le suggère le gouvernement, après une crise sanitaire qui a "éreinté" les salariés, peut ainsi provoquer un "mouvement social d'ampleur", met en garde l'analyste de l'Ifop Jérôme Fourquet.

Le souverainiste et candidat à l'Elysée Nicolas Dupont-Aignan, estime lui sur Twitter qu'Emmanuel Macron "est honni parce qu'il ne représente plus le pays" et voit dans la gifle la manifestation d'une "crise démocratique", à partir de laquelle "il ne faut pas s'étonner de voir ces actes de violence".

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